Un appel de citoyens grecs à l’initiative de Mikis Théodorakis

AUX CITOYENS INDIGNES DE GRECE ET D’EUROPE

« Nous saluons les dizaines de milliers, voire les centaines de milliers de nos concitoyens, jeunes pour la plupart, qui se sont rassemblés sur les places de toutes les grandes villes pour manifester leur indignation à l’occasion de la commémoration du mémorandum (accord cadre signe entre le gouvernement grec, l’UE, le FMI et la BCE, en Mai 2010 et renouvelé depuis régulièrement),  demandant le départ du gouvernement de la Honte et de tout le personnel politique qui a géré le bien public, détruisant, pillant et asservissant la Grèce. La place de tous ces individus n’est pas au Parlement, mais en prison.
Nous saluons les premières Assemblées générales qui se déroulent dans les centres de nos villes et la démocratie immédiate que s’efforce de découvrir le mouvement inédit de notre jeunesse. Nous saluons les travailleurs de la fonction publique qui ont entrepris manifestations, grèves et occupations pour défendre un Etat qui, plutôt que le démantèlement prévu par le FMI, a désespérément besoin d’une amélioration et d’une réforme radicales. Par leurs mobilisations, les travailleurs de l’Hellenic Postbank, de la Régie nationale d’électricité et de la Société publique de loterie et de paris sportifs défendent le patrimoine du peuple grec qu’entendent piller les banques étrangères, par le truchement de leur gouvernement fantoche à Athènes.
Le pacifisme exemplaire de ces manifestations a démontré que lorsque la police et les agents provocateurs ne reçoivent pas l’ordre d’intervenir, le sang ne coule pas. Nous appelons les policiers grecs à ne pas être les instruments des forces obscures qui tenteront certainement, à un moment donné, de réprimer dans le sang les jeunes et les travailleurs. Leur place, leur devoir et leur intérêt est d’être aux côtés du peuple grec, des protestations et des revendications pacifiques de celui-ci, aux côtés de la Grèce et non des forces obscures qui dictent leur politique au gouvernement actuel.
Un an après le vote du mémorandum, tout semble attester son échec. Après cette expérience, on ne peut plus s’autoriser la moindre illusion. La voie qu’a emprunté et continue de suivre le gouvernement, sous la tutelle des banques et des instances étrangères, de Goldman Sachs et de ses employés européens, mènent la Grèce à la catastrophe. Il est impératif que cela cesse immédiatement, il est impératif qu’ils partent immédiatement. Jour après jour, leurs pratiques révèlent leur dangerosité pour le pays. Il est étonnant que le procureur général ne soit pas encore intervenu contre le Ministre de l’Economie et des Finances, après les récentes déclarations tenues par ce dernier sur l’imminence de la faillite et l’absence de ressources budgétaires. Pourquoi n’est-il pas intervenu suite aux déclarations du président de la Fédération des patrons de l’industrie et de la commissaire européenne grecque Mari Damanaki sur une sortie de l’euro ? Pourquoi n’est-il pas intervenu contre le terrorisme de masse avec lequel un gouvernement en faillite, sous le diktat de la Troïka [UE - FMI - BCE], tente une nouvelle de fois d’extorquer le peuple grec ? Par leur catastrophisme, leurs allusions tragiques et tout ce qu’ils inventent et déblatèrent pour effrayer les Grecs, ils ont réussi à humilier le pays dans le monde entier et à le mener réellement au bord de la faillite. Si un chef d’entreprise s’exprimait de la même façon que le fait le Premier ministre et ses ministres lorsqu’ils parlent de la Grèce, il se retrouverait immédiatement derrière les barreaux pour malversation grave.
Nous nous adressons aussi aux peuples européens. Notre combat n’est pas seulement celui de la Grèce, il aspire à une Europe libre, indépendante et démocratique. Ne croyez pas vos gouvernements lorsqu’ils prétendent que votre argent sert à aider la Grèce. Ne croyez-pas les mensonges grossiers et absurdes de journaux compromis qui veulent vous convaincre que le problème est dû soi-disant à la paresse des Grecs alors que, d’après les données de l’Institut statistique européen, ceux-ci travaillent plus que tous les autres Européens !
Les travailleurs ne sont pas responsables de la crise ; le capitalisme financier et les politiciens à sa botte sont ceux qui l’ont provoquée et qui l’exploitent. Leurs programmes de « sauvetage de la Grèce » aident seulement les banques étrangères, celles précisément qui, par l’intermédiaire des politiciens et des gouvernements à leur solde, ont imposé le modèle politique qui a mené à la crise actuelle.
Il n’y a pas d’autre solution qu’une restructuration radicale de la dette, en Grèce, mais aussi dans toute l’Europe. Il est impensable que les banques et les détenteurs de capitaux responsables de la crise actuelle ne déboursent pas un centime pour réparer les dommages qu’ils ont causés. Il ne faut pas que les banquiers constituent la seule profession sécurisée de la planète !
Il n’y pas d’autre solution que de remplacer l’actuel modèle économique européen, conçu pour générer des dettes, et revenir à une politique de stimulation de la demande et du développement, à un protectionnisme doté d’un contrôle drastique de la Finance. Si les Etats ne s’imposent pas sur les marchés, ces derniers les engloutiront, en même temps que la démocratie et tous les acquis de la civilisation européenne. La démocratie est née à Athènes quand Solon a annulé les dettes des pauvres envers les riches.Il ne faut pas autoriser aujourd’hui les banques à détruire la démocratie européenne, à extorquer les sommes gigantesques qu’elles ont elle-même générées sous forme de dettes. Comment peut-on proposer un ancien collaborateur de la Goldman Sachs pour diriger la Banque centrale européenne ? De quelle sorte de gouvernements, de quelle sorte de politiciens disposons-nous en Europe ?
Nous ne vous demandons pas de soutenir notre combat par solidarité, ni parce que notre territoire a été le berceau de Platon et Aristote, Périclès et Protagoras, des concepts de démocratie, de liberté et d’Europe. Nous ne vous demandons pas un traitement de faveur parce que nous avons subi, en tant que pays, l’une des pires catastrophes européennes aux années 1940 et nous avons lutté de façon exemplaire pour que le fascisme ne s’installe pas sur le continent.
Nous vous demandons de le faire dans votre propre intérêt. Si vous autorisez aujourd’hui le sacrifice des sociétés grecque, irlandaise, portugaise et espagnole sur l’autel de la dette et des banques, ce sera bientôt votre tour. Vous ne prospérerez pas au milieu des ruines des sociétés européennes. Nous avons tardé de notre côté, mais nous nous sommes réveillés. Bâtissons ensemble une Europe nouvelle ; une Europe démocratique, prospère, pacifique, digne de son histoire, de ses luttes et de son esprit. Résistez au totalitarisme des marchés qui menace de démanteler l’Europe en la transformant en tiers-monde, qui monte les peuples européens les uns contre les autres, qui détruit notre continent en suscitant le retour du fascisme. »

Le Comite Consultative du Mouvement de Citoyens Indépendants. « L’ Etincel » (*)

Athenes, 26 Mai 2011
(*) Créé à l’initiative de Mikis Theodorakis

6 Commentaires

  1. Posted 12 juin 2011 at 12:12 | Permalien

    excellent communiqué !!!
    Peuple d’Europe révoltez vous: révolutions citoyennes à venir !!
    Les peuples se révoltent dans tous les pays du monde…Europe,Asie …
    Nous sommes au bout d’un système qu’ils essayent désespérement de maintenir à flot sans succés !! le rebond de la crise repointe son nez sur le deuxième semestre 2011 !!

  2. AliBurton
    Posted 15 juin 2011 at 9:36 | Permalien

    Et Zorba il fait quoi pendant ce temps ? il veut récupérer les économies durement gagnées pendant sa vie, et prêtées inconsidérément à ses compatriotes dispendieux …

  3. Posted 15 juin 2011 at 11:57 | Permalien

    Zorba
    de Katzantzakis ? il etait de gauche et se serait battu contre cette sale opération de la troika UE/BCE/FMI

    il n’aurait pas osé plaisanter comme aliburton,

    car si on te retirait 10 à 20 % de ton salaire, 20 à 50 % de ta retraite, si tu devais payer 120 euros une visite sur le médecin, et s’il fallait tout vendre la SNCF et le Louvre, tu en ferais une tête…

    ce que je ne comprends pas c’est tous els ignares, fracistes ethniques, anti grecs, qui jouent à dire que les grecs roulent en grosses bagnoles et ne travaillent pas, faut il que la connerie soit répandue par TF1 !

  4. Posted 16 juin 2011 at 13:29 | Permalien

    Comme je l’ai dit sur le blog de Raoul Marc Jennar sous le titre « Crise économique : une contre-révolution silencieuse à l’œuvre en Europe », on peut très bien garder l’euro pour l’import-export et créer sa propre monnaie non échangeable en devises pour l’économie du pays. C’est un question de volonté politique et les Grecs qui ont la plus longue tradition en la matière peuvent montrer l’exemple.
    Dans la théorie de l’Economie Distributive de Jacques Duboin, il n’existe plus de taxes, d’impôts, et non plus de travail au noir. Toute activté est prise en compte à la source et symbolisée par une monnaie dont la durée de vie est celle d’un budget. Une monnaie de consommation disparaissant lors de l’échange, et donc ne pouvant générer de dette, voilà la solution. Quant à la retraite à perpétuité, parlons plutôt du Revenu Garanti Universel, que toucherait tout citoyen de la naissance à la mort. Gageons que sur le thème du Contrat Civique, troisième pilier de l’Economie Distributive, les grecs n’auront pas trop de mal, vu que participer à la vie de leur société a toujours été leur motivation.
    Grecs, donnez l’exemple d’une nouvelle société, vous en avez le pouvoir, et la troika UE/BCE/FMI vous a donné les bâtons pour la battre.

  5. Gérard Filoche
    Posted 16 juin 2011 at 19:59 | Permalien

    Deux semaines après Moody’s, l’agence de notation américaine Standard & Poor’s a dégradé de trois crans la note de la Grèce. Le président de la banque centrale européenne, Jean-Claude Trichet, calme le jeu.

    Alors que les dirigeants européens tentent de rassurer les marchés financiers en écartant tout idée de restructuration ou de défaut, les agences de notation n’en finissent plus d’enfoncer la Grèce. Après Moody’s le jeudi de l’Ascension, Standard & Poor’s a dégradé de trois crans la note de la Grèce en ce lundi de Pentecôte. Et ce un mois après l’avoir déjà abaissé de deux. Encore deux crans et le pays serait en défaut. «La dégradation reflète notre opinion qu’il y a un risque encore plus élevé d’un ou de plusieurs défauts », souligne l’agence dans un communiqué, alors que le débat fait rage sur la possibilité de restructurer la dette publique de la Grèce.

    S&P juge que, dans le cadre d’une restructuration de la dette grecque, le secteur privé (banques, fonds d’investissement, assureurs), mis à contribution, se retrouverait face soit à un «échange de titres» soit à un «allongement des maturités». De telles opérations seraient considérées «comme un défaut» par l’agence de notation, et dans ce cas, elle pourrait attribuer à la Grèce une note encore plus basse, la reléguant dans une situation de défaut partiel.
    Les marchés restent insensibles

    Standard and Poor’s souligne en revanche qu’elle pourrait stabiliser la note du pays à «CCC», si la zone euro trouvait une solution qui ne corresponde pas à un défaut selon ses critères, même en prenant en compte un risque de restructuration de la dette «sous forme d’une décote » d’ici 2013. L’agence de notation américaine ajoute que la Grèce ne pourra pas aller sur les marchés financiers en 2012 et «probablement après», comme il était convenu dans le cadre du plan d’urgence de soutien de l’UE et du FMI pour le pays.

    Cette nouvelle dégradation n’a pas provoqué de fortes baisses des marchés d’actions américaines : lundi soir, le Dow Jones a clôturé sur une note stable à 11.952,97 points, le S&P 500 a gagné 0,07% à 1271,83 points et le Nasdaq a perdu 2639,69 points. Les agences de notation n’ont pas encore gagné leur bras de fer. Ce mardi, le Cac 40 et le Dow Jones ont enregistré des nettes hausses à la clôture : +1,50% à 3864,58 points pour l’indice parisien et +1,03% à 12.075,70 points.

  6. La Pérouse
    Posted 17 juin 2011 at 10:00 | Permalien

    Cette question des finances publiques grecques n’est pas aussi facile à trancher : tout le monde semble l’avoir oublié mais, quant à moi, je garde en travers de la gorge l’escroquerie dont se sont rendus coupables les responsables grecs de l’époque, lorsque, pour entrer dans la zone euro, ils ont sciemment trafiqué leurs comptes publics, pour les rendre « présentables » et paraître satisfaire aux critères de Maastricht. La suite a montré combien la Grèce en était loin. Il ne me semble pas que les Grecs se soient indignés de cette escroquerie de leur gouvernement, à l’époque !

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