Chronique Humanite dimanche Au boulot n° 457 Traite d’humains au travail en UE

 

En Union européenne, il y a 240 millions de travailleurs. 1,7 million d’européens traversent quotidiennement une frontière. 17 millions travaillent dans un autre état membre soit 2 fois plus qu’il y a 10 ans.

 

Parmi eux, il existe 2,3 millions de « travailleurs détachés » dont 516 000 en France (hors transport), durée moyenne du détachement, 44 jours, ils sont mal logés, mal traités, mal payés et surtout discriminés. La France est le 2° pays d’accueil parce que les patrons français se précipitent dessus : pour eux c’est une aubaine, vu qu’ils coutent moins cher que les salariés français (et les immigrés ordinaires) car leurs cotisations sociales, leurs salaires bruts, sont payés au tarif du pays d’origine pendant 24 mois. Huit nationalités concentrent 70 % du flux de cette main-d’œuvre : portugais, polonais, allemands, roumains, français, belges, espagnols et italiens. Et aussi 20 000 ressortissants issus de pays d’Afrique détachés par des entreprises européennes (sic). Le « détachement » procède de montages complexes faisant intervenir plusieurs pays quasi impossible à contrôler.

 

La fraude patronale fait rage : omission de déclaration des formalités obligatoires, prêts illicites de main d’œuvre, marchandage, non respect du droit et conditions de travail indignes (agriculture, BTP, restauration, abattoirs, décès de salariés, maladies dues au manque d’hygiène, malnutrition, privation de liberté, il s’agit de traite d’humains au travail). L’inspection du travail, en France, sur 11 500 interventions, a dressé 1000 sanctions administratives en 2017, pour 5,9 millions d’euros, dont seulement la moitié a été recouvrée (les ¾ dans le BTP).

 

Croyez vous qu’ils vont enfin changer cette énorme discrimination et mettre en œuvre des contrôles réels et généralisés de l’inspection du travail ? (pourtant celle-ci existe dans les 27 pays de l’UE). Non ! la tendance partout en UE, est à la réduction des dépenses publiques (Muriel Pénicaud, diminue de 15 % les effectifs de l’inspection en France).

 

Alors ils font semblant : ils viennent de créer en juin 2019 une « Autorité européenne du travail » (AET) qui agira à partir d’octobre 2019 depuis Bratislava. Objectif : mieux encadrer la mobilité des travailleurs au sein de l’Union. Mais sans moyens : à terme, l’Autorité comptera environ 140 agents, avec un petit budget de 50 millions, parmi lesquels 60 experts nationaux détachés par leur État membre, joueront le rôle d’officiers de liaison pour l’ensemble des administrations nationales concernées et surtout, elle n’aura pas de pouvoir de sanction !

 

« Une coquille vide sans réel pouvoir » analyse Eric Bocquet.

 

A coup sûr la discrimination odieuse des travailleurs détachés continue.

 

Gérard Filoche

 

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