300 000 emplois dans l’hôtellerie restauration ? suffit il de traverser la rue ?

 

Ils ont un culot à toute épreuve, les patrons de l’Umih (Union des métiers et des industries de l’hôtellerie) : principal syndicat patronal du secteur (un million de salariés), au cours de leurs « Assises de la restauration commerciale » ils ont affirmé qu’ils « recruteraient volontiers près de 300 000 salariés » mais qu’hélas, il y avait pénurie de main d’œuvre ! En gros 300 000 fainéants actuellement parmi les chômeurs, refuseraient de « traverser la rue » pour venir travailler dans leurs cuisines, cafés, restaurants et hôtels.

Mais quel boulot ?

C’est la branche où les salaires sont les plus bas,

les horaires sont les plus longs,

les heures supplémentaires les moins payées,

les conditions de travail les plus épuisantes,

les maladies professionnelles les plus nombreuses,

la précarité la plus développée,

le travail illégal le plus poussé,

les immigrés les plus maltraités

les pourboires (loi Godart) détournés,

la violence au travail la plus fréquente (hiérarchie brutale, des apprentis sont battus),

le turn over le plus systématique,

la convention collective la moins intéressante,

la représentation syndicale et celle des salariés la plus faible !

Et tout ça n’est pas dû à la mondialisation ni « à l’Europe », il n’existe pas de concurrence internationale !

Ce n’est pas dû aux impôt ni aux taxes : le patronat de la restauration a bénéficié d’une baisse de la TVA à 5,5 % pendant plus de 5 ans et il n’en a rien fait : il n’a ni modernisé, ni baissé les prix, ni haussé les salaires. Ils se sont mis cette niche fiscale dans la poche et ils ont continué à frauder : 25 % des emplois ne sont pas déclarés, la quasi totalité des heures supplémentaires ne sont jamais recensées ni payées. Il y en a qui utilisent des auto-entrepreneurs pour faire des sandwiches et d’autres qui abusent des immigrés, à la plonge ou aux fourneaux. Et on ne parle pas là des « petits restos », les grandes « chaines » (250 000 salariés) sont les pires.

Et ils voudraient encore un CDI plus flexible ?

Question de mentalité : André Daguin, grand patron de la restauration conseillait ses collègues vis à vis des personnels : “Vous devez être ceux qui menacent, pas ceux qui sont menacés. Vos dents doivent rayer le parquet. L’indulgence est comme la pitié, elle vous déshonore et elle déshonore aussi ceux qui en bénéficient. La société a besoin de durs, pas de mous. L’ennui, c’est qu’il y en a beaucoup, des mous, beaucoup trop. Il faut arrêter de reculer le moment de l’effort. Ne soyez pas indulgents avec vos salariés. Il y a tout plein de bac + 12 qui sont infoutus de travailler, ils ne sont même pas capables de trouver un balai pour faire le ménage. Quand on doit licencier quelqu’un, il ne faut pas cacher la vérité. Vous savez, c’est aussi difficile pour celui qui coupe que pour celui qui est coupé. Moi, je préfère les assassins aux escrocs : les escrocs, les gens les trouvent sympas. Les assassins, non, évidemment ; mais pourtant, ils ont un grand mérite, c’est de ne pas être hypocrites ».

 

Changer de mentalité patronale, changer de pratique, supprimer les contrats courts, hausser les salaires, respecter les horaires, prendre des personnels bien formés, bien payés, bien traités, et c’est vrai, on aura 300 000 emplois de plus, et un bien meilleur service aux clients lié à une qualité de vie des personnels.

Gérard Filoche (lisez chaque semaine l’Humanité dimanche, chronique « au boulot » n°440)

Déposer un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera jamais transmise.

*