Dans les grands magasins, la « Loi des sièges » violée, même plus le droit de s’asseoir un instant ?

On se frotte les yeux : on est dans un pays où les 60 patrons les plus riches qui arrachent le plus de dividendes exigent 60 milliards d’assistanat à l’état et réclament en même temps que les salariés soient plus « flexibles » et que les 5 millions de chômeurs aient moins d’indemnités.
L’idée même de « flexibilité » est inhumaine : on y sent la nuque baissée, la dignité bafouée. Et elle est stupide économiquement et contraire à l’emploi : ce sont les salariés les mieux formés, les mieux traités, les mieux payés qui sont les plus « compétitifs », pas les flexibles ni les précaires !
Mais savez-vous jusqu’où ça va ? En ce moment les patrons des plus grands magasins parisiens privent les salariés de sièges. Oui, vous avez bien lu : de « sièges ». L’inspection du travail est actuellement obligée de se battre au cœur de Paris pour que les vendeuses et vendeurs disposent de quoi s’asseoir au moins quelques instants dans leur longue journée de travail. Sans succès, pour le moment, elle fait des interventions en CHSCT, des « mises en demeure » pour le simple droit des salariés de poser leurs fesses un instant en 8 heures.
Le patronat exige que les vendeuses et démonstratrices soient en perpétuel mouvement ou en position debout (ou les deux), au-delà des exigences de leur poste pour « créer l’image d’une entreprise animée – éveillée, consciente, énergique, dans un état constant d’accueil et d’attention aux besoins du client ».
C’est le retour d’ « Au bonheur des Dames » d’Emile Zola. L’époque où même la Marquise de la Tour du Pin qui aimait y faire ses courses, fut émue que les vendeuses des grands magasins n’aient pas de sièges. La Marquise intrigua et réussit à obtenir de la Chambre, ce qui s’est appelé « la loi des sièges » toujours inscrite dans le code du travail : Art. R.4225-5 sous le titre : « confort au poste de travail. Sièges » : « Un siège approprié est mis à disposition de chaque travailleur à son poste de travail ou a proximité de celui-ci. »
Les employeurs ont le droit de concevoir leurs activités selon une image particulière et exiger que leurs employés s’y intègrent mais :
- Ils n’ont pas le droit de les utiliser de manière illégale en les contraignant à des actions qui nuisent à leur santé (par exemple, des périodes prolongées debout) non nécessaires à l’accomplissement de leur mission
- Ils doivent au contraire utiliser tous les moyens possibles pour assurer le moins de préjudice possible à la santé de leurs salariés.
- Dans l’équilibre des intérêts entre la création d’une image (grâce à l’utilisation d’employés constamment en mouvement ou en position debout) et la dignité humaine de l’employé, la dignité humaine doit l’emporter.
- L’obligation pour les salariés d’être constamment en mouvement ou en position debout constante constitue aussi une discrimination d’âge, puisque les plus âgés ont plus de mal à s’y conformer.
Laurence Parisot contre la Marquise du Pin ? Le code du travail en état de siège. Jusqu’où, jusqu’à quand ?

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10 Commentaires

  1. Posted 27 décembre 2012 at 18:47 | Permalien

    J’ai connu ça chez Pier1Imports en 1981, je ne savais même pas que c’était illégal tellement c’était admis: jamais assis devant le client! Et ailleurs depuis, pareil…

  2. Babilotte Patrice
    Posted 27 décembre 2012 at 18:53 | Permalien

    Bravo et merci pour vos combats de tous les instants. Felicitations pour ce proces gagne. Je suis vos interventions en faveur des plus humbles d’entre nous, depuis longtemps, avec grand interet et suis admiratif de votre courage.

  3. Denis Rumon
    Posted 29 décembre 2012 at 1:23 | Permalien

    Le ps a tous les pouvoirs mon ami ! au lieu de venir verser des larmes de crocodile ici, vas donc te plaindre auprès des chef de gôche !

  4. Posted 29 décembre 2012 at 7:54 | Permalien

    oui tu as vu la vidéo ou je dit cela de façon détaillée devant tout le congrès du parti socialiste, donc toi aussi, tu l’as remarqué, hein, le PS a tous les pouvoirs en effet ?
    mais tu as remarqué aussi que je ne « versais pas de larmes de crocodile » et je ne me « plaignais » pas, je défendais avec D&S une autre motion, @quevivelamotion3, laquelle a obtenue entre 13,67 et 31 % des voix… comme tu vois ça débat et ça peut avancer dans le PS…

  5. linda f
    Posted 5 septembre 2013 at 23:34 | Permalien

    Merci pour ce texte ! Aujourd’hui vendeuse en boutique de luxe, nous n avons pas le droit de nous asseoir de la journée! (Etant flices par les caméras et remis en place des que c est le cas). Ayant enfin pu mettre la main sur l article R.4225-5 je pense que ça va changer beaucoup de chose.
    D ailleurs merci de votre travail en général !

  6. Posted 25 août 2014 at 14:04 | Permalien

    Médecin du Travail j’ai toujours détesté voir les femmes travailler debout, et toujours tout fait pour qu’elles puissent s’asseoir.
    Dans les usines on y arrivait, les industriels se soucient plus de l’ergonomie que les commerçants.
    Dans les hard discounts, les caissières ont bien des sièges à leur disposition, mais comme les postes ont été conçus au départ pour travailler debout, elles les utilisent très peu.
    Ailleurs on impose la station debout soi-disant « par respect pour le client ».
    Je ne vois pas en quoi une femme debout est plus « respectueuse » du client, c’est juste une idée que se font les spécialistes du marketing.

  7. Posted 25 août 2014 at 17:06 | Permalien

    Mais savez-vous jusqu’où ca va ? En ce moment les patrons des plus grands magasins parisiens privent les salariés de sièges. Oui, vous avez bien lu : de « sièges ». L’inspection du travail est actuellement obligée de se battre au cœur de Paris pour que les vendeuses et vendeurs disposent de quoi s’asseoir au moins quelques instants dans leur longue journée de travail. Sans succès, pour le moment, elle fait des interventions en CHSCT, des « mises en demeure » pour le simple droit des salariés de poser leurs fesses un instant en 8 heures.
    Le patronat exige que les vendeuses et démonstratrices soient en perpétuel mouvement ou en position debout (ou les deux), au-delà des exigences de leur poste pour « créer l’image d’une entreprise animée – éveillée, consciente, énergique, dans un état constant d’accueil et d’attention aux besoins du client ».
    C’est le retour d’ « Au bonheur des Dames » d’Emile Zola. L’époque où même la Marquise de la Tour du Pin qui aimait y faire ses courses, fut émue que les vendeuses des grands magasins n’aient pas de sièges. La Marquise intrigua et réussit à obtenir de la Chambre, ce qui s’est appelé « la loi des sièges » toujours inscrite dans le code du travail : Art. R.4225-5 sous le titre : « confort au poste de travail. Sièges » : « Un siège approprié est mis à disposition de chaque travailleur à son poste de travail ou a proximité de celui-ci. »
    Les employeurs ont le droit de concevoir leurs activités selon une image particulière et exiger que leurs employés s’y intègrent mais :
    - Ils n’ont pas le droit de les utiliser de manière illégale en les contraignant à des actions qui nuisent à leur santé (par exemple, des périodes prolongées de debout) non nécessaires à l’accomplissement de leur mission
    - Ils doivent au contraire utiliser tous les moyens possibles pour assurer le moins de préjudice possible à la santé de leurs salariés.
    - Dans l’équilibre des intérêts entre la création d’une image (grâce à l’utilisation d’employés constamment en mouvement ou en position debout) et la dignité humaine de l’employé, la dignité humaine doit l’emporter.
    - L’obligation pour les salariés d’être constamment en mouvement ou en position debout constante constitue aussi une discrimination d’âge, puisque les plus âgés ont plus de mal à s’y conformer.
    Laurence Parisot contre la Marquise du Pin ? Le code du travail en état de siège. Jusqu’où, jusqu’à quand ?

    Gérard Filoche

  8. bernadette
    Posted 29 janvier 2015 at 22:45 | Permalien

    Je travaille dans une pharmacie et les nouveaux patrons viennent de nous suprimer le seul siège que l’on avait pour dix, après nous avoir interdit de prendre un café et de parler aux collègues!je ne sais pas ce que nous réserve l’avenir!!
    On croit toujours que dans ce COMMERCE les employées sont privilégiées!

  9. vandevelde
    Posted 18 juillet 2017 at 22:47 | Permalien

    je travaille moi même dans un magasin du groupe Beaumanoir au Touquet j’ai interdiction de m’asseoir alors que j’ai un certificat de la médecine du travail qui oblige l’employeur à me fournir un siège assis debout le siège est dans la réserve, ma responsable magasin m’a dit ici on travaille debout alors que j’ai 58 ans, arthrose aux deux genoux et aponévrosite plantaire qui ne guérit pas bien sûr puisque tjrs debout c’est un groupe ou l’humain est secondaire c’est chiffre chiffre c’est tout tu peux crever au boulot il y en a 10 qui attendent à la porte voilà ce que je voulais dire

  10. Fischer cedric
    Posted 16 septembre 2017 at 10:18 | Permalien

    Merci pour cette lutte. Sur le site industriel de PSA Vesoul, dans l atelier, l’encadrement empêchent les salarié(e)s de s’asseoir parce que ça nuirait à l’image de la boîte. Au Bâtiment N25, notre cafétéria à été remplacée par une installation robotisé et deplacée dans le hall d’entrée avec la fontaine d’eau fraîche à plus de 150 mètres des postes de travail. Comme si ça suffisait pas, seuls les tables sont restées et les chaises ont fini à la benne.même pendant notre pause physiologique le droit de s’asseoir nous est retiré. Quel contact a l’atelier avec le consommateur ? Aucun. Cet interdiction est pour moi aussi une façon de soumettre la classe ouvrière à son employeur. Nous envisageon se avec mes collègues une action si nos réclamation services légitimes ne sont pas entendues.

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