La « soumission librement consentie »

Au boulot n° 34

Ce qui caractérise un contrat de travail c’est un « lien de subordination juridique permanente ». Il n’y a pas de démocratie, pas de citoyenneté dans l’entreprise, vous êtes SU-BOR-DON-NES ! Mieux vaut le savoir : car il existe des contreparties à cette subordination et vous pouvez vous en réclamer. Le Code du travail tout entier n’est qu’une contrepartie. Vous perdez des droits en travaillant pour un patron, mais vous en recevez en échange…

Depuis 8 ans, le Medef passe ces droits à l’acide, aidé puissamment par Sarkozy, Fillon, à ses ordres. Laurence Parisot estime que « La liberté de penser s’arrête là où commence le Code du travail ». Elle ne veut plus d’état de droit dans l’entreprise, plus de convention « collective » : le contrat individualisé de gré à gré doit prévaloir. Elle modifie le vocabulaire, peu à peu, pour y arriver : par exemple elle a réussi à remplacer partiellement le « droit du licenciement » par la notion de « séparabilité » (c’est « comme un divorce », la « rupture conventionnelle » individuelle sans motif).

Mais il y a un « hic » : tout ça passe mal en face de la notion de « subordination ». Car si vous êtes subordonnés, vous semblez logiquement avoir besoin d’une protection en échange. Ça fait des années que le Medef a du mal à se dépêtrer de cette contradiction-là. Vous acceptez l’autorité de l’employeur, vous êtes donc sous ses ordres, le Medef ne peut pas le changer, bien sûr, il ne peut pas être pour l’autogestion… Mais comment enlever les contreparties qui sont données pour l’acceptation forcée de la subordination ?

Comment faire sauter le principe essentiel qui fonde le Code ?

Alors le Medef cherche à introduire en France, un concept « nouveau » : « Compliance without pressure » (pas nouveau en fait, il fut introduit par Freedman et Fraser… en 1966) est un procédé de persuasion qui conduit à donner l’impression aux individus concernés qu’ils sont les auteurs de décisions prises pour eux.

C’est la « soumission librement consentie » : c’est de vous-mêmes si vous vous placez sous l’autorité d’un patron, donc vous n’avez rien à demander en échange, vous renoncez de vous-mêmes à vos droits.

Ce sera l’objet du déjeuner du Medef, le 29 mars 2011, organisé par son Cercle EBP « Échanges de Bonnes Pratiques » 12 h 30 à 15 h 00 Hôtel Baltimore, salon privé, 88 avenue Kléber, Paris 16e : « Comment amener les gens à faire librement ce qu’ils doivent faire ? » par R-V Joulé, professeur des Universités, directeur du Laboratoire de Psychologie Sociale de l’Université de Provence, auteur de « La soumission librement consentie » (PUF 1998) et du « Petit traité de manipulation à l’usage des honnêtes gens » (PUG 2002) 300 000 exemplaires prétendument vendus en France (sic), traduit en 12 langues, « prix » de la diffusion « scientifique » au Festival des Sciences et des Technologies en 2002.

On sent que, de vous-mêmes, vous avez envie d’y aller déjeuner, n’est-ce pas ?

Gérard Filoche

One Commentaire

  1. Pascale
    Posted 25 octobre 2011 at 5:41 | Permalien

    Nous découvrons depuis quelques mois les conditions de travail dans une collectivité territoriale (Mairie… de gauche…).
    Les chefs de service ne connaissent pas les TMS, la vétusté du matériel de la cuisine centrale induit pourtant des mauvaises postures, le port de charges très lourdes etc.
    Par ailleurs, à l’approche des évaluations annuelles, la carrière des agents est bloquée, volontairement de la part de la collectivité. Lorsqu’ils passent des concours de la fonction publique, par leurs propres moyens, le statut (en l’occurrence, agent de maîtrise) leur est refusé… Il en est de même de l’avancement en fonction de l’ancienneté.
    Plusieurs agents ont saisi le Tribunal Administratif, pour faire valoir leurs droits…
    Je ne peux pas tout raconter mais je vous assure que c’est absolument révoltant!

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