Les « charges sociales » ça n’existe pas

Au boulot n°31

Pas un jour sans qu’on entende la ritournelle : les néolibéraux clament sur tous les tons qu’il faut « alléger les charges sociales » sur les salaires. Mais cela n’existe pas les « charges sociales sur les salaires » ! C’est une pure invention idéologique, ce n’est que de la propagande. Dans aucun texte de loi, on ne lit qu’il y a des « charges ».

Regardez vos feuilles de paie : ce qu’il y a, c’est un « salaire brut » en haut et un « salaire net » en bas. Expliquez-le autour de vous : dans les deux cas, c’est du « salaire ». Un « salaire net » qu’on touche et que l’on consomme tout de suite. Et un « salaire brut » constitué d’une partie de « cotisations sociales » : c’est une part de salaire socialisé, mutualisé, mise dans un pot commun et redistribuée à chacun selon ses besoins. C’est-à-dire que chacun cotise pour celui qui est dans le besoin lorsqu’il est malade, en accident du travail ou maladie professionnelle, au chômage, en charge de famille nombreuse, en difficulté de logement, ou encore en retraite. C’est un prélèvement volontaire et progressif, avec redistribution égalitaire. Les libéraux haïssent cela.

Cette part de salaire mutualisée, c’est pourtant ce qu’il y a de plus beau en France, de plus solidaire, de plus fraternel, de plus protecteur, ce n’est pas une « charge sociale » c’est du bonheur social ! Mais ils appellent cela une « charge » pour rendre confuse, et discréditer la perception de ce bonheur. Ils disent « allégeons les charges sociales » mais c’est une manipulation pour ne pas dire « allégeons les salaires bruts », « allégeons votre bonheur ».

Un salarié m’avait dit : « mon patron me licencie parce qu’il a trop de charges ». J’en aurai pleuré. Croyait-il que son salaire était trop élevé ? Nul ne lui avait expliqué que son « brut » était du salaire indirect ou différé ? Même s’il ne le touchait pas tout de suite, c’était encore plus précieux : sa vie en dépendrait tôt ou tard. Demain à l’hôpital. Demain au chômage. Demain en retraite. Par exemple, le système de retraite par répartition, ce n’est pas une épargne (ouf, car sinon nos retraites seraient parties avec Madoff ou Lehmann-Brothers ) mais c’est une part de salaire versée en temps réel par ceux qui travaillent chaque mois pour assurer la retraite des aînés. En temps de crise, c’est ce salaire mutualisé qui résiste le mieux, cent mille fois plus que les fonds des assurances et des banksters. Mais c’est précisément ces cotisations-là que Sarkozy s’acharne à bloquer, que Copé veut supprimer et remplacer par une « TVA sociale » que chacun de vous paiera au lieu que ce soit votre employeur qui la paie ! C’est le coût du capital qui est trop cher, le coût du travail n’est pas trop élevé, au contraire, il faut hausser massivement les salaires (le Smic à 1600 euros) et c’est ainsi qu’on remplira les caisses socialisées de la protection sociale en diminuant les surprofits. Ce sera bon pour tous.

Gérard Filoche

16 Commentaires

  1. Lilas Berrie
    Posted 25 octobre 2011 at 9:13 | Permalien

    Le problème avec l’Europe libérale en place actuellement c’est qu’elle veut encore faire baisser le coût du travail, ou du moins le contenir, et que Hollande marche dans ce principe.
    A propos de la « dette », pourquoi ne pas forcer le Luxembourg et tous les autres paradis fiscaux européens à rendre l’argent détourné des recettes publiques. Ce sont les gens qui planquent leurs sous dans ces paradis, les délinquants sociaux.

  2. SINTE Michel
    Posted 25 octobre 2011 at 9:39 | Permalien

    En plus,il y a la part que paye le patron pour son travailleur mais ça ,finalement ,c’est le client qui la paye puisqu’elle lui est facturée

  3. Jean-Edouard
    Posted 25 octobre 2011 at 11:06 | Permalien

    Bonjour,

    Quand ils parlent des « charges », « vos neolibéraux » n’évoquent pas les cotisations sociales salariales mais bien les cotisations sociales patronales.

    Or, ces cotisations patronales n’apparaissent pas, contrairement à votre exposé, dans le salaire brut, elles s’y ajoutent !

    En effet, pour 100 € de salaire brut, l’entreprise verse environ 45 à 50 € de cotisations sociales (soit un total de 145 à 150 € et le salarié perçoit entre 75 et 80 € de salaire net après versement des cotisations salariales et avant impôt).

    Dans une certaine « logique », moins il y a de contributions patronales, plus il y a de moyens pour l’entreprise d’investir(R & D,achat de matériel, voire embauche …)et/ ou d’augmenter le salaire brut de ses salariés(… non ?).

    Certes, dans une certaine vision anticapitaliste, on peut imaginer que pour TOUS les chefs d’entreprise, il n’y a qu’un but « court termiste » à la baisse des contributions patronales, c’est de faire des économies pour augmenter le montant des dividendes à redistribuer.

    PS : je vous ai écouté ce matin sur France Inter. J’aime votre verve, votre dynamisme et vos argumentations … c’est pourquoi je voulais, par ce commentaire apporter ma contribution !

  4. MaNat
    Posted 25 octobre 2011 at 17:55 | Permalien

    @Jean-Edouard: le salaire différé comprends bien sûr l’ensemble des cotisations sociales, patronales + salariales.

    Pourquoi est-ce ainsi? Un exemple: les accidents du travail doivent être entièrement de la responsabilité de l’employeur et pas du salarié, donc les cotisations correspondantes sont dans la colonne « cotisations patronales ».

    Pour reprendre vos mots, dans une certaine «logique», moins le salarié est payé (en direct ou en différé), plus il y a de moyens pour l’entreprise d’investir…

  5. loulou 76
    Posted 25 octobre 2011 at 19:52 | Permalien

    mr filloche ,comme vous j’ai eu des responsabilites syndicales et mémes trés importante(secrétaire genérl d’ud) pourquoi ne prenez vous pas la revendication de la cgt à savoir un smig à 1700 euros.méme le front de gauche le dit,1700 euros!

  6. JEAN-EDOUARD
    Posted 27 octobre 2011 at 11:40 | Permalien

    A l’attention de MANAT : ce que vous écrivez ne contredit pas mes propos et je suis bien d’accord sur la notion de salaire différé. J’insistais simplement sur le fait que les cotisations sociales patronales n’apparaissaient pas dans le salaire brut et je n’en démords pas !

    Il n’en reste pas moins que les cotisations sociales patronales restent effectivement du salaire différé (ou périphérique)dont certains voudraient faire l’économie, ce qui n’est pas forcément ma position, à la seule condition que ces contributions répondent UNIQUEMENT à financer les régimes sociaux !

  7. toto
    Posted 7 novembre 2011 at 17:39 | Permalien

    A tous et à Mr Filoche,un cours sur l’incidence fiscale :

    http://www.ecopublix.eu/2007/11/qui-paie-vraiment-les-cotisations.html

    le premier principe de l’incidence fiscale
    http://www.ecopublix.eu/2007/09/qui-paie-les-impts.html#regle1

    le second principe de l’incidence fiscale
    http://www.ecopublix.eu/2007/09/qui-paie-les-impts.html#regle2

    Bonne lecture et bonne méditation

  8. économie réelle
    Posted 7 novembre 2011 at 18:22 | Permalien

    Cotisation sociale = prélèvement volontaire ? Alors je peux très bien choisir de ne pas les payer… Ah ben non ! Qu’elles nous soient profitable, soit. Ne mélangeons pas tous les concepts: bonheur, volonté, solidarité, etc…

    Augmenter le SMIC pour condamner une fraction toujours plus large du salariat au chômage et à la précarité ? Les jeunes et les femmes vous remercient. En France, il y a un problème de compétitivité des bas salaires, les augmenter c’est renforcer la segmentation sur le marché du travail. Il faut une vraie politique de formation et d’amélioration de la productivité sur les bas salaires.

  9. Zbigniew
    Posted 22 novembre 2013 at 19:44 | Permalien

    Du salaire différé !!
    Quelle connerie !
    Faut être de gauche et ne jamais avoir mis les pieds dans une entreprise pour écrire des conneries pareilles.
    Dites au gars qui se fait sucrer 40% sur son salaire brut que c’est un salaire qu’il touche lmais de façon différé c’est à dire pas lui pour l’assistanat
    Idme pour la part de l’entreprise

  10. Posted 22 novembre 2013 at 22:35 | Permalien

    du salaire, pas différe ! par exemple la retraite c’est du salaire en temps réel, en direct, du salarié au retraité,
    ca ne passe pas par les fonds de pension, la retraite n’est pas une épargne,

  11. Pierre-Mat
    Posted 18 mars 2014 at 10:33 | Permalien

    M. Filoche,
    Merci beaucoup pour cet article en particulier, et pour votre travail d’information en général.

    J’avais lu votre article en 2011, et depuis je suis resté attentif sur ces questions de vocabulaire.
    Quelle ne fut donc pas ma surprise en découvrant récemment la feuille de paye d’une amie fonctionnaire (publique d’Etat). En effet, on y découvre, très visiblement, un « TOTAL CHARGES PATRONALES », tout comme sur cet exemple glané au hasard sur internet :
    http://www-lagis.univ-lille1.fr/~vieren/fiche_paye_03-12.jpg

    Est-ce à dire que c’est toute l’administration publique qui s’est donc convertie au langage libéral à la mode ???

    Amicalement.

  12. Posted 6 juillet 2015 at 17:06 | Permalien

    En l’état actuel du droit on ne peut comparer les salaires que lorsque les salariés dépendent juridiquement du même employeur. Résultat, les employeurs qui avaient des productions intégrées scindent en trois entités juridiques distinctes leur établissement au nom du « recentrage sur le coeur de métier ».

  13. Louis
    Posted 19 décembre 2015 at 0:03 | Permalien

    Je propose de donner aux salariés leur salaire complet et de payer eux-mêmes leurs cotisations sociales. Ils se rendront compte du coût réel de notre modèle de SS.
    Ceci me parait plus honnête que de cacher une part des cotisations sous le terme « cotisations patronales ». En effet, l’origine de cette cotisation est un être humain qui travaille. Si il ne travaille pas, il n’y a pas de cotisations patronales.

    Comment expliquez vous à des gérants de SARL qui se lancent que les 2000 euros (de cotisations sociales minimales) ne sont pas des charges. De surcroit lorsque l’entreprise ne fait pas de chiffre d’affaire. Est-ce qu’on encourage l’initiative et l’emploi. Est-ce que c’est normal qu’un mec qui se plante doivent payer autant de cotisations sociales?

    J’espère que mon commentaire sera publié. Je veux juste introduire du débat. Les entrepreneurs ne sont pas tous des patrons du CAC 40 super riches. La plupart sont des êtres humains qui travaillent beaucoup et qui voient les fruits de leur travail se dilapider dans un système syndical opaque.

    Une dernière question, comment expliquez vous les salaires à 6 chiffres des dirigeants d’organisme de SS. Sont ils vraiment de bons samaritain?

    Cordialement.

  14. Posted 19 décembre 2015 at 9:46 | Permalien

    c’est ca tu propose detruire 170 ans de luttes pour conquerir le droit de vivre et de se payer la reproduction de sa force de travail de façon mutualisée
    d’accord, mais paies toi ton cancer tout seul

    quant aux gerants et independants, rappelles toi que ce fut un choix historique de leur part de refuser de cotiser a la secu, ils etaient 45 % des actifs ils ne sont plus que 7 % des actifs… les salaréis étaient 55 % des actifs, ils sont 93 % des actifs,

    renoncez donc au RSI, reclamez la cotisation a la secu, on vous soutiendra ! une seule cotisation pour tous

    stop au millefeuille, stop aux complementaires, assurances, prevoyances, mutuelles, tous a la secu

  15. Posted 14 septembre 2016 at 8:41 | Permalien

    Bonjour Gérard
    Pourquoi passer sous silence les cotisations dites employeur ? Cela permet d’avoir un descriptif complet de ce qu’est un salaire .

    salaire net + cotisation salariale + cotisation patronale = salaire total .

    Pour un smic sans aide de la communauté en gros cela donne :

    1100 euros + 300 euros + 600 euros= 2000 euros

    Les cotisations sociales dites du salarié et celles dites du patron constituent l’entièreté du salaire socialisé . Tout cela étant avec le salaire net , le fruit du travail du salarié on est bien d’accord !

    Solidairement et , Fraternellement

    GEORGES

  16. Posted 14 septembre 2016 at 22:32 | Permalien

    bah oui !

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