Pourquoi depuis juillet 2024 la ligne du NFP pour chercher à imposer un gouvernement issu de ses rangs est juste :

Les 30 juin et 7 juillet 2024 un sursaut exceptionnel, avec un nombre de votants exceptionnel a placé le nouveau front populaire en tête à l’Assemblée nationale. 9 millions de voix, 192 députés de 7 partis. C’est l’événement de l’élection : le RN annoncé vainqueur par 17 sondages, était défait. La gauche qui s’était réunie avait remobilisé son électorat, et crée la « surprise » : c’était un effet différé des grandes mobilisations du printemps 2023 avec toute l’Intersyndicale contre la retraite à 64 ans. Macron avait procédé par 49-3, par coup de force, il était minoritaire.  En dissolvant brutalement l’Assemblée le 9 juin, Macron avait tenté un autre coup de force, il était encore battu. Macron avait favorisé le RN et voulu Bardella comme premier ministre, il était battu.

Il eut été légitime, pour Macron de tenir compte des urnes et de nommer un premier ministre issu du NFP. A ce moment-là, le NFP était uni et proposait unanimement Lucie Castets.

Il y a bien eu un débat de « méfiance » » au sein du NFP : défense de « tout le programme ou pas » ? Mais qui ne comprenait pas que la défense du programme du NFP ne pouvait être que progressive, surtout quand on n’avait pas la majorité de l’Assemblée, il fallait combiner des choix d’urgence possibles par décrets, et des batailles politiques plus dures pour arracher des majorités au cas par cas. Ceci dit, cela pouvait permettre d’améliorer concrètement le sort du salariat et de tracer une dynamique pour un vote ultérieur à gauche, à condition de continuer à proposer des listes communes et une candidature commune aux élections suivantes.

un gouvernement NFP aurait avancé sur les salaires et la retraite.

C’est pour cela que Macron n’a pas voulu tenir compte des urnes, un gouvernement NFP eut été trop dangereux pour le Medef, le CAC 40 et lui.

Alors Macron a réalisé un autre coup de force antidémocratique en nommant deux mois plus tard Michel Barnier, pourtant très minoritaire à l’Assemblée. Barnier a refusé de revenir sur les 64 ans et maintenu la politique fiscale dite de l’offre, en faveur des riches et du CAC 40.  Avec lui, Macron a encore échoué.

Macron a récidivé en nommant François Bayrou. Celui-ci a rapidement déjanté après avoir multiplié les fausses promesses, un faux conclave sur la retraite à 64 ans, et une fausse croisade contre la « dette ». Macron a encore échoué.

Macron a nommé, au bout de 15 mois, un de ses plus proches hommes liges, Sébastien Lecornu afin de poursuivre par la force la même politique pro riche et pro CAC 40 menée depuis 2017. Ce faisant il a encore échoué. Et quand bien même agite-t-il sans conviction une éventuelle « suspension » (sic) de la retraite à 64 ans, ça ne passe pas. Renommant « Biscornu », les mêmes difficultés existent : retraite, salaires, budget…

Le NFP a eu raison de tenir bon et de dénoncer ces coups de force successifs tout en continuant avec obstination de proposer un « gouvernement NFP ».

Ce choix correspond au réel, aux rapports de force réels, au stade réel de la crise institutionnelle, du moins tant qu’il n’y a pas d’explosion sociale capable de chasser Macron, et tant que celui-ci s’obstine dans ses mêmes coups de force à répétition. Le NFP propose de gouverner afin de prendre – enfin – des mesures sociales, sur les salaires, d’abroger les 64 ans, de bâtir un budget et une fiscalité plus juste socialement, il apparait légitime à le faire. Son crédit augmente dans l’opinion et dans l’électorat (encore faudrait-il qu’il reste uni).

La démarche opiniâtre du NFP use Macron, autant que ses échecs Barnier Bayrou, Lecornu 1, Lecornu 2. On passe ainsi d’une crise sociale, à une crise politique et à une crise institutionnelle aggravée. Le prétendu « bloc central » sur lequel Macron dit s’appuyer se révèle ni « bloc » ni « central ». Même des voix macronienne ont fini par lui dire : « donne le pouvoir a la gauche » ou bien « démissionne ».

Au sein du NFP, malheureusement, la LFI s’est peu à peu dissociée en affirmant que la question clef n’était plus de proposer un gouvernement NFP, mais d’exiger la destitution de Macron. Ils mettent la charrue avant les boeufs. Au point que LFI est allé jusqu’à dénoncer en termes violents, polémiques extrêmement durs, toute discussion avec Macron jusqu’à présenter cela comme une trahison, une capitulation.

La divergence s’est creusée non pas sur le fond du programme du NFP mais sur la stratégie pour défendre ce programme.

LFI a même expliqué que proposer un gouvernement NFP c’était « sauver Macron », accusant le reste du NFP de compromission, publiant des affiches qui mettaient dès février 2025, le PS sur le même plan que le RN et se présentant comme seule sauveuse de la gauche, du NFP, seule capable de présenter des candidatures séparatistes dite de « rupture » aux municipales et à la présidentielle. Mélenchon a expliqué des février 2025 que le NFP était « une alliance toxique » et que le signer avait été « une grosse bêtise ». En vérité, obsédé par la seule présidentielle, Mélenchon veut une candidature séparatiste LFI capable de s’imposer à toute la gauche.

Cette agressivité de LFI centrée contre le PS a permis à l’aile droite de celui-ci de peser lors du congrès de Nancy du 15 juin 2025 pour pousser la direction Faure au bord de la rupture de toute alliance avec LFI.  Celui-ci l’a concédé mais pas totalement.

Ce faisant, LFI se savait elle-même à contre-courant de l’opinion ultra majoritaire des 9 millions d’électeurs du NFP qui veulent l’union. A la fête de l’Humanité, le 14 septembre, ou les unitaires sont applaudis et ou les diviseurs sont sifflés, Mélenchon se sent même obligé de proposer une « coalition fédérative » (sic) dont il ne fait rien pour qu’elle existe.

Lorsque Macron s’enferre dans ses coups de forces successifs, que les menaces de dissolution et de destitution augmentent, la pression unitaire à la base (de LFI comme du PS) se fait plus forte.

LFI a reproposé au NFP de se rencontrer, hélas non pas pour gouverner, mais pour pousser plus que jamais à la destitution.

Après nos succès de Châteaudun, et du stand commun à la fête de l’Humanité, nous autres unionistes (LAPRES, Générations, Debout) sautons sur l’occasion (qui est en partie le fruit de notre travail idéologique et militant) pour (re)proposer l’union de tous, LFI et PS.

Cette fois c’est la direction du PS qui ne veut pas, à tort, participer.

Mais les deux appareils sont sous pression, car, en cas de dissolution de l’assemblée, ils ont gros à perdre. La puissance de la volonté unitaire à la base est considérable.

L’intelligence politique veut que l’union de toute la gauche sans exclusive se fasse plus que jamais, que soit reconstruit le NFP, et nombreux sont ceux qui comprennent qu’il n’y a pas de clivage stratégique sérieux et concret entre la défense d’un gouvernement de NFP de cohabitation et la mise en cause du pouvoir présidentiel de Macron, l’un et l’autre se complètent si l’on veut bien travailler en harmonie et confiance.

Nous disons : « il faut forcer la porte et imposer un gouvernement NFP » et quand la porte sera ouverte et le gouvernement installé, le reste viendra…

LFI dit « un gouvernement ne sert a rien, est impossible, on appelle d’abord à ce que Macron s’en aille »

Dans les révolutions, en général, les premiers mouvements ne s’en prennent pas au Roi, ils lui demandent du pain, et c’est quand il ne donne pas de pain qu’ils virent le Roi. Les femmes allaient chercher le pain à Versailles, les autres parlaient de République à Paris. Mais c’est aller chercher le pain qui a rapproché le pays de la République.

Opposer l’exigence du pain à l’exigence de faire partir le roi, n’a pas de sens sinon de diviser et d’affaiblir la gauche.

imaginez au Maroc, si au lieu de dire « on veut des hôpitaux avant des stades de foot », vous dites, « il faut d’abord chasser le roi sinon rien », vous changez malencontreusement la donne du mouvement en cours.

Que Macron s’entête et renomme encore un gouvernement à lui, va exacerber la situation de crise. Lecornu 2 ne semble soutenu que par 3 ou 4 partis sur 15 à lAssemblée. Nous sommes en pleine instabilité, et dans des cas comme ça, cela peut devenir explosif.

La mobilisation sociale est suspendue à une issue politique. Évidemment si le NFP n’était plus divisé, 120 députés d’un côté, 72 de l’autre, ce serait mieux. Exiger  fermement un gouvernement NFP est le bon cheminement.

Gerard Filoche 10 octobre 2025, 10 h

 

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