15 euros de l’heure : «fight for fifteen »


Décembre 2012, un mouvement exceptionnel voit le jour aux Etats-Unis dans le secteur de la restauration rapide. Au tout début, une petite centaine de travailleurs assez courageux pour se mettre en grève et exiger un salaire décent. Décent ? Oui mais combien ? Quelques AG auront suffi pour trancher : ils fixent 15 dollars par heure. C’est un salaire juste, nécessaire et possible.

La revendication est claire, unifiante. 15 dollars de l’heure, c’est à la fois énorme par rapport aux 9 dollars versés à cette époque dans ce secteur. 15 dollars, c’est en même temps très raisonnable. Pour réussir à vivre avec 9 dollars de l’heure, il faut travailler jusqu’à 80 heures par semaine, parfois dans plusieurs restaurants. Très vite le mouvement prend de l’ampleur. Des actions collectives, un soutien actif des syndicats, une médiatisation du mouvement et surtout une rage profonde pour remporter la bataille : en quelques mois la mobilisation devient nationale. Pour aider les salariés en lutte, la solidarité s’organise. Les travailleurs d’autres secteurs n’hésitent pas à aider, à soutenir, à organiser la lutte.

Mais impossible de faire céder les grandes entreprises qui dominent le secteur comme Mac Do ou Burger King. La mobilisation se poursuit et trois Etats décident d’appliquer de manière progressive ce salaire minimum. C’est une victoire large et incontestable. Il faut évidemment s’en réjouir. Mais le combat n’est pas terminé. Comment faire plier « Ronald » pour que les 4000 restaurants répartis sur le territoire américain puissent servir d’exemple aux autres fast-food ? Tout accord d’entreprise est absolument écarté par la firme qui n’hésite pas à licencier les salariés les plus véhéments.

Le mouvement « Fight for fifteen » lance alors une campagne « Come take my vote » (« Venez cherchez mon vote »).

Stratégie habile que de contraindre les candidats à l’élection présidentielle américaine à se positionner. Trump refuse « par principe » de payer un salarié plus de dix dollars de l’heure. Mais victoire, Bernie Sanders soutient. Et ca force Hillary Clinton à soutenir à son tour. 15 dollars de l‘heure c’est une hausse du smic de 44,7 %. Les travailleurs en lutte sauront rappeler à Hillary Clinton, dès 2017 l’urgence d’appliquer un salaire minimum digne au niveau fédéral.

En France, les salariés de Mac Do n’ont pas de meilleur salaire que leurs collègues américains. 1380 restaurants Mac Donald’s, 70 000 salariés, 80 % des contrats sont des CDI d’au moins 22 h. La firme transnationale sait très bien contourner le droit du travail, éviter tout comité central d’entreprise, et même au niveau de ses restaurants d’en moyenne 54 personnes – qui dégagent pourtant des bénéfices records en métropole. Mac Do lutte ces dernières années pour redorer son image : sauront-ils la préserver en refusant si les salariés français se mettaient, eux aussi, à réclamer 15 euros par heure ?

 

Gérard Filoche (merci à Germain Filoche)

 

 

 

11 Commentaires

  1. Posted 21 octobre 2016 at 12:45 | Permalien

    Bonjour à tous,
    En complément de ce qu’a écrit notre camarade Gérard Filoche, je vous invite à lire l’article intitulé « Aux Etats-Unis, derrière la bataille des salaires, transformer le secteur de la restauration », disponible à l’adresse suivante : http://terrainsdeluttes.ouvaton.org/?p=5996
    Solidairement.

  2. 1956
    Posted 21 octobre 2016 at 14:52 | Permalien

    Hollande aurait il revendu le discours du Bourget à Clinton, candidate qui a le soutient de Juppé…?
    Seule la foi permet de croire.

  3. Posted 21 octobre 2016 at 15:14 | Permalien

    c’est sur que Clinton a concédé les 15 dollars de l’heure au mouvement de la restauration et à Sanders
    comme Merkel avait concédé le smic allemand au SPD,
    bon, on sait, mais il est normal de se servir de tout ce qui permet d’avancer, des idées aux actes

  4. Greg
    Posted 21 octobre 2016 at 16:56 | Permalien

    Espérons que la victoire des salariés américains traverse l’Atlantique.

    Dans un autre registre, mais pas si éloigné que ça après tout, sort au cinéma le 2 novembre prochain, le film FOOD COOP.

    Le résumé :
    En pleine crise économique, dans l’ombre de Wall Street à New York, une institution qui représente une autre tradition américaine, moins connue à l’étranger, est en pleine croissance. C’est la coopérative alimentaire de Park Slope, un supermarché autogéré où 16 000 membres travaillent 3 heures par mois pour avoir le droit d’y acheter les meilleurs produits alimentaires, pour la plupart biologiques, dans la ville de New York aux prix on ne peut moins chers.
    Inspirant autant de haine que d’enthousiasme, cette coopérative fondé en 1973 est sans doute l’expérience socialiste la plus aboutie aux Etats-Unis.

    La BA : https://vimeo.com/166388881

  5. socrate
    Posted 22 octobre 2016 at 23:04 | Permalien

    esperons que Clinton tienne mieux ses promesses que Hollande…
    j’ai des doutes
    candidate de Wall street qu’elle est….

  6. socrate
    Posted 23 octobre 2016 at 11:23 | Permalien

    la rémunération est un souci actuellement.
    Trop de salariés payés a la base quelque soit leur qualification.
    Un autre problème plus insidieux est la pression insupportable que l’on met sur ces memes salariés qui se traduisent par des problemes de santé ; burn out; voir suicide.
    Comment empecher cela dans notre société ou les inspecteurs du travail sont si rares et ou les dernieres lois votées renforcent le pouvoir de décision des patrons sur une prétendue négociation d’entreprise….
    enfin il y a l’uberisation de lma société créant des  » indépendants  » dépendant en fait d’une multinationale dominant un systéme de réservation transformant le faux indépendant en véritable salarié. Il n’est pas acceptable.

  7. Posted 23 octobre 2016 at 11:38 | Permalien

    1°) la hausse des salaires, à commencer par le smic, sera ma premiere priorité (c’est dit et redit depuis le debut dans tous nos spots http://www.filoche2017.fr)
    2°) l’uberisation est une lourde et intolérable menace mais encore seulement un mythe, 93 % des actifs sont salariés (ils peuvent re augmenter le nombre des indépendants surexploites, et baisser ainsi le taux du salariat à 92, 91, 90 % c’est grave mais pas suffisamment substantiel pour changer les conditions de la lutte de classes)

  8. socrate
    Posted 24 octobre 2016 at 0:39 | Permalien

    réponse incomplète et peu satisfaisante

    ce ne sont pas les chiffres du salariat le probleme mais l’évolution que veut mettre en place le patronat pour transformer les emplois de salariés en indépendants de style uber et cela mérite une réflexion et des décisions.
    Et le probleme sur la pression que subisse les salariés ? quid des propositions ?
    vouloir se présenter a la candidature cela mérite de rendre des réponses précises

  9. Posted 24 octobre 2016 at 7:58 | Permalien

    ça c’est un point sur lequel j’ai répondu mille fois depuis longtemps avec précision, sur les choix à faire en droit, en économie, en politique, en pratique, décisions e projets de loi inclus, vous lisez ce blog ou vous venez seulement ici ?
    défense du salariat
    interdiction d’Uber, et cie
    réglementation de toutes les sous-traitances fausses, marchandage, et des prêts illicites de main d’oeuvre,

  10. cyril
    Posted 24 octobre 2016 at 23:08 | Permalien

    C’est bien de demander un salaire décent, mais le mieux c’est sortir du capitalisme, donc du travail.

    Avoir un salaire décent tout en continuant à vendre de la merde, je ne vois pas le progrès.

    Le capitalisme nous détruit à petit feu et se moque bien des ravages aux niveaux sociaux, environnementaux.

    Ce que tous les prétendus progressistes ne comprennent absolument pas, c’est que ce système nous broient et fait de nous des mineurs. Il nous impose ses propres lois pour un seul objectif, faire plus d’argent avec de l’argent.

    Tant que les êtres humains ne comprendront pas que ce système est absurde et que nous détruisons tout pour le fétiche argent, nous ne pouvons qu’aller vers des temps encore plus pénibles qu’aujourd’hui.

    Le capitalisme est la lutte de tous contre tous pour maximiser les profits. Si vous n’ êtes pas rentables, vous êtes éjectés.

    Les 3/4 de la population mondiale sont inutiles et superflus pour ce système.

    Et je vous rappelle, M. FILOCHE, que la croissance ne reviendra pas (heureusement car c’est une catastrophe écologique) et que le capitalisme a atteint un tel degré de production qu’il détruit le trail humain productif qui seul génère de la valeur économique.

    Les services tels que MCdo et compagnie ne génèrent aucune valeur; les revenus y sont des revenus secondaires.

    Il est terminé le temps du capitalisme industriel de masse nommé fordisme. Nous ne retrouverons jamais ce compromis qui a permis aux ouvriers d’ élever leur niveau de vie.

    Aujourd’hui, la production de marchandises n’est pas rentable du fait de la dévalorisation issue de la productivité.

    Le coût de production d’une marchandise est ridicule. Cependant, cette perte de valeur ne peut être compensée par une plus grande production.

    Tout ce que nous observons aujourd’hui est la conséquence de l’absurdité structurelle du capitalisme qui a besoin de travail humain productif pour valoriser le capital, mais qui en même temps détruit ce travail par la micro-électronique, la robotisation, l’automation.

    Même en Chine, les usines Foxconn se robotisent et détruisent l’emploi des forçats de l’électronique. Cette même Chine qui ne doit sa croissance actuelle qu’ aux gigatonnes de béton pour construire des villes nouvelles et des infrastructures qui ne servent pas! La plupart de la classe moyenne chinoise vit à crédit pour consommer.

    Une autre conséquence est l’hypertrophie de l’industrie financière qui n’est pas la cause de la crise du capitalisme, mais le symptôme que c’est celui-ci qui est structurellement condamné ainsi que le travail.

    Le capitaliste n’investit que si il y a retour sur investissement donc rentabilité. Aujourd’hui, il y a très peu d’industries qui permettent cela, d’où l’industrie financière qui permet au capital de s’accroître virtuellement. Bien sûr, tout cela n’est que du fictif et ne repose sur rien.

    Une entreprise comme PSA réalise sa marge en grande partie grâce à l’industrie financière. La vente de véhicules n’est plus assez rentable.

    Dans les années 1990, Siemens était nommé comme entreprise financière avec des filiales dans l’électricité.

    Le système craque de toutes parts. Les politiques ne sont que des pantins et ne peuvent pratiquement rien faire ou alors à la marge. Leur rôle est d’essayer de gérer les nuisances et surtout de faire supporter cette déliquescence du système au plus pauvres, aux exclus, aux superflus.

    Nous sommes tous contaminés par le travail qui nous impose de trimer pour un seul objectif, valoriser l’argent.

    Pas de travail , pas de quoi se reproduire.

    Aujourd’hui, c’est une chance de pouvoir se faire exploiter, d’être aliéner à la machine.

    Pour tous les autres, il y aura la déchéance, le mépris, la montagne d ‘emmerdements pour avoir un peu de charité de la part de l’ Etat. Cette charité devant être méritées en réalisant des formations stupides et inutiles qui ne permettront jamais au perdant de trouver quelque boulot que ce soit.

    « L’ouvrier se sent auprès de soi-même seulement en dehors du travail; dans le travail, il se sent extérieur à soi-même. Il est lui-même quand il ne travaille pas et, quand il travaille, il ne se sent pas dans son propre élément. Son travail n’est pas volontaire, mais contraint, travail forcé. Il n’est donc pas la satisfaction d’un besoin, mais seulement un moyen de satisfaire des besoins en dehors du travail. Le caractère étranger du travail apparaît nettement dans le fait que, dès qu’il n’existe pas de contrainte physique ou autre, le travail est fui comme la peste ».

    Karl Marx, Manuscrits de 1844.

    Voilà ce que disait Marx il y a plus de 150 ans.

    Lui avait compris que le travail n’était as naturel à l’ être humain, que le travail est une construction sociale liée au capitalisme. Dans ce système pas d’autonomie, pas auto-détermination, pas de pourquoi on fabrique telle marchandise (que ce soit des patates ou des bombes, le seul critère c’est le temps de travail pour fabriquer cette marchandise, d’où le temps c’est de l’argent). D’ailleurs, c’est pourquoi l’ Etat finance l’armement plus que la culture, les associations. Ce qui n’est pas rentable, n’est pas financé et encore plus aujourd’hui où la dévalorisation est générale.

  11. Posted 24 octobre 2016 at 23:30 | Permalien

    après la critique du programme de Gotha et d’Erfurt ma conception va au « programme de transition »
    le syndicalisme est l’école du socialisme
    commence par demander du pain et tu couperas la tête de la reine si elle ne t’en donne pas,
    mais si tu commences par vouloir couper la tête de la reine t’auras pas de pain

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