Partis syndicats, masses, union et révolution

Partis, syndicats, masses, union et révolution

 

C’est l’existence qui détermine la conscience. C’est le capitalisme qui engendre des revendications qu’il ne peut satisfaire. Le socialisme vient du ventre. Ce n’est pas l’insurrection civique super-structurelle (sic) qui précède l’insurrection sociale de base. Ce sont les combats pour des revendications souvent élémentaires mais légitimes, poussés jusqu’au bout, qui déclenchent les révolutions.  Ce ne sont pas des « projets de société contre des projets de société ». Ce n’est pas « l’idée » de la République qui pousse les femmes à aller à Versailles en octobre 1789, c’est le pain. Pareil pour la révolution russe de février 17 comme celle d’octobre elles ne se font pas « pour le socialisme » mais pour la paix, le pain, la terre.

 

Depuis quand  ce serait un « manque d’ imaginaire » qui nuirait aux mobilisations sociales ?

C’est le contraire, c’est l’imaginaire qui provient des luttes et mobilisations les plus fortes et les plus réussies, c’est un résultat, pas un préalable !

Presque toujours à la Butte Montmartre,  au quartier de Vyborg, dans 90% des entreprises occupées de mai-juin 68, dans un théâtre de Prague, ou le 17 déc. 2010 à Sidi Bouziz, les explosions sociales et révolutions, commencent sans « imaginaire », mais avec un affrontement concret, une colère puissante, un détail qui stimule, obtient un soutien de masse et ouvre la voie à tous les possibles.

La gauche est pluraliste, traversée de plein « d’imaginaires », positifs et négatifs, et c’est logique. Mais c’est justement quand ces divers imaginaires ne séparent plus, ne divisent plus, et que l’action commune de classe l’emporte que l’explosion sociale victorieuse se produit.

Il y a une question de méthode, de théorie derrière ca.

 

Ce ne sont pas des « mots d’ordre centraux », venus du haut de la direction d’un « parti avant garde » d’après un schéma souvent usé qui aident vraiment le mouvement social.  Ce n’est pas la marche sur Paris en juin 2013 (« du balai ») qui féconde un mouvement contre l’ANI en 2013, ce n’est pas la marche contre la hausse de la TVA en déc. 2013 qui féconde le combat d’alors contre la loi Touraine sur les 43 annuités de retraite. Ce n’est pas la marche pour un candidat à la présidentielle qui aide le mouvement unitaire des 14 manifestations anti El Khomri à gagner.

C’est le contraire c’est plutôt le mouvement social qui conditionne et féconde la possible victoire d’un candidat à la présidentielle.

Ce sont plutôt les « gilets  jaunes » ces « gueux » surprenants venus d’en bas, comme en 1788, qui ont terrorisé le pouvoir macronien, et fertilisé les luttes et à juste titre, car ils étaient la poussée qui suppléait à la répétition des non-victoires des syndicats face à l’arrogance sourde du pouvoir capitaliste depuis 2002. Même sans une énorme conscience au départ, ils se radicalisaient très vite à gauche (j’ai visité moi aussi, comme d’autres 25 ronds points dans toute la France et j’ai pu le vérifier in situ)

L’insurrection civique ne précède pas l’insurrection sociale : au mieux c’est l’inverse ! On ne gagnera jamais une « constituante » et une VI° République (voir le Chili) sans avoir gagné le pouvoir et déjà changé considérablement la vie concrète ! Sur le terrain des idées, les capitalistes  ont l’argent et les médias, nous nous n’avons que le terrain de la mobilisation collective, du changement de vécu massif de millions de salariés. Ce n’est pas vrai qu’il faudrait dominer culturellement avant de prendre le pouvoir. Il faut dominer socialement pour conquérir des revendications puis les institutions, il faut avoir conquis le pouvoir pour consolider une nouvelle culture sociale qui éradique toutes les différentes discriminations et oppressions morcelées : ce combat n’est jamais fini tant que le salariat en tant que classe ne dirige pas collectivement et démocratiquement. Les institutions d’une VI° république se créeront à ce moment-là pour concrétiser, conforter, quant elles seront perçues comme nécessaires pour défendre et faire perdurer le nouvel ordre social « pluriel ».

Idem en Europe, c’est la victoire de la gauche en France qui secouera et transformera l’UE. La Grèce suppliciée faisait 2 % du PIB européen, la France fait 27 % dudit PIB. Il ne faut pas dire Frexit mais Macronxit. Ce n’est pas à Bruxelles que sont dirigées les FDO, c’est à l’Elysée. Les GOPE ne sont appliqués que si le gouvernement en place le veut, et sinon ils sont et seront renégociés. D’ailleurs les traités passés sont déjà peu appliqués et aucun critère de Maastricht n’est plus en vigueur. Aucune unanimité ne s’imposera alors. Les rapports de force changeront grâce au salariat de tous les pays. Ça ne sert à rien de nous mettre nous mêmes des bâtons dans les roues, d’inventer à froid des préalables, de nous diviser sur des scénarii abstraits, nous ne voulons pas nous replier ni nous défendre, ni « sortir » : si nous gagnons à Paris, nous espérons que se généralisera un « printemps des peuples » européen et que les autres capitales devront répondre à cette nouvelle donne. (On devrait donc facilement parvenir à une liste commune  de la NUPES et de toute la gauche aux européennes de 2024 afin que cette liste soit en tête dans tout le pays et marque bien que c’est la gauche la véritable et principale opposition au macronisme).

 

Gagner les élections est difficile, car le bulletin de vote est manipulé par l’argent les médias, l’isolement. En fait quand les élections sont gagnées, c’est un résultat plutôt qu’une étincelle : mai 81 est un effet différé de mai 68,  mai 1888 est un effet différé de l’hiver 1986, juin 1997 est un effet différé de nov.-déc. 95, mars 2004 (20 régions sur 24 a gauche) est un effet différé du plus grand mouvement sur les retraites en 2003, mai 2012 est un effet différé du CPE, des batailles sur les retraites de 2003 et 2010.   Ce n’est pas l’appel politique précipité en juillet 2022 à une montée à Paris le 16 octobre qui aide le plus  les syndicats à s’unir et à agir.  Ce n’est pas la fixation par le haut d’une autre date au 19 janvier 2023 qui aide le mouvement syndical à s’unir à 100% et à fixer le 19 janvier. Cela peut même être contre productif en induisant des faux débats.

 

Un accord gauche-écologiste est fondamental : il ne peut y avoir d’écologie sans gauche, ni de gauche sans écologie. Sans être anticapitaliste on ne sauvera ni la planète ni les fins de mois. Le capitalisme est un système de compétitivité et donc de guerre, notre éco-socialisme est un système de partage démocratique des richesses que nous produisons. L’intégration de toutes les révoltes partielles, sectorielles est décisive contre les oppressions multiples, anti-masculinistes,  anti racistes,  anti xénophobies, anti nationalistes, c’est nécessaire à la pleine force du combat principal contre l’exploitation. Ce dernier condense l’affrontement avec le capitalisme, avec le système de guerre anti sociale qui  nourrit toutes ces oppressions.

 

L’union fait la force, la force ne fait pas forcément l’union. Une dynamique unitaire, ça dépend du contenu et de l’adhésion créative à ce contenu : c’est une question de conviction, d’élan vivant, pas une question d’autorité ni de chef. (Ce n’est pas vrai que la gauche française sera sauvée de ce qui est arrivé en Italie, par la force).

 

Les appareils existent partout, c’est matérialiste, surtout il ne faut ne pas le nier, ni s’en offusquer, il faut le mettre dans les programmes de formation d’éducation, bien prévenir sur leur réalité : il n’y a pas de vaccins contre eux, mais il y a des traitements. Le principal étant la démocratie : des statuts, des débats, des votes, des procédures méticuleuses,  des adhésions,  des cotisations, des élections, des contrôles financiers et éthiques, du pluralisme reconnu et proportionnel, etc. (la procédure est la sœur jumelle de la liberté, et la démocratie ne s’use que si on ne s’en sert pas, la démocratie n’est pas une perte de temps ni d’efficacité, au contraire, elle aide à démultiplier les forces).  Les appareils (syndicaux et politiques) se méfient de l’union et veulent  la contrôler : elle les bouscule, elle change la donne, elle fait intervenir de nouvelles énergies, elle fait le tri des élus, des dirigeants, des bureaucraties (grandes ou petites) à l’épreuve concrète de la lutte de classes. Il leur faut à ce moment là faire face aux vérités des luttes et des débats, ils n’aiment pas ça. Car ce qui contredit et emporte les reflexes claniques d’appareils c’est la libération des actions de masse unies.

 

 

La division est quasi toujours une pratique qui freine, oppose, crée des mauvaises concurrences polémiques entre pseudo « avant gardes » dures,  larges ou auto-proclamées, elle donne toujours prétexte à des haines, insultes,  entre les salariés pourtant tous exploités, elle donne matière à des courses au triomphalisme, suprématisme, hégémonisme, et même hélas, sectarismes, et à des gauches prétendues « irréconciliables ». Seuls le patronat et les pouvoirs de droite en tirent parti. C’est vieux comme le mouvement ouvrier du XIX° siècle : « La domination de la bourgeoisie n’est fondée que sur la concurrence des ouvriers entre eux, c’est-à-dire sur la division à l’infini du prolétariat, sur la possibilité d’opposer entre elles les diverses catégories d’ouvriers » (Friedrich Engels).

 

Notre rôle théorique, intellectuel, militant est d’unifier le salariat, d’aider à ce qu’il prenne conscience de sa puissance.

 

L’union a une vertu intrinsèque, elle bouscule les appareils et tire à gauche. Le fait qu’un appareil ne puisse plus imposer son hégémonisme (ses intérêts propres générés matériellement), mais soit  obligé d’écouter les autres, de respecter les autres, de composer avec les connaissances, expériences, acquis théoriques, historiques, implantation des autres, laisse s’exprimer et passer les besoins les plus radicaux des masses.

Encadrer les choix et décisions dans des « espaces », des « pôles » des « fonctions » sans centralisation publique ni démocratie méticuleuse. Hiérarchiser les prérogatives au lieu de faciliter les complémentarités associations, syndicats, partis,  comités de « base » et « comités au sommet » n’est pas non plus la bonne méthode.

La confiance en l’union-qui-se-radicalise se vérifie à coup sûr à la base, quand l’union est libre, avec des comités, des collectifs, des structures souveraines qui l’emportent sur les appareils  des syndicats ou des partis. Le « dégagisme » si cela a un sens, c’est ça. Pas de réticence à l’union, pas de leçons à donner, pas de crainte à avoir, confiance totale envers les larges masses, unies, débarrassées des chapelles,  des clans, des apparatchiks. C’est pour cela que nous sommes pour une « maison commune » sans crainte ni réserve de toute la gauche.

 

Parler du salariat comme classe puissante majoritaire, ce n’est pas du tout une « vieille lune », C’est une idée neuve, récente. Une analyse décisive. Il y a un grand retard intellectuel à gauche à propos de la survenue massive du salariat en tant que classe. Dans le monde, il y a un milliard de salariés de plus depuis trente ans, et 54 % des actifs sont salariés.

 

En 1910 en France, il y avait 3 millions de salariés, en 2010, il y a 30 millions de salariés. Comme Marx à son époque parlait du prolétariat naissant nous devons parler de ce  salariat devenu majoritaire. Ne pas identifier cette force en tant que telle, est une faiblesse théorique de la gauche. L’ancienne classe ouvrière (érigée en mythe surtout par les staliniens) n’en est qu’une partie. Il n’y a plus de différence cols blancs, cols bleus et cadres. Les salaires ont été compactés depuis 50 ans. Le salaire médian a été réduit, bloqué, les cotisations sociales abaissées et supprimées, les durées du travail un moment réduites, ont été rallongées. Le chômage de masse perdure cruellement : 6,5 millions de salariés sont privés d’emploi. La précarité augmente de 15 à 20 %. Les discriminations sont profondes : différences de salaires femmes-hommes, maltraitance de la jeunesse, ségrégation voulue envers les salariés et sans papiers immigres et un million de « travailleurs détachés »

Employés ouvriers et cadres n’ont que leur force de travail à vendre. Depuis 75 ans, ils avaient gagné de quoi faire progresser leur classe, leurs statuts, leur code du travail et leurs conventions collectives avec un principe de faveur, leurs salaires nets et bruts et super-bruts, leurs institutions représentatives du personnel, CE, DP, CHSCT, DS, ils avaient une médecine du travail une inspection du travail, une justice du travail, une sécurité sociale (ils votaient pour la direction de ses caisses), une retraite… tout cela est soumis depuis 20 ans à une offensive brutale et systématique sans précédent du patronat pour faire régresser chacune de ces conquêtes.  Et la politique de Macron est avouée depuis son livre « Révolution » de 2016 : sauvagerie de la France start up, suppression des cotisations sociales, société sans statuts, (ni code ni accords de branches), société post-salariale ubérisée. Il vise à détruire méthodiquement le salariat et tous ses statuts !  Raison de plus pour construire la résistance à cette politique et la conscience (l’imaginaire ?) collective qui en découle. Défendre et reconstruire le salariat comme grande classe révolutionnaire, a travers chacune des luttes sociales qui le permet : défense du code du travail, des services publics, de nos retraites, en espérant à chaque étape le soulèvement salvateur.

 

Les syndicats sont indépendants. Sans syndicats nous ne sommes rien. Sans syndicat nous n’avons rien. C’est le premier pas de l’organisation de classe de salariés.  C’est l’école de la lutte sociale, et du socialisme. Il faut respecter les syndicats, faciliter le fait qu’ils organisent et rassemblent  des millions de salariés sans discrimination, parce qu’ils sont salariés, indépendamment de leurs opinions philosophiques, religieuses, ethniques, corporatives et politiques. Il ne faut pas chercher à se substituer encore moins instaurer un « tri » mais il faut aider à des syndicats de masse, indépendants, démocratiques (fédéralistes), les plus unifiés possibles et unitaires, rassemblant l’écrasante majorité de la classe salariale. Et la démocratie est fondamentale dans les syndicats, comme dans les partis politiques. C’est le respect de règles démocratiques scrupuleuses, pointilleuses, méticuleuses, qui permet a la base et à chacune des formes d’oppression de se faire entendre et de s’exprimer. C’est par la démocratie, que les droits des femmes, des jeunes, des immigrés, des différentes minorités sexuelles peuvent exister. C’est par la démocratie que les combats se reconnaissent, s’épaulent et gagnent.

 

C’est le respect des rythmes, la compréhension de la naissance du développement et bonds en avant de la conscience de masse qui aident. Les cercles militants d’associations, de syndicats ou de partis sont là pour éduquer, préparer,  féconder, et proposer des issues aux explosions sociales, ils ne les décrètent pas. Ni la grève générale ni la « montée sur Paris », encore moins l’insurrection ne se décrètent par le haut d’un parti politique.

 

Des millions de militants ne suffisent pas pour gagner, il faut des dizaines de millions pour renverser victorieusement le capitalisme. Et ces dizaines de millions ne se mettent en mouvement que dans des circonstances exceptionnelles, en général « for one single issue », sur un seul but. Les revendications transitoires ne sont pas une échelle qu’il faut gravir, c’est chacune d’elles qui compte : gagner sur l’une entraine vite de gagner sur toutes. Gagner sur les retraites serait un bélier qui ouvrirait toute les portes.  Mais ce n’est pas agiter l’image du bélier qui compte, c’est le franchissement collectif de la porte.  Pour cela il faut un mouvement puissant, horizontal, pas vertical, il faut une expression démocratique, basique, des larges masses. C’est rare l’apparition de cette alchimie, et de cet art, pour qu’ils s’unissent et imposent à la fois la victoire de la revendication qui les a fait se mettre tous en mouvement, et à la fois dans la dynamique, la crise politique révolutionnaire qui débouche sur un changement de société.  Mai 68 commence vraiment les 16, 17 18 mai avec la grève générale de masse spontanée, sans doute la plus grande grève de l’histoire de l’humanité. Elle vient de la courbe ascendante des grèves des mineurs, de Rodhiaceta, de Redon, des 17 mai 66 et 17 mai 67, de la Saviem. S’il n’y avait eu que le « détonateur » des étudiants et les barricades, on n’en parlerait pas 50 ans après (de même qu’on a « oublié » le mouvement étudiant allemand qui fut plus fort que celui de France). C’est dans le mouvement, c’est dans l’action, que des millions de salariés, apprennent – parfois plus en trois jours qu’en trois semaines et plus en trois semaines qu’en trente ans. Ce n’est pas la parole tribunicienne, ce n’est pas le discours, « l’idée », ni le projet de société, ni l’idée d’une marche qui précède, c’est leur expérience pratique qui leur apprend ce qu’il faut le faire, qu’il n’y a pas moyen de faire autrement, que sans se soulever ils y perdront plus.

 

Je ne sais pas non plus ce que veut dire « l’échec du communisme » et encore moins celui de la « classe ouvrière » ? La révolution socialiste et communiste a été vaincue et écrasée, elle n’a pas « échoué » ; il n’y a jamais eu de socialisme ni de communisme en URSS, ni nulle part. Le dire clairement est une force. Il y a eu contre-révolution et pas une dégénérescence coupable ce n’est pas la faute aux révolutionnaires ni à leur programme, ni la classe, c’est la faute aux contre-révolutionnaires et aux crimes des capitalistes. Nous n’avons pas à nous renier, à changer de nom, je ne sais pas ce que veut dire « insoumis » mais je sais ce que veulent dire socialisme et communisme, et nous avons actualisé les éléments de programme actuels qui y correspondent.

 

La classe ouvrière, c’est à dire la partie ouvrière du salariat  a été réduite en proportion mais n’est pas disparue : les légendes autour des cols bleus, par contre ont  nourri des clichés usés, des fétichismes, des nostalgies, des démoralisations, et des théories devenues archaïques. Il y a globalement 6 millions d’ouvriers, 4 millions de cadres, 6 millions d’employés. (Il y a très peu de cadres supérieurs, de CSP). 18,5 millions dans le privé, 5,5 dans le public, et 6,5 millions de chômeurs.  Intégrer ce qu’on distinguait sous l’étiquette « classe ouvrière » dans le concept global de salariat, 30 millions, 90 % des actifs, ceux qui n’ont que leur force de travail à vendre, aiderait à unir toutes les composantes sociales dans un même combat, de l’ingénieur au balayeur,  de la femme de ménage à la professeure, du métallo à l’éboueur. Il ne faut pas parler de « classe moyennes »  ni de « classes populaires »  ça ne veut rien dire (et ceux qui utilisent des mots à la dérive sont incapables de  les définir). Il y a un haut, un milieu et un bas du salariat, une seule classe. Il existe mille entreprises de plus de mille salariés qui font 50 % du produit intérieur brut, et font travailler près de 4 millions de salariés sur 18 millions.  Certes, il n’y a « que » 3 % d’entreprises de plus de 50 salariés mais elles font travailler 50 % des salariés (prés de 9 millions). Cela n’a pas empêché en mai 68 que le mouvement atteigne les pompistes, et les dentistes, les gardiens de musée et les traminots,  les cinéastes et les footballeurs,  les douanes et les couvents ! En dehors il existe 10 à 12 % d’indépendants dont les victimes ubérisées de Madelin, Novelli, Macron : il est bon de savoir que 16,6 % de ces indépendants sont pauvres (et seulement 5,3 % des salariés).

La politique de Macron expulse les salariés du salariat : ce n’est pas une libération, c‘est une terrible régression. Face à cela nous devons avoir la même méthode que ci dessus, dans tout ce texte : certes, nous voulons libérer les salariés de leur exploitation, de leur subordination, mais c’est en défendant aujourd’hui, chaque jour, leurs statuts, droits, conquêtes,  que nous y parviendrons dans des conditions émancipatrices pour toutes et tous.  Nous défendons la présomption de salariat contre Uber-Macron. Défendre les droits menacés du salariat, c’est mieux qu’un « imaginaire » c’est une bataille matériel et réelle. Je ne sais pas ce que veut dire « l’ère du peuple » mais je défends l’idée que c’est « l’ère du salariat ». D’ailleurs depuis que François Mitterrand a dit en mai 1981 que « c’était la victoire de la majorité sociologique » plus personne ne recherche des « fronts de classe » ni des « alliances de classe ». Le Front populaire de 1935 était une alliance avec la bourgeoisie quand le salariat était encore minoritaire ! Aujourd’hui un seul « front » du salariat suffit (de ses partis syndicats, associations..)

Nous n’opposons pas « réformistes » et « révolutionnaires ». Nous ne cherchons pas à diviser la classe entre les plus conscients et les moins conscients. Nous avons intérêt tous à nous entrainer dans le même mouvement de masse.  Des révolutionnaires autoproclamés peuvent arriver bien tardivement après des réformistes considérés comme hésitants mais qui se radicalisent. La réforme d’ailleurs nourrit la révolution et ne s’y oppose pas. Les conquêtes ne sont pas un embourgeoisement mais un appui, un socle. Les processus de développement de la conscience de classe (je l’ai illustré tout au long de ce texte) n’ont pas changé. On s’éveille pour la retraite, on devient peut être révolutionnaire dans la soirée ! Il ne faut pas (comme on disait dans le temps à la LCR et d’ailleurs le NPA majoritaire change en ce moment même sur cette question) « cliver  avec les réformistes », il ne faut pas construire une « avant garde » des plus conscients contre les moins conscients, il faut créer les conditions pour faire la course tous ensemble, et s’il s’avère que c’est un marathon, ce sont les révolutionnaires qui prouveront leurs qualités en gagnant dans les derniers kilomètres.

D’où l’idée actuelle d’une « maison commune » de toute la gauche, comme cela exista lors du Congrès du Globe de Jean Jaurès en 1905 : il réunit toutes les composantes des socialistes de l’époque, qui n’étaient pas aussi éloignées que cela politiquement, les unes des autres, mais qui se détestaient,  se méfiaient, passaient leur temps à polémiquer, etc… Ils commencèrent par des statuts communs où chaque composante était respectée, « dans sa personnalité antérieure », avait ses droits et ses expressions préservées, où la démocratie était la première condition de  l’unification…

Après 5 ans de trahison de Hollande Valls et 5 ans de division de la gauche de 2017 à 2022, l’unité réalisée avec la NUPES en avril mai 2022 est un immense et beau tournant, elle s’est faite sur un programme partagé, qui est une chance sérieuse pour aller plus loin,  toutes ses composantes sont dans le mouvement social pour les retraites, la NUPES peut donc et doit s’élargir, réfléchir, s’organiser à la base, se démocratiser…

Un nouveau congrès du Globe devrait être unitairement convoqué par des personnalités de tous les courants, et ainsi, naîtrait une force capable de fertiliser une explosion sociale révolutionnaire comme celle qui est inscrite dans la puissance du salariat. Et réussir !

Bon, évidemment un « congrès du Globe » ça ne s’auto proclame pas, une fois qu’on partage bien cette idée, on ne réunira pas  Faure,  Melenchon Tondelier, Roussel dans une même salle du jour au lendemain par un coup de baguette magique avec GDS Générations Ensemble (encore que ce serait urgent et souhaitable). Il faut donc que ça se construise : que ça traverse en profondeur les bases des partis, que l’unité et l’avenir frappent à la porte du congrès du PCF,  que la direction du PS avec Faure se consolide dans cette voie, que les Verts EELV cessent de se croire seuls pivots de l’avenir et acceptent réellement un front commun, que la LFI se démocratise, que la NUPES aient des comités de base élargis et démocratiques : il faut un processus concret, progressif, intermédiaire  pour convaincre les dizaines de milliers de militants concernés  !

Le présent texte est l’écho d’une discussion un peu abstraite et générale qui s’est tenue librement dans le conseil d’administration d’une fondation, la fondation Copernic, mardi 24 janvier. Dans ce contexte, je n’y ai pas abordé  les détails tactiques de la stratégie défendue. Mais GDS cherche plus concrètement à faire surgir au moins un regroupement de toutes celles et ceux qui partagent actuellement ce projet d’une « maison commune  » de la gauche, c’est envisageable de commencer par  faire un « PESU », un « parti écologique et social unitaire » au sein de la NUPES  et d’aller à marche assez  forcée cette année 2023 en ce sens, car le temps passe.  Un « appel » de dirigeants de Ensemble, Nouvelle Donne, Générations, GDS..  pour des « assises de fondation » d’un PESU (ou PGU  parti des gauches unitaires) au printemps serait une bonne démarche. Se mettre d’accord sur des statuts, un fonctionnement, un consensus de travail dans la grande perspective d’une « grande maison commune » rallierait sûrement des milliers de militants aujourd’hui  et pèserait dans le bon sens et fraternellement sur toute la NUPES.

Nous savons que dans chaque parti, PS, PCF, EELV LFI, il y a beaucoup de militants sincères et actifs, qui souhaitent cela ! En avant !

Le mardi 24 janvier Gérard Filoche

 

 

 

 

Déposer un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera jamais transmise.

*