Hommage aux victimes du travail

Au boulot n°36

Il ne s’agit pas de remplacer la nécessaire prévention ni la nécessaire réparation des 750 accidents mortels du travail qui se produisent en France chaque année. Il faudrait d’abord que les employeurs condamnés pour « faute inexcusable » soient plus durement sanctionnés. Et que les familles des victimes soient infiniment mieux indemnisées. Car la justice en ces cas-là est laxiste et la mort d’un salarié donne lieu à moins de réparation à sa famille qu’un accident de la route. Évidemment, il faut d’abord donner plus de pouvoir et de moyens aux CHSCT, à la médecine du travail, à l’inspection du travail…

Ce n’est pas une plaque commémorative qui remplacera ces efforts-là.

Mais quand même… combien de grands travaux, combien de constructions humaines, belles et célèbres, ont eu leur lot de victimes parmi leurs ouvriers bâtisseurs ? Et quand on visite l’œuvre, on ignore qui a perdu la vie pour qu’elle existe : oublié le travailleur qui a chuté, s’est fait écraser, a été enfoui dans le chantier !

Il est haïssable que jamais les plus hauts personnages de l’état, capables de faire vibrer les médias au moindre crime crapuleux ou lors de l’assassinat d’un policier, ne réagissent jamais à des accidents du travail mortels.
Dans le monde, selon l’OIT, avec 2,2 millions de morts par an, le travail tue plus que les guerres et plus que les accidents de la route.

Au moins, en France, une mesure symbolique, en plus d’une meilleure prévention, de plus forts contrôles, sanctions et réparations, serait d’imposer la commémoration des victimes, en faisant que dans tous les lieux où ont été tués des salariés au travail, il y ait, comme pour les victimes des guerres, des plaques, sur place, honorant leur mémoire.
Un collègue de l’inspection du travail vient juste de m’écrire en m’envoyant une photo : « En juillet 2009, il y a eu un accident mortel sur un chantier dont je suis Inspecteur. Il m’a fallu un an, mais j’ai imposé que l’on honore ce salarié ». Ce n’est pas simplement émouvant, c’est un exemple.

Gérard Filoche

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