Non au travail payé à la tâche

Au boulot n° 514 à lire dans l’Humanité Dimanche

 

Le pire c’est qu’ils nous font revenir au travail payé à la tâche, à la mission, au chantier, au forfait. C’est la plus sûre façon de nous prendre notre temps, de ne plus payer nos heures, nos journées, nos semaines, nos mois. Ça sape les  fondements du salariat.

 

Ils le faisaient illégalement jusque-là, surtout pour ceux d’en bas. Ils ne comptaient plus en heures mais en nombre de blousons, de chaussures ou de sacs confectionnés, de mètres carrés de carreaux nettoyés ou de quartiers de ville par éboueurs, par prospectus distribué.

Sur leurs fiches de paye, ils indiquaient encore une référence horaire, parce que la loi l’oblige. Mais elle est fictive, calculée arbitrairement : l’employeur divise le volume de travail du mois par un taux horaire.

 

La pression de la recherche du profit maximal les poussent à abolir la référence au temps de travail et à rétablir sans le dire le salaire à la tâche, celui-là même que l’on croyait consigné au passé, voire réservé à quelques professions : les bûcherons payés à la taille, les désosseurs de viande payés à la découpe, les livreurs payés à la course, la dentellière au napperon.

 

Dans le nettoyage par exemple, le paiement « au lit », à la chambre ou au m2 s’est accru, dans l’entretien des bureaux ou des hôtels. «Aujourd’hui, vous avez 30 lits à faire.» Chaque matin, à 7 heures, les femmes de ménage sont au garde-à-vous devant leur téléphone. Le lendemain, la commande peut varier de 20 ou 30 unités, en fonction du taux de remplissage de l’hôtel.

 

Les heures supplémentaires ne sont pas payées. Le temps rémunéré se rétrécit pendant que le temps travaillé s’intensifie et s’allonge.Les salariés sont de moins en moins nombreux à choisir eux-mêmes la façon d’atteindre les objectifs fixés et à pouvoir faire varier les délais fixés.

 

Hé bien, maintenant c’est devenu le point commun à 12,5 millions de salariés qui se croyaient en haut de l’échelle, ils sont de retour en télétravail, sur leur ordinateur : « - Tiens t’as trente dossiers à traiter pour demain ».

 

Gérard Filoche

 

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