Y’a pas de bobos

chronique Humanité dimanche Au boulot n° 529

 

Ça ne vous énerve pas parfois d’entendre parler de « bobos » pour des gens qui travaillent ?

« Bobos », Le Pen a pris ce mot comme repoussoir : elle caricature par là tout salarié à l’aise pour lequel ce serait prétendument trop facile d’être progressiste quand il ne subit pas dans sa chair les conséquences de la crise.

D’autres incriminent ainsi les « catégories socio professionnelles supérieures », les plus aisées, en un mot des cadres. Mais en droit du travail, les cadres sont de droit commun, et il y a très peu de « cadres supérieurs » assimilables aux patrons. Et les millions de cadres sont « prolétarisés » de longue date, bloqués dans leur autonomie, leurs salaires, leurs carrières, et menacés du chômage comme tout le salariat. Même chez Google on se syndique.

A part dans la littérature (depuis Bel Ami de Maupassant, 1885, il est vrai), il n’y a pas de « bourgeois bohêmes » qui bossent vraiment ! On se lève de bonne heure, on a tous un horaire, un contrat, un code du travail, des conventions collectives et un patron qui veut de la rentabilité sur notre dos.

Ne laissons pas insinuer du « séparatisme » au sein de notre grande classe sociale commune, le salariat d’après de vagues présupposés stigmatisant des styles ou des comportements culturels anticonformistes. Ne nous faisons pas moquer et ne nous moquons pas de nous-mêmes, en divisant nos rangs entre « bobos » et non « bobos ».

Tous ceux qui travaillent et sont salariés sont exploités et susceptibles d’être victimes de la crise sociale et sanitaire.

C’est le labeur et la feuille de paie qui nous définissent d’abord sociologiquement et pas la mentalité présumée.

98 % des 88 % de salariés gagnent moins de 3200 euros, et 50 % gagnent moins de 1750 euros.  10 % ont plus de bac + 2.

Certes il y a un haut, un  milieu et un bas du salariat. On ne vit pas de la même façon à 900 euros, à 1700 et à 3200 euros. Mais on est une seule et même classe, on est 30 millions de salariés toutes et tous exploités.  De l’ingénieur au balayeur c’est notre force.

Gérard Filoche

 

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