DSK et les couches moyennes « La flamme et la cendre »

A propos de « La flamme et la cendre », réflexion sur le salariat… (2002)

Que dit DSK, dans son livre, sur les classes sociales ?

En gros, le livre se veut théorique, explique que notre société est dorénavant structurée en un grand corps central, une grande couche moyenne… composée des salariés.

Il n’y aurait plus qu’environ 20 % d’exclus, de chômeurs en fin de droits, et non ré-insérables, de Rmistes, de travailleurs pauvres et précaires, de marginaux sociaux. Cette catégorie de pauvres et d’exclus serait l’ancien prolétariat révolutionnaire, le résidu de la division en classes antagonistes, cette ultime partie du peuple surexploitée et humiliée.

Il faut, dit DSK, avoir une politique adaptée à cette couche sociale écrasée, il faut la réintégrer au maximum de façon volontariste, et, pour cela prendre courageusement des mesures humanitaires, économiques et sociales, pour lesquelles elle n’a plus les forces de combattre par elle-même. Car, bien sûr, cette couche d’exclus, ne vote pas et ne lutte guère, elle est dépossédée de la puissance d’agir socialement, la droite l’ignore à cause de cela, elle ne fait plus peur, il n’y a pas de risque de révolution à cause d’elle.

Cependant les socialistes, parce qu’ils sont socialistes, doivent s’en préoccuper et soulager sa misère, l’aider, diminuer l’impact qu’elle a, malgré tout en tirant la société vers le bas, en menaçant son bien-être et son équilibre général.

Sans doute, faut-il mettre en place la Couverture maladie universelle, et la couverture-logement universelle. Sans doute faut-il lutter en priorité contre le chômage. Sans doute, faut-il faciliter les mesures de réinsertion, de formation sur toute la vie.

La partie volontariste de la politique, c’est de donner la main à ces exclus. Cette politique qui en résulte peut même prendre des formes « communicantes » spectaculaires : « zéro SDF. »

Alors que sont les larges couches moyennes de DSK ?

Simple comme bonjour : il y a 88 % de la population active qui est salariée. L’éventail des salaires est entre 1 et 3 pour l’essentiel, 9 contrats sur 10 sont à durée indéterminée, mais pour DSK, c’est là ce qui constituerait… la « grande couche moyenne centrale ».

Car selon DSK, ce salariat bénéficie des bienfaits du système (capitaliste) et ce qu’il veut, ce à quoi il aspire, c’est à en bénéficier mieux, davantage.

Le salariat est intégré, il n’est pas opposé au système, il s’y fond, il n’y est pas hostile, au contraire il le veut plus rentable, plus efficace… Voilà le nouveau boulot des socialistes en dehors de l’aide aux exclus.

L’horizon du système capitaliste est indépassable. Ce que doivent faire les socialistes, c’est donc faire mieux marcher l’industrie, le commerce, les échanges, l’innovation, la production, c’est rendre le capitalisme meilleur, afin de satisfaire les souhaits fondamentaux de cette grande couche sociale moyenne qui ne demande que cela.

C’est vrai que le salariat est le grand corps social dominant :

Évidemment, le changement social fondamental de toutes ces dernières décennies, c’est le développement de la puissance économique et sociale du salariat !

Au début du 20° siècle, nous avions 3 millions de salariés, en 1945, il y avait 50 % de la population active qui était salariée, et aujourd’hui il ne reste plus, parmi les actifs, que 12 % de non salariés. Le contrat de travail est devenu la norme sociale dominante. Nous sommes un pays de salariés : il y en a 15 515 703 dans le privé et 5 500 000 dans le public et para public. Les socialistes devraient effectivement être le parti des salariés : PS, parti socialiste, PS, parti des salariés.

Rien à voir avec la France paysanne de la 3° République, encore moins avec celle de la Commune.

Rien à voir non plus avec la révolution russe, bannissez toutes les confusions de vos têtes !

Ce ne sont plus les paysans, les libéraux, qui sont majoritaires mais ceux qui sont liés par un contrat de travail et qui n’ont que leur force de travail à vendre !

Ce ne sont pas, non plus, les « télétravailleurs » libéraux, free-lance, les atypiques, flexibles, ou « indépendants » rêvés par certains…

Le salariat ce n’est ni les exclus, ni les free-lance, ni les précaires, ou « sans statuts », les « mobiles », au contraire, il y a un droit du travail, il y a encore 8,5 CDI sur 10, la durée des CDI (nous avons bien dit CDI, contrat à durée indéterminée) s’allonge, elle est passée de 10,5 ans à 11, 4 ans ! Même si la précarité augmente et menace, elle est, fort heureusement encore minoritaire.

Mais ce corps social dominant est en confrontation avec le système :

Mais le salariat n’est pas intégré au système capitaliste contrairement à ce que dit DSK, il n’est pas une « grande couche moyenne », il est LA couche spoliée, subordonnée, surexploitée du système.

Les inégalités se creusent et c’est la faute au système qui ne peut les résoudre. En vérité, il n’y a pas de « couche moyenne », il y a ceux qui possèdent et contrôlent les moyens de production, les 5 % de la population, les employeurs, actionnaires, rentiers, libéraux qui possèdent 50 % du patrimoine du pays. Si l’on veut simplifier : il y a 15 à 20 % d’exclus, 75 à 80 % de salariés, et 5 % de possédants.

Ceux qui produisent toute la richesse de ce pays, ce sont les 75 à 80 % de salariés, et pourtant ils n’en reçoivent qu’une part minoritaire, trop limitée, ils sont menacés de chômage en permanence, ils sont stressés, soumis à des cadences de plus en plus fortes. On leur fait du chantage à l’exclusion. Il n’y a plus de « coupure » entre « cols blancs » et « cols bleus », entre industrie et services, les cadres sont « prolétarisés », les « employés » aussi, autant sinon davantage que les « ouvriers », quelles soit leur qualification. Tous sont diversement exploités et concourent à l’extraction de la plus-value. Pour des salaires qui baissent alors que le capital ne cesse de spéculer, de fructifier sauvagement, éhontément.

Un salarié sur deux gagne moins de 8 600 F. 14 millions de salariés gagnent moins de 10 000 F. 17 % des salariés sont des « travailleurs pauvres ». 9 % sont des précaires. Même les cadres ont vu leurs salaires baisser et 98 % des salaires sont inférieurs à 21 000 F. D’où le fait que le salariat est adversaire objectivement du système qui l’exploite.

Alors n’écoutez pas DSK, ni « le socialisme des pauvres », ni celui des « couches moyennes » par contre parlons du salariat, massif, nombreux, adressons nous à lui comme il l’attend de nous :

Le « montage », qui tient lieu d’analyse sociologico-politique de DSK ne tient pas : il reviendrait à marginaliser l’idéal socialiste, à le réduire à une charité d’une part, à une recherche de rentabilité rationalisée d’autre part, et il prétend qu’il n’y a plus de force sociale pour imposer un vrai changement.

Faux ! Nous sommes en France le pays de deux grèves générales en 30 ans, celle de 68 et celle de novembre décembre 95. Deux gréves où le salariat a montré sa puissance. Les 400 000 de Barcelone et les 3000 000 de Rome montrent aussi que le salariat européen est fort et sait, saura se faire entendre. Ces grands mouvements de grève et de mobilisation sont des prémices, comme Seattle, ou Porto Alegre. Il y a majoritairement dans le grand salariat, des exigences croissantes d’une rupture avec le systéme libéral, le salariat des pays riches est le mieux, placé, le plus nombreux, le plus conscient, le plus cultivé, le plus capable techniquement, économiquement, démocratiquement pour le faire savoir.

Pour reconstruire la gauche, il faut gagner les voix du salariat, en le comprenant, en le rassemblant, en le mobilisant. Ce qui compte, ce sont les salaires, les retraites, la santé, l’éducation, le droit du travail… Des mesures phares pour le salariat. Il faut redistribuer les richesses, ne pas laisser aux actionnaires, aux 5 % de rentiers-actionnaires-spéculateurs, le pouvoir. Il faut s’opposer au Medef, pas le prendre dans le sens du poil en feignant de croire que ce sont de bons amis, mais mal informés, et qu’on va faire mieux qu’eux. Il faut tenir le langage de la transformation sociale.

Gérard Filoche (écrit et publié en 2002)

lire aussi dans « Salariés si vous saviez… » Ed. La Découverte »

12 Commentaires

  1. Posted 21 février 2011 at 20:44 | Permalien

    Serge Gainsbourg révisait ses classiques, mais par rapport à ce que d’autres faisaient à son époque, il a fait avancer les choses.

    Nous parlons bien de Serge Gainsbourg, n’est-ce-pas ?

  2. luc
    Posted 21 février 2011 at 20:59 | Permalien

    Les entreprises versent 10 fois plus à leurs salariés et à l’Etat qu’aux actionnaires.

    Effectivement, chaque année, les entreprises versent 80 milliards d’euros aux actionnaires.

    Mais elles versent aussi 500 milliards d’euros à leurs salariés.
    Elles versent 260 milliards d’euros à l’Etat via les impôts.
    Enfin, elles vont réinvestir 190 milliards d’euros.

    Soit 760 milliards d’euros pour les salariés et l’Etat contre 80 milliards d’euros pour les actionnaires.

    Voir Rémy Prud’homme, professeur d’économie à PARIS XII
    Partage de la richesse produite : de quoi parle-t-on ?
    http://www.debateco.fr/content/partage-de-la-richesse-produite-de-quoi-parle-t

  3. Posted 21 février 2011 at 21:10 | Permalien

    Mais, Luc, mon petit écolier, c’est quoi cette référence ?

    Je vous sens peureux.

  4. Gérard Filoche
    Posted 21 février 2011 at 22:23 | Permalien

    pauvre Luc avec tes chiffres truqués tirés de manuels d’anti économie néolibérale

  5. LeJeune
    Posted 21 février 2011 at 23:05 | Permalien

    Plus besoin de fluidifier les relations sociales méthode uinm_medef.
    Que le salariat, les salariés prennent conscience que sans eux rien n’est possible quelque soit le système. Par contre un système renonçant à l’ultralibéralisme peut se passer des « 5 % de rentiers-actionnaires-spéculateurs » et même bouter ces nuisibles hors du Pays. Luc is not lucky

  6. selene
    Posted 22 février 2011 at 2:31 | Permalien

    Mais quelle est cette haine qui déforme, transforme et cherche à asservir l’opinion de ceux qui vous écoutent? Le jour où la parole sera libérée , réellement libérée, où la réalité aura contredit vos pseudos analyses/déductions improbables, qu’allez vous bien pouvoir inventer?

  7. LeJeune
    Posted 22 février 2011 at 8:32 | Permalien

    @Selene
    pas de haine, pas de manipulation de l’opinion, juste l’envie d’agir et de changer la situation : « Ce qui compte, ce sont les salaires, les retraites, la santé, l’éducation, le droit du travail… Des mesures phares pour le salariat. Il faut redistribuer les richesses… »
    Libérer la parole ? effectivement ce n’est pas le cas actuellement dans nos médias,
    (TF1, Europe1…)LeJeune

  8. Posted 22 février 2011 at 9:56 | Permalien

    @ Selene
    Luc est un junkie.
    verstanden ?

  9. luc
    Posted 22 février 2011 at 21:20 | Permalien

    Jean-François Couvrat, journaliste au magazine de gauche Alternatives Economiques, confirme mes chiffres.

    En 2006

    - la rémunération des salariés (salaires et charges sociales) 595,4 milliards d’euros

    - les impôts à la production (taxe professionnelle, impôts fonciers), moins les subventions 32,4 milliards

    - les impôts sur les bénéfices des sociétés 42 milliards d’euros

    - 15 milliards ont été versés aux salariés sous forme de participation

    - 132 milliards ont participé au financement des investissements

    - 71 milliards ont été distribués aux actionnaires

    http://dechiffrages.blog.lemonde.fr/2009/02/17/partage-des-profits-confusion-des-esprits/

  10. Posted 22 février 2011 at 23:27 | Permalien

    http://www.youtube.com/watch?v=E9SSL6IydpM

  11. Posted 26 février 2011 at 21:27 | Permalien

    Luc n’a pas compris que , dans la redistribution des richesses , la part des salaires diminuant de plus en plus , nous allons direct au cauchemar.
    http://www.larevueparlementaire.fr/pages/RP887/RP887-debats-charles-albert-michalet.htm

  12. christian
    Posted 18 mars 2011 at 15:18 | Permalien

    Oui, Luc n’as pas compris la source à laquelle il se réfère, et qui conclut effectivement que l’augmentation du revenu du capital croit bien plus vite que l’augmentation du revenu du travail. Autrement dit, les gains de productivité profitent avant tout au capital. Et malgré ça, les libéraux prétendent que comme on vit longtemps, on doit travailler plus longtemps, sans tenir compte des gains de productivité qui, équitablement partagés, devraient servir à financer cet allongement de la vie.
    Et ce que la source ne prend pas en compte,c’est que souvent le travailleur paie de sa personne: problèmes de santé, vie raccourcie, accident du travail. Le capital, n’étant pas humain, ne connait pas ce risque.

One Trackback

  1. [...] This post was mentioned on Twitter by vindictes, Gerard Filoche. Gerard Filoche said: DSK et les couches moyennes « La flamme et la cendre » http://t.co/wPhJDWc via @AddThis [...]

Déposer un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera jamais transmise.

*