Loi Macron : le délit d’entrave moins sanctionnable

Est-ce si choquant qu’un patron qui fait entrave aux lois d’ordre public social concernant l’instauration et le fonctionnement des institutions représentatives du personnel, (comité  d’entreprise, délégués du personnel…) soit punissable de peines de prison ? Cette peine figurait dans le Code du travail.

Non seulement la loi Macron veut la supprimer, mais de façon générale, elle veut casser, en même temps que l’inspection du travail,  ce qu’on appelle « le droit pénal du travail », (et le remplacer par des sanctions administratives, aléatoires, négociées sous forme de « ‘plaider coupable », sans juges…)

En fait, les juges n’ont jamais prononcé de peine de prison pour délit d’entrave. ( La dernière fois qu’on a vu un patron les menottes aux poignets pour faute inexcusable, n’était-ce pas en 1973, avec le juge de Charette, et depuis, jamais…  Les patrons Lombard et Richard de France Télécom, poursuivis pour « faute inexcusable » ne sont toujours pas, après plus de 75 suicides, jugés..).  Mais la menace existait quand même – au moins dans les textes de loi.

En mai 2010 deux dirigeants de l’usine Molex, appartenant à un groupe américain, avaient été condamnés à six mois de prison avec sursis par le tribunal correctionnel de Toulouse pour ne pas avoir informé les représentants du personnel avant d’annoncer la fermeture de l’usine.

Certains grands patrons étrangers auraient dit leur inquiétude face à ce risque pénal, exceptionnel et si peu appliqué. Leurs avocats auraient souvent agité ce chiffon rouge, prétendent certains, leur conseillant la plus grande prudence et les mettant en garde contre « la tentative de délit d’entrave ». Evidemment on nous raconte, sans preuve, non pas que cela aurait dissuadé certaines entreprises de violer nos droits républicains, mais que cela les aurait empêchées de s’installer en France.

Aussi, le président de la République lui-même a t il annoncé que cet article du droit pénal du travail serait annulé. « Les peines pénales associées au délit d’entrave, qui parfois même pouvaient être des peines de prisons qui n’étaient bien sûr jamais prononcées mais qui néanmoins pouvaient inquiéter, seront remplacées par des sanctions financières, et c’est mieux qu’il en soit ainsi« , a déclaré François Hollande lors du deuxième « conseil stratégique de l’attractivité » ouvert aux patrons étrangers qui s’est tenu le dimanche 19 octobre à l’Elysée.

Alors la loi Macron s’exécute et supprime cette menace. Les actionnaires et employeurs qui violeront les droits des salariés, CE, DP, ne seront plus menacés de peines de prison comme c’était le cas depuis 1945.

En contrepartie de la suppression de cette peine, le ministre du Travail envisage que les contraventions, aille au-delà des modestes 3.750 euros actuels. Mais quel niveau d’amende sera assez dissuasif envers des actionnaires milliardaires lointains pour leur faire respecter notre droit du travail ?

Poser la question c’est y répondre : si la menace de prison n’était qu’un chiffon rouge, l’amende les fera rire. Une fois de plus, on est loin du François Hollande au Bourget, menaçant la délinquance financière : “La République vous rattrapera”. Au moment de prendre leur décision de fermer, pour causes boursières, des entreprises, rien ne sera plus capable, même à l’état de menace, d’empêcher les spéculateurs de ne pas consulter les salariés.

C’est une loi qui insécurise les délégués et représentants du personnel et rassure les patrons sur leurs pleins pouvoirs dans le champ clos de leur entreprise.

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