Mon intervention au BN du PS mardi 25 juin : pas de réduction du chômage de masse sans réduction du temps de travail

Merci à Michel Sapin de son exposé sur toutes ces initiatives (emploi d’avenir, contrat de génération, emplois aidés…) pour contenir, endiguer, la montée du chômage. La question de l’emploi est assurément au centre de tout. On comprend l’importance en ce sens du second sommet social pour inverser la courbe du chômage, on comprend le symbole politique. Même si on sait que des millions de gens seront plus sensibles au nombre de chômeurs rencontrés autour d’eux, au vécu, qu’à un chiffre symbolique.

Je suggère cependant une autre initiative, qui est de traquer mieux le travail dissimulé, car les employeurs fraudent de plus en plus sur les heures supplémentaires, et il y en a probablement un milliard soit l’équivalent de 600 000 emplois, ce qui est énorme. Pour régler cela, il faudrait doubler les effectifs des sections de l’inspection du travail, d’une inspection en capacité d’agir en sections territoriales, généralistes, indépendantes… appliquer un code du travail plus rigoureux, et non pas plus flexible.

Je le dis aussi, je ne crois pas qu’il y ait 200 à 300 000 emplois non pourvus, il est vrai que tu viens d’écarter l’idée qu’il y en ait 400 ou 500 000… François Hollande, notre président – que j’aime ! – s’est trompé là dessus.. Ce n’est pas là qu’il faut chercher !

Et si toutes les mesures d’emplois aidés, freinent le chômage, elles ne suffisent évidemment pas, c’est un simple antalgique, ça ne traite pas le mal, le cancer…

Le chômage de masse c’est 4,7 millions toutes catégories confondues, plus les précaires, plus des centaines de milliers rayés des listes, 5,2 millions… Ca ronge en profondeur toute notre société. Et ce chômage de masse qui augmente de 1300 chaque jour, nous fait reculer, comme prévisible, d’élection en élection. Et cela nous sanctionnera gravement encore bien plus qu’à Villeneuve sur Lot.

C’est impossible de faire reculer ce chiffre record de 5,2 millions de chômeurs réels, sans croissance bien sur. Mais aussi sans réduction du temps de travail, il n’y aura pas de recul du chômage de masse.

Dans notre parti, le parti des 35 h, on sait ca : Lionel Jospin avait bénéficié de croissance, mais s’il a fait reculer le chômage, à l’époque davantage qu’ailleurs, c’est grâce aux 35 h. Elles ont crée de 350 à 400 000 emplois, même François Fillon avait retenu ce chiffre. Et si on n’avait pas les 35 h on aurait aujourd’hui 400 000 chômeurs de plus.

Les libéraux disent : « C’est le travail qui crée le travail », mais en vérité, Sarkozy avait organisé le chômage partiel, et multiplié les sans-travail. Il avait financé le « travailler moins et gagner moins ». Alors que les salaires sont si bas, trop bas, qu’il y a gel des points d’indice de la fonction publique, blocage du smic de façon insupportable.

Les libéraux disent qu’on ne peut pas partager le travail. Mais c’est une grosse bêtise. Bien sur que le travail est partagé, partout, dans toutes les sociétés, tout le temps, forcément. Soit il est partagé, férocement, violemment entre surtravail sous travail et sans travail, soit il est partagé démocratiquement, socialement par le code du travail, les durées légales, les durées maxima, et cela doit être notre choix.

Quand j’entends Marisol Touraine parler de « travailler plus longtemps parce qu’on vit plus longtemps », je me dis qu’elle ne combat pas le chômage de masse. Ca n’a pas de sens, si on vit plus longtemps, c’est pour en profiter plus longtemps. Va t’on faire travailler les femmes plus longtemps parce qu’elles vivent plus longtemps ? Il faut travailler mieux, moins, tous. C’est ce qu’on a fait pendant 70 ans de 1936 à 2002 : on a produit davantage, on a créé davantage d’emplois, on a gagné plus et on a travaillé moins.

Ces 4 choses, on les a faites en même temps. Et c’est comme ça qu’on est passé de 9 millions de salariés en 1936 à 17 millions de salariés en 2002.

Je me dis que Marisol Touraine rame contre l’inversion de la courbe du chômage, car à faire travailler plus longtemps les seniors on aura forcément moins de boulot chez les jeunes.

Le PS, parti des 35 h ne serait pas cohérent à faire la retraite à 65 ans. Quelle cohérence y a t il à réduire la durée du travail sur la semaine, si c’est pour l’augmenter sur la vie ?

Déjà les durées réelles ne sont plus la durée légale, elles sont proches en réalité de 41h/42h comment cela se justifie quand on a 5 millions de chômeurs ? Il faut rapprocher la durée réelle de la durée légale. Il faut même aller vers les 32h, je le dis, en voyant ici aussi Pierre Larouturou.

Quand on parle de 44 annuités cotisées, cela heurte la politique de lutte contre le chômage et contredit tous les efforts consentis par ailleurs. 44 annuités, alors que, dans la vie réelle, les annuités cotisées au travail reculent, 40 % des gens subissent déjà une décote à l’âge de la retraite, et sur les 60 %, il y en a, combien, 2 sur 3, qui atteignent la retraite en étant inaptes, licenciés, chômeurs.

Reculez l’âge de départ en retraite ou allongez le nombre d’annuités exigées sur le papier et vous allongez du même coup, le nombre de chômeurs…

La gauche a été élue pour défendre les retraites, pas pour les attaquer. Et, non seulement l’attaque contre nos retraites nous nuirait terriblement dans notre électorat, mais elle contredirait nos efforts anti chômage. Cela se traduirait par une baisse du niveau des retraites déjà trop basses, comme le sont les salaires, et pas par une progression de l’emploi comme le souhaitait Michel Sapin, à l’instant, dans son exposé.