74e soldat français mort en Afghanistan le 14 août, 75e le 7 sept 2011 (part I)

Poursuivre la guerre un jour de plus c’est criminel, depuis 170 ans, l’Occident n’a apporté que morts et barbaries en Afghanistan

Comment Sarkozy a t il pu, en dépit de ses promesses de campagne électorale d’y mettre fin, (un mensonge de plus) doubler les effectifs militaires français en Afghanistan dans le cadre de l’OTAN ? Comment peut-il prétendre y défendre la démocratie, la civilisation ou encore le droit des femmes ? Chaque jour de cette guerre d’invasion intolérable et perdue d’avance est un jour de barbarie et de morts. Comment Sarkozy et son ministre Longuet (un « ex » du groupe « Occident vaincra ») peuvent-ils enterrer les morts avec des discours lénifiants et creux, sans s’interroger sur leurs responsabilités face à ces victimes et à leurs familles ? Mais aussi face aux victimes, aux ravages, aux crimes accumulés contre la population civile de ce lointain pays ?

Toute l’histoire, toute la réalité est là pour dire à celles et ceux qui veulent en connaître, que cette guerre doit être immédiatement stoppée.

Le territoire, connu depuis 1747 sous le nom « Afghanistan », carrefour de l’Asie, a été occupé tour à tour par les Britanniques de 1840 à 1919, l’URSS de 1979 à 1989, puis les USA depuis 2001 assistés par une coalition internationale de 49 pays dont la France.

Mais « Afghanistan » est un « terme purement poétique pour désigner diverses tribus et états, comme s’il s’agissait d’un pays réel. L’état afghan n’existe pas… » jugeaient déjà Marx et Engels dans leurs articles de 1857.  Et depuis 170 ans, les envahisseurs successifs n’ont rien apporté, ils n’ont fait que maintenir le territoire dans une situation féodale appauvrie, renforcer les seigneurs de guerre, les conflits tribaux et les extrémismes religieux.

Les envahisseurs britanniques :

La tribu majoritaire, les Pachtouns, (41 % de la population en l’an 2000) a particulièrement été victime de toutes les attaques des puissances qui cherchent à occuper ou à neutraliser son territoire : Marx et Engels montraient l’intérêt qu’avaient les colonisateurs britanniques à dominer l’Afghanistan en tant que « possession indispensable pour repousser toute force d’invasion venue d’Asie centrale et indispensable contre la Russie ». Les Britanniques jouaient déjà au XIX° siècle sur les divisions et guerres entre Mahométans et Hindous, tribu contre tribu, caste contre caste, et tandis que « tous luttaient contre tous » les soldats et les hommes d’affaires britanniques progressaient.

Cela n’empêcha pas la toute-puissante armée britannique d’être complètement surprise et anéantie (16 000 soldats tués) en novembre 1841 et en janvier 1842 à Gandamak par l’insurrection d’une coalition de ces « tribus » arriérées qu’elle méprisait. Ce fut la défaite historique la plus sévère enregistrée par la Grande-Bretagne coloniale, il n’y eut qu’un seul survivant du corps expéditionnaire. Il fallut trois autres expéditions coloniales aux Britanniques pour se réinstaller partiellement : ils divisèrent le pays avec une frontière artificielle, ligne droite qui sépare encore l’Afghanistan du Pakistan, et du même coup, divise les pachtounes entre eux : elle s’appelle la « ligne Durand » du nom de l’officier britannique Mortimer Durand qui fut chargé de délimiter, en 1892, l’Empire des Indes de son « garde-frontière », l’Afghanistan. Le territoire Pachtoune stupidement partagé, empêchant l’accès à la mer d’Oman, entre Kaboul et, Islamabad reste toujours incontrôlé. (Lire les écrits de Marx et Engels sur l’Afghanistan 1857 et la post-face de Gérard Filoche aux Ed. Mille et une nuits, Fayard, fin 2001)

Les envahisseurs russes :
Les forces de l’armée rouge russe envahirent l’Afghanistan le 25 décembre 1979. Ils prirent le contrôle de la ville Kâbul et des centres importants. Les Russes exécutèrent le président Haffizullah Amin et instaurèrent Babrak Karmal comme président du pays. Ils imposèrent même dans un premier temps des réformes plutôt progressistes (athéisme d’état, alphabétisation, droit des femmes, réformes agraires…) mais forcées : or aucune armée étrangère d’invasion ne pouvait changer les moeurs de ce pays par la force.

Il y eut à nouveau une vive résistance territoriale, un soulèvement, une puissante guérilla victorieuse des moudjahiddines et seigneurs de guerres, d’Al-Quaida et des talibans. Ces derniers armés par les USA et l’Arabie saoudite, grâce à l’argent de l’opium, réussirent à mettre en échec la toute-puissante armée soviétique. Au milieu des eighties, les États-Unis dépensèrent des centaines de millions de dollars par an (au total 3,3 milliards de dollars et l’Arabie saoudite autant) pour subventionner la guérilla et, en son sein, des hommes comme Ben Laden. En 1986, 118 000 soldats soviétiques et 50 000 Afghans menaient la guerre contre 130 000 rebelles. Bien que les troupes russes aient de l’équipement moderne (hélicoptères, tanks et bombardiers), les rebelles furent armés de missiles « stinger » américains, ils avaient un fort soutien local et opéraient avec efficacité dans leur terrain montagneux.  L’effet de la guerre sur l’Afghanistan fut désastreux, la moitié de la population fut déplacée dans le pays, obligée d’émigrer, blessée ou tuée. Au total, en 110 mois de présence militaire, 900 000 Soviétiques servirent en Afghanistan. 800 hélicoptères et avions, 1 500 blindés et plusieurs milliers de véhicules ont été détruits. Le coût financier pour l’URSS fut estimé entre 2 et 3 milliards de dollars américains par an. Les pertes humaines soviétiques ont été de 11 897 morts au combat, 2 556 morts de maladie où par accident * 53 753 blessés au combat ou par accident dont la moyenne de « pertes » par mois était de 4 366 en comptant les malades dont 126 morts. Les pertes afghanes (tous bords confondus) sont estimées à 1 242 000 morts dont 80 % de civils. On estime que 30 % de la population avait quitté le pays ou s’était déplacée à l’intérieur des frontières. Ce qui existait comme agriculture (production fruitière notamment) fut abîmé, le système scolaire était en ruine, l’industrialisation était nulle et les projets d’irrigations endommagés. La retraite russe fut complète en février 1989.

Avec 30 millions d’habitants en 2011, une superficie de 652 230 km², 181° pays au classement de l’indice de développement humain sur 192, 68 % d’analphabètes (seulement 43 % des hommes et 12,6 % des femmes de plus de 15 ans savent lire et écrire) avec 85 % des Afghans qui sont des paysans, avec l’accroissement manipulé des conflits tribaux et religieux, ces multiples guerres de 1840 à 1990, britanniques et russes n’ont apporté que du malheur.

Les nouveaux envahisseurs US, de l’OTAN, de la FIAS :

Il en est de même de la guerre décidée unilatéralement par Georges W Bush, le même qui envahit, détruisit, ruina l’Irak à partir d’un ignoble mensonge délibérément fabriqué sur l’existence de « prétendues armes de destruction massive »

18 des 20 terroristes qui avaient détruit les Twin Towers étaient saoudiens et pas afghans.Le Mollah Omar fut chassé du pouvoir dés 2001.  Ben Laden fut retrouvé et abattu au Pakistan, pas en Afghanistan   Mais en 10 ans, de 2001 à 2011, après la destruction de l’Irak qui a fait revenir ce pays des décennies en arrière, c’est en Afghanistan qu’une incroyable et terrible guerre menée par les pays les plus riches du monde contre l’un des pays les plus pauvres et les plus arriérés se poursuit.

Le bilan de cette guerre « contre le terrorisme » engagée dés septembre 2001 est tout aussi sinistre que l’attentat du 11 septembre contre les Twin towers qui lui a servi de prétexte. La destruction du World Trade Center à Manhattan avait provoqué 3 234 morts. Deux mois plus tard, le 11 décembre 2001, les bombardements US et britanniques avaient provoqué 3 767 victimes également innocentes dans la population civile afghane.  D’après l’ONU, il faut rajouter entre 6 300 et 23 600 civils morts directement, ou indirectement, du fait de la guerre entre 2001 et 2003.

L’attaque initiale de 2001 chassa les Talibans du pouvoir, instaurant un gouvernement provisoire dirigé par Hamid Karzaï à la suite des accords de Bonn de décembre 2001. Mais les talibans se réorganisèrent et obtinrent un appui suffisant dans la population pour engager une nouvelle guérilla contre la Force internationale d’assistance et de sécurité (FIAS composée de 49 pays) qui regroupe les forces armées sous commandement de l’OTAN.

2006 : la contre-offensive des insurgés afghans

En dépit de tout, et comme dans les années 1840 et 1980, en 2006, les forces armées afghanes sont redevenues très actives et n’ont cessé, de l’avis de l’Etat major US lui-même, de progresser.

Les chiffres sont soumis à vérification. Mais toutes les sources convergent :  il a été révélé qu’en Afghanistan, le nombre de civils tués en 2006 aurait été de 9 759, dont 6 269 tués par les forces anti-gouvernementales, et 2 723 par la coalition ou les soldats de l’armée régulière,

En 2006, le nombre de victimes afghanes de la guerre est en nette progression de l’avis de tous les observateurs : en 2009, entre janvier et août, la « coalition » comptabilisait 1 285 tués (dont 766 Américains) depuis le début des opérations en septembre 2001. La plupart de ces victimes dont dues à des engins explosifs improvisés ; ce nombre serait de 2 237 soldats morts en janvier 2011.  Les pertes civiles sont difficiles à estimer car la FIAS ne les comptabilise pas ; mais les divers rapports font état de plus de 14 000 morts, inclus les forces de polices et milices. Les pertes du côté des talibans sont plus élevées, bien qu’aucun rapport n’apporte de données vérifiées, il serait supérieur à 25 000 pertes depuis 2001.

En août 2008  il y avait 70 000 soldats étrangers en Afghanistan, 53 000 pour la FIAS et 17 000 pour l’Opération Enduring Freedom américaine ; en 2009 il y a 113 000 soldats étrangers, dont 71 000 américains déployés dans le pays ; ces chiffres n’incluent pas les mercenaires (20 000 en 2007, 28 000 en mars 2008) des sociétés militaires privées (firmes britannique Saladin et Américaine Blackwater).   La prétendue double « guerre contre le terrorisme » lancée par George W Bush en dix ans, en Irak et en Afghanistan, a coûté 1 283 milliards de dollars, et fait entre 227 000 et 300 000 morts, au moins, dont près de 120 000 civils, soit 51 % des pertes recensées à travers ses  trois programmes principaux : l’opération Enduring Freedom en Afghanistan, l’opération Iraqi Freedom en Irak et l’opération Noble Eagle visant à renforcer la sécurité des bases militaires.

De 2006 à 2010  les « insurgés » afghans progressent

Le 13 juin 2008, la guérilla afghane force la prison de Sarposa et libère près de 1 200 détenus dont 400 liés aux Talibans. Ils infligent des revers aux armées américaines (bataille de Wanat le 13 juillet 2008) et française (embuscade de Surobi le 18 août 2008). Les policiers et l’armée afghanes sont aussi durement éprouvés par les attaques de la guérilla et fortement infiltrés. Vers la fin 2009, une série d’attaques dans la province du Nouristan culminent le 3 octobre lors de la bataille de Kamdesh et obligent même le général McChrystal à prescrire l’abandon des principales bases de la province les jugeant difficilement défendables pendant l’hiver faute de soutien d’artillerie. Pour la première fois depuis 2001, les Talibans peuvent exercer leur contrôle sur une province.

En janvier 2009, « International Council on Security and Development » estime que les Talibans étaient actifs dans environ 72 % du territoire afghan.

Le « sursaut » US d’Irak vers l’Afghanistan

Le site National priorities estime à plus de 437 milliards de dollars le coût de la guerre.  En octobre 2010, les effectifs de l’armée afghane sont portés à 140 000 personnes, vers juin 2011, l’armée afghane compte 171 600 militaires et ses effectifs devraient atteindre 240 000 personnes. La police afghane comprend, en octobre 2010, 109 000 policiers.

Le désengagement irakien des US se répercute largement dans leur budget militaire afghan : il passe de 142,1 milliards à 95,5 milliards de dollars entre 2008 et 2009. C’est en 2010 que le budget alloué à la guerre en Afghanistan dépasse le budget pour l’Irak.

En cumulé depuis le début de chaque conflit, l’Irak a coûté 806 milliards de dollars, soit 63 % du total, contre 444 milliards pour l’Afghanistan, 35 % du total.

En 2007, Georges W. Bush lance le “surge“, augmentation massive des troupes qui passent de  132 000 en janvier 2007 à 170 000 en novembre suivant. Entre l’Irak et l’Afghanistan, les  États-Unis mobilisent alors 195 000 hommes, un maximum qui sera ré-atteint en août 2009.   Promesse de sa campagne électorale, Barak Obama annonce le retrait des troupes d’Irak Entre avril 2009 et septembre 2010, les troupes engagées passent de 39 000 à 98 000, soit 2,5 fois plus. En juin 2009, la situation s’inverse donc : les troupes déployées en Afghanistan deviennent plus nombreuses que les troupes au sol en Irak, conséquence du “surge” afghan et du retrait irakien.

Malgré ce déploiement de fonds et de forces qui deviennent supérieures à ce qui existait en Irak aux pires moments de la guerre d’invasion, 2010 est pourtant l’année la plus meurtrière, les violences en Afghanistan atteignent un niveau sans précédent depuis le renversement des talibans, fin 2001. Dans tous les camps, le nombre de victimes augmente et les civils, pris au milieu des tirs, sont particulièrement touchés.

En juin 2010, le Pentagone avoue que les insurgés talibans « contrôlaient en partie le sud, le centre et le nord du pays ».

Le 17 juillet 2010, les États-Unis se déclarent officiellement prêts à négocier avec les talibans, un cadre de la Maison Blanche reconnaît : « la solution militaire n’existe plus ».  Et ils négocient unilatéralement avec ceux qui, il est vrai, étaient leurs anciens alliés.  Lors du Sommet de l’OTAN de Lisbonne du 19 au 20 novembre 2010, les 49 États membres de la FIAS ont reconnu leur défaite et ont annoncé le transfert de la sécurité aux forces afghanes à partir de 2011.

Le « moral » est  tel, du côté de la FIAS qu’il se révèle que des unités militaires italiennes « payaient » les talibans pour ne pas combattre. La révélation ne fait pas scandale parce que des services américains reconnaissent « payer » aussi. Les soldats de la FIAS deviennent « bunkerisés » et s’enterrent dans leurs casernes retranchées respectives au lieu de combattre, avec le souci d’éviter des combats sanglants. Dans chaque pays intervenant dans la « coalition », les opinions publiques sont majoritairement contre la guerre.

Nul ne pourra gagner en occupant l’Afghanistan ce pays sans vrai nom et sans état.  L’objectif du sommet de l’OTAN de Lisbonne est devenu un retrait de la plupart des soldats de la force internationale d’ici la fin 2014.

La guerre est perdue, chacun le sait,   Chaque mort de plus meurt pour rien.

Que fait donc la France là-dedans ?

La France est la 4° « contributrice » à cette guerre.  En mars 2002, elle se consacrait à des interventions aériennes de surveillance et n’avait que 640 soldats sur place prés de Kaboul.  En décembre 2007, 1 600 soldats français sont engagés dans les opérations militaires terrestres en Afghanistan, et au total environ 2 000 militaires y participent.

Sarkozy après avoir déclaré dans sa campagne électorale qu’il retirerait les troupes françaises d’Afghanistan et expliqué à la télévision qu’elles « ne pouvaient pas gagner parce qu’aucun pays, jamais n’a gagné en occupant un autre » … a renforcé le corps expéditionnaire :  au 1er novembre 2009 il y a 3 850 militaires participant à la FIAS.

En mars 2008, Nicolas Sarkozy promet encore à l’OTAN des renforts de quelques centaines de militaires, il en envoie 250 de plus et 150 gendarmes en mission de « formation ».

En 2011, on compte environ 4 000 hommes avec la présence de chasseurs de l’armée de l’air française et de l’aviation navale. Le coût est de 470 millions d’euros par an en 2010.

Le 31 août 2004, un premier militaire français était décédé des suites d’un accident de la route ayant eu lieu le 29 août.

Le 14 août 2011, le 74e soldat français est tué, et il y a près de 500 blessés, amputés, handicapés à vie.

Chaque année, ce nombre de tués augmente

Année             Faits de guerre  Autres      Total

2004                                         3                      3

2005                    1                   1                      2

2006                                         6                      6

2007                    2                   1                      3

2008                 10                    1                     11

2009                   6                    5                     11

2010                  14                     2                   16

2011                  17                      5                   22

Total                 56                   18                    74

À suivre :  « réfutation de toutes les justifications de Sarkozy à cette guerre. retrait immédiat des troupes (Part II)

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