Plein phare sur nos heures supp’ : payez les !

OBOULOT n° 15 dans L’HUMANITÉ DIMANCHE

Nous vivons dans un pays où il y a des zones aveugles de la statistique. Généralement les études n’existent pas là où ça gêne le pouvoir et le patronat. C’est le cas sur la question si sensible des heures supplémentaires. Prenez les instituts comme l’INSEE ou la DARES, il suffit de consulter leurs notices d’enquêtes pour constater qu’ils ne vérifienta rien « dans les entreprises de moins de 20 salariés »… Or c’est là qu’il y a 5 millions de salariés qui font le plus d’heures supplémentaires… Ils précisent aussi que leurs enquêtes sont « basées sur les déclarations des employeurs » : LOL, à mourir de rire, car 85 % du travail dissimulé provient des heures supplémentaires non déclarées.

Alors comment se faire une idée, même « à la louche, » de la réalité de ces fameuses heures supp’? Celles déclarées à l’URSSAF et financées depuis la fameuse loi « TEPA » (travail emploi pouvoir d’achat, première loi 2007 de Sarkozy), ont beaucoup varié : il y a d’abord eu un « pic d’aubaine » vers 750 000 heures recensées en 2007 et 2008 qui a coûté prés de 4 milliards de financement (consistant à verser des aides d’état pour faire travailler deux fois plus ceux qui avaient un boulot pendant que d’autres restaient de ce fait au chômage). Mais en fin 2008 et 2009, les patrons en sont revenus à l’ordinaire, il est plus de simple de ne pas déclarer du tout ces heures, plus rentable de ne pas les payer que d’attendre que l’URSSAF vous rembourse la majoration d’une partie de celles-ci. Il semblerait qu’il n’y ait plus que 2,2 milliards versés depuis 2009 pour tenter de « faire travailler plus », (environ 450 000 heures supp’ quand même). On n’a pas de bilan officiel.

Pourtant c’est facile à savoir quand on est inspecteur du travail sur le terrain : 9 plaintes sur 10 sont pour des heures supplémentaires impayées. Sur 1,2 millions des salariés du bâtiment plusieurs centaines de milliers sont obligés à des heures supp’ non payées. Pareil, évidemment pour les 850 000 salariés de la restauration, pour les 350 000 salariés du nettoyage. Il en est de même pour les 850 000 chauffeurs, pour les 800 000 saisonniers ou pour les 3 500 000 cadres. Une « légende » stupide prétend que « les cadres n’ont pas d’horaires », ce qui est faux et spoliateur : car les cadres ont, pour 99 % d’entre eux, un horaire de droit commun, jamais plus de 10 h par jour, jamais plus de 48 h par semaine, un « forfait » ne se présume pas, il doit être écrit, il ne peut servir à ne pas payer les heures supplémentaires majorées et surtout le nombre des heures concernées ne peut varier, il doit être constant. Cela n’est pas respecté.

La « tendance » patronale interprète le « travailler plus » en dissimulant ces heures supp’ et en niant ILLEGALEMENT les 35 h hebdomadaires. Sarkozy vient aussi de redire que tout ce qui va mal dans ce pays est dû aux 35 h. Fillon prétend qu’on ne peut les abolir tout de suite, les esprits ne sont pas mûrs, ce sera pour « la prochaine législature ». En attendant les 35 h, c’est toujours la loi de 2000 qui s’impose à 100 % des salariés, et tout heure effectuée au-dessus est majorée de 25 à 100 % selon les cas. Toute attaque contre les 35 h est donc une attaque contre le niveau des salaires. Et il y a très probablement, dans la vie réelle, un milliard d’heures supplémentaires dissimulées, l’équivalent de 600 000 emplois, de quoi réduire le chômage et contribuer à financer nos retraites à 60 ans à taux plein.

  • Gérard Filoche

4 Commentaires

  1. Zigtoun
    Posted 22 juin 2011 at 9:54 | Permalien

    Lire aussi : « 2 milliards d’heures supplémentaires non déclarées »

    http://www.lesmotsontunsens.com/l-insee-reinvente-le-fil-a-compter-les-heures-supplementaires-2-deux-milliards-heures-supplementaires-non-declarees

  2. tal
    Posted 22 juin 2011 at 10:40 | Permalien

    Y a pas qu’en Grèce que ça fraude :

    « 20 milliards par an », que fait l’URSSAF ?

    http://www.arretsurimages.net/vite.php?id=11491

  3. Pascale
    Posted 22 juin 2011 at 11:34 | Permalien

    @TAL
    Je cite Daniel Schneidermann à ce sujet:  » (…) A vrai dire, il y aurait bien un moyen de lutter contre le travail au noir: multiplier les contrôles URSSAF. En une ligne, le rapport mentionne fort honnêtement le nombre insuffisant de contrôleurs URSSAF(220 contrôleurs et 1500 inspecteurs pour 7 millions de comptes cotisants). Je suis prêt à parier que ce n’est pas la mesure qui sera adoptée en priorité.(…) »

    PS: le rapport cité est le rapport parlementaire français sur les fraudes sociales que vient de se procurer l’AFP.

  4. Dupont
    Posted 23 juin 2011 at 13:57 | Permalien

    Au fait Gérard pas très claire ta bio, tu es toujours inspecteur politique heu pardon inspecteur du travail ou tu es retraité ???

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