tribune dans POLITIS : abroger les 64 ans, hausser les cotisations

La Cour des comptes, 20 février 2025, a démenti la tentative de Bayrou d’accuser nos retraites de produire un déficit de 55 milliards. Elle n’a relevé que 6 milliards de « trou ». Ce qui est peu sur un budget total de 350 milliards. Et Bayrou est mal placé pour donner des leçons de morale, de déficit et de dette au moment même où Ursula von der Leyen – cédant à Trump qui exige 5 % de dépenses de guerre par pays européen – assouplit officiellement les critères budgétaires de Maastricht en UE afin de permettre aux États membres de s’endetter davantage pour l’effort militaire. Ainsi l’argent magique est soudain découvert, déficits et dettes deviennent moins pressants, pas pour le social, pas pour nos retraites, mais pour les industries de guerre.

Notre point de vue est exactement à l’opposé : après une vie de travail difficile et longue, des centaines de milliers d’accidents du travail et de maladies professionnelles, la retraite est un droit fondamental des salariés. Il y a 13 ans d’écart de moyenne d’espérance de vie entre les plus riches et les plus pauvres. Un ouvrier vit 7 ans de moins qu’un cadre. Les femmes sont gravement lésées par le système. Le progrès social, ça consiste à permettre à tous ceux qui ont produit les richesses, de vivre cette retraite en bonne santé dans les meilleures conditions possibles.

Si on gagne plus, si on vit plus longtemps, c’est pour en profiter plus longtemps.

La retraite par répartition n’est ni un impôt ni une épargne, la solidarité intergénérationnelle s’effectue par le biais des cotisations qui sont reversées en direct, en temps réel, sous contrôle public, de ceux qui travaillent encore à ceux qui ne travaillent plus. C’est une caisse séparée de celle de l’état, et elle ne génère que 9% de la « dette » présumée alors que l’état lui-même en génère 82 %.

Ces cotisations sont du solide et de la confiance car elles s’appuient sur le travail de tous les actifs sans cesse renouvelé, elles ne sont pas à la merci des spéculations boursières privées et opaques. Rien de pire que la « capitalisation » : n’y risquez pas un sou, les fonds de pension privés ne sont pas fiables, des millions de salariés anglo-saxons ont tout perdu à ce jeu de poker, dans les bourrasques monétaires à répétition.

En 1982, il a été acquis que le droit à la retraite en France était ouvert à partir de 60 ans pour toutes et tous, et parfois avant, de façon négociée, dans les métiers les plus difficiles. Aujourd’hui la France est quatre à cinq fois plus riche, et selon les exigences d’une juste répartition des richesses produites par les salariés, ceux-ci doivent en bénéficier à tous les niveaux, dont la hausse des salaires et la baisse de la durée du travail. Il est des métiers où, comme dans le bâtiment, la retraite devrait être à 55 ans.

Sans cesse patronat et financiers veulent rogner le coût de notre travail et hausser celui du capital. Ils veulent réduire la part du PIB, 14 % consacrée aux retraites à 11%, alors que la démographie (actuellement 17 millions de retraités) impose de la faire évoluer vers 20 %. D’où une bataille incessante depuis des décennies pour reculer l’âge du droit au départ en retraite et le niveau des pensions. Ils veulent plonger la majorité des retraité(e)s dans la misère. Leur dernière offensive imposant le départ à 64 ans et visant même à baisser les pensions par désindexation sur les prix, a soulevé une opposition sans précédent : 14 manifestations unitaires, des millions de manifestants, 95% de l’opinion des actifs contre, ils n’ont pas pu la faire voter et ont dû user de scandaleux coups de force 49-3 à répétition.

Les derniers soubresauts des gouvernements Macron, Borne, Attal, Barnier, Bayrou visant à empêcher démocratie et vote, ont finalement débouché sur la mise en place d’un « conclave » soumis aux choix trop bien connus du Medef alors qu’un simple vote au Parlement, tout le monde le sait, abrogerait les 64 ans.

Ils inventent de prétendues difficultés de financement alors que chacun sait que ça dépend des salaires nets et bruts. Ajuster les cotisations pour garantir la prestation. Après des décennies de blocage, un rattrapage des salaires nets et bruts, incluant cotisations salariales et patronales est la solution directe, facile, incontournable pour financer la retraite à taux plein à l’âge choisi par la majorité du salariat.

Nous demandons le vote au parlement pour abroger les 64 ans et un financement pérenne basé sur les cotisations salariales et patronales.

Clémentine Autain Alexis Corbiére Gérard Filoche Danielle Simonnet


 

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