Mai 68, une histoire sans fin (tome 2 : les années PS des années Jospin au quinquennat maudit de Hollande-Valls)

historiographie de la Gauche Démocratique & Sociale

Dans un premier tome de « Mai 1968, une histoire sans fin », Gérard Filoche commence son auto-biographie. Mais très vite, les apparitions du personnage deviennent des tranches de vie qui révèlent les motivations d’une jeunesse qui découvre le monde et qui se politise autour des luttes anticolonialistes et anti-impérialistes. Une jeunesse qui découvre que les mobilisations de masse peuvent changer le monde. Rapidement, le personnage cède la place aux héros qui font l’histoire, surtout quand ils sont 9 millions, neuf millions de grévistes en Mai 1968. Commencer sa vie consciente en étant immergé dans un tel mouvement, c’est recevoir une poussée qui nous engagera pour la vie.


Plus de 50 ans plus tard, alors que les vieilles générations qui dirigent la gauche sont en train de s’effondrer, la jeunesse se mobilise pour sauver le climat : elle se montre disponible pour prendre le relai, comme elle l’était en Mai 68. C’est une histoire sans fin.

A partir de 1968, Gérard Filoche est l’un des principaux dirigeants de la JCR / LC / LCR, En 1972, la signature du Programme commun offre un débouché politique à la gauche. L’extrême gauche s’oppose à l’Union de la gauche et critique ce programme. Par conséquent, elle subit une crise permanente. Gérard Filoche conteste cette orientation gauchiste et rassemble, de congrès en congrès, un courant interne à la LCR en faveur de campagnes de masse et d’une tactique de front unique de la gauche. Ce courant devient permanent à partir de 1982. En décembre 1991, il édite le numéro zéro du mensuel public Démocratie & Socialisme : c’est une première rupture avec le centralisme dit « démocratique » qui est la règle de fonctionnement des organisations trotskistes.

En septembre 1994, le courant Démocratie & Socialisme adhère au Parti Socialiste et devient un club politique : c’est évidemment une nouvelle rupture avec le fonctionnement centraliste de la LCR. Mais on aurait tort de considérer que ce soit une scission opérée par le courant D&S aux dépens de la LCR : c’est une réunification partielle de la gauche. La séparation de la gauche en plusieurs organisations est une anomalie, c’est ce que reconnaît, en principe, la tradition socialiste : l’ancienneté que le PS reconnaît à ces nouveaux adhérents ne date pas de cette réunification, mais court depuis leur première adhésion à un parti de gauche, en l’occurence au moins à la LC / LCR.

La scission qu’il faut effacer, c’est celle du congrès de Tours, de décembre 1920. La réunification qu’il faut réaliser, c’est la constitution du parti unitaire de toute la gauche, selon le modèle du congrès du Globe en 1905, lorsque les 5 partis de la gauche sociale ont fusionné et se sont émancipés du Parti radical : Jaurès et Guesde contre Clémenceau.

Le PS / SFIO n’est pas le parti unitaire mais, à défaut, comme parti pluraliste, il en joue le rôle et rassemble donc la majorité de la gauche. Lors de son 3ème congrès, en 1921, l’Internationale Communiste se démarque de l’orientation gauchiste et sectaire de ses 4 premières années qui l’a isolée du reste de la gauche sociale et lui a fait perdre les positions majoritaires conquises au lendemain de la révolution soviétique de 1917.
Pour offrir aux luttes sociales le débouché politique d’un gouvernement de gauche, elle propose de constituer des « fronts uniques ». Mais il s’agit seulement d’une tactique qui ne remet pas en cause la division de la gauche sociale en autant de partis qu’il existe de programmes possibles. De 1929 à 1933, elle renouera avec l’orientation sectaire en abandonnant la tactique de FU, le temps que Hitler parvienne au pouvoir.

De 1929 à 1989, la tactique des partis communistes oscille entre isolement sectaire et font unique de la gauche. Celle des partis socialistes entre alliance avec la droite libérale et front unique de la gauche. En France, de 1983 à 1993, coïncident l’isolement sectaire du PCF (1977 – 1993) et le ralliement du PS au néolibéralisme (1983 – 1994).
Nous voulons en tirer les leçons. Celles de l’entre-deux-guerres, tirées par Trotski, sont une bonne base, elles permettent au moins de renouer avec la tactique de front unique.
Mais, dans la LCR, le courant « Filoche » dispose d’un atout supplémentaire : la compréhension que la démocratie permet de dépasser les limites du libéralisme (celles du contrat) et les limites du républicanisme (celles de la loi) : c’est le sens du titre de sa publication, Démocratie & Socialisme.

En effet, la démocratie, c’est-à-dire les rapports sociaux démocratiques, respecte les droits universels sur lesquels doit reposer une société socialiste.
Cette compréhension permet de dépasser la tactique ponctuelle de front unique et d’adopter une stratégie permanente d’unité et d’indépendance de la gauche qui débouche sur un parti unitaire de toute la gauche. Mais, ceci nous conduit à adhérer au PS, car à défaut d’être ce parti unitaire, il en remplit en partie la fonction en étant largement pluraliste.

Les années trotskistes (1964 – 1994) ont fait l’objet du tome 1 de cette histoire sans fin. Et 25 années PS (1994 – 2018) font l’objet de ce tome 2 qui est composé de 7 livres.

Le livre 1 s’ouvre avec l’ère d’Emmanuelli & Jospin (1994 – 2002) ; il aborde le mouvement de novembre-décembre 1995, la constitution de la 1ère Gauche Socialiste et la bataille des 35 heures.
Henri Emmanuelli, premier secrétaire national du PS, accueille une délégation du courant Démocratie & Socialisme, le 6 septembre1994 : « Bienvenue avec vos tout petits défauts et vos très grandes qualités ».

Le livre 2 (2002 – 2004) traite de l’explosion de la 1ère Gauche Socialiste et de la constitution de 3 courants internes : Nouveau parti socialiste, Nouveau monde er Force militante ; c’est aussi la première bataille des retraites.

Le livre 3 (2004 – 2005) l’ère du NON au Traité constitutionnel européen ; les 40 % obtenus par la 2ème Gauche Socialiste ; mais la synthèse Hollande-Peillon-Fabius-Emmanuelli-Mélenchon-Lienemann.

Le livre 4 (2005 – 2011) couvre les intermèdes Royal-Aubry ; il aborde le combat contre le CPE et la 2ème bataille des retraites ; c’est aussi la tragédie grecque.

Le livre 5 (2011 – 2014) ouvre l’ère Hollande, la victoire de 2012 et le quinquennat trahi ; les « frondeurs » du PS.

Le livre 6 (2014 – 2017) : l’ère de la 3ème Gauche Socialiste ; le combat contre le CICE et contre la loi El Khomri ; la déchéance de citoyenneté ; la volonté de détruire le PS.

Le livre 7 (2017 – …) la gauche socialiste est unie ; mais la gauche est divisée : Macron gagne et poursuit la destruction du PS.
D&S est devenu le mensuel de la Gauche Démocratique & Sociale qui poursuit la construction d’un parti unitaire et donc pluraliste.

Avec ce récit de 25 années d’engagement dans ce qui fut le parti majoritaire de la gauche en France, Gérard Filoche dévoile les dessous des congrès et des réunions du bureau national du PS. Il explique pourquoi des dirigeants qui ont imposé à leur parti une politique de droite pour qu’il soit un instrument qui, en évitant les confrontations avec la droite, facilite leur carrière, en viennent à vouloir le détruire parce que, en étant resté un parti de gauche en raison de l’identité politique de ses membres de base, est un obstacle pour leur carrière.

Pierre Ruscassie 10 mai 2022)

 

Déposer un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera jamais transmise.

*