L’inspection du travail affaiblie et dévoyée

Au boulot n° 37

Le rapport sur l’activité de l’inspection du travail en France vient de paraître. La Direction générale du travail (DGT) y a fusionné les 4 corps de l’inspection (agriculture, mer, transports, travail), un nouveau mode de calcul qui semble faire progresser le nombre d’inspecteurs de 535 en 2008 à 767 en 2009. Mais le chiffre reste aussi bas qu’en 1910 : il y avait alors 110 inspecteurs pour 3 millions de salariés, il n’y en a aujourd’hui que 767 pour 18,3 millions de salariés. En ajoutant les contrôleurs du travail, seulement 2 190 agents sont chargés de faire respecter les lois de la République dans 1,8 million d’entreprises ! Chaque agent doit veiller aux droits de 8 345 salariés, une section d’inspection ayant en moyenne 30 000 salariés. Au total, 6,2 millions de conseils sont donnés au public, il y a 307 500 interventions en entreprises, 6 070 arrêts de travaux, 6 797 enquêtes accidents du travail/maladies professionnelles, 25 726 enquêtes licenciement de salariés protégés et 6 352 procédures pénales sont engagées (procès-verbaux). Mais sur une même année, les 3/4 de ces PV ne donnent pas lieu des prononcés de peine, et quand cela se produit, c’est a minima : faibles amendes, rares peines de prison, la délinquance patronale est largement impunie. Alors que les patrons ont davantage de responsabilités, le Parquet et les juges sont laxistes à leur égard, ce qui affaiblit l’action de l’inspection.

Le Bureau international du travail (BIT) saisi par le SNUTEFE-FSU pour non-respect par l’État français des conventions internationales, a condamné pour la 3e fois la France pour dévoiement de missions des inspecteurs du travail dans des “opérations conjointes” avec la police contre le travail illégal. Les experts du BIT estiment que “l’association des forces de police à l’inspection du travail n’est pas favorable à la relation de confiance nécessaire à la collaboration des employeurs et des travailleurs avec les inspecteurs du travail” et demandent au gouvernement français d’empêcher « que les pouvoirs des inspecteurs d’entrer dans les établissements assujettis à leur contrôle ne soient détournés à l’effet d’opérations conjointes de lutte contre l’immigration illégale”. Sinon « ces opérations aboutissent à un éloignement des travailleurs étrangers hors des frontières de la France, ce qui les prive de facto de tout droit de recours à l’encontre de l’employeur en infraction d’emploi illégal”.
En pratique, depuis six ans, les agents de contrôle refusent collectivement dans des proportions énormes de participer à ces opérations mais les gouvernements successifs de Sarkozy ont toujours tenté d’imposer ce dévoiement.

Gérard Filoche

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