Intervention au BN du PS du 31 mars 2015 à propos des résultats des élections départementales

J’ai bien entendu les analyses détaillées des résultats. Nous en débattons tous en détail depuis deux jours.

Comment dire ?  Comme disait l’autre, JP Raffarin ? Ah oui : « La pente est raide ». Elle est même implacable. 14 partielles et quatre élections nationales perdues ! On a perdu dramatiquement les municipales, Le Pen a été devant nous au européennes, on a perdu les sénatoriales, et, donc, les départementales.

Pendant dix ans pourtant la gauche était devenue totalement majoritaire en France, Comme ce ne fut jamais le cas auparavant. Les électeurs nous avaient donné de 2004 à 2012, 20 régions sur 22, 2 villes sur 3, 61 départements sur 100, la majorité absolue à Assemblée nationale, pour la première fois en 200 ans, un Sénat à gauche, et la Présidence ! C’était un mouvement de fond, pas un accident superficiel. Même après le 21 avril, 2002 où tout le monde s’effrayait à juste titre de la présence de Le Pen au second tour, c’est la gauche qui s’est imposée partout de 2002 à 2012.

En fait, François Mitterrand avait raison : en 1981, c’était la majorité sociologique qui s’était imposée, le salariat était devenu largement majoritaire contre les indépendants, et il avait imposé la gauche. Ce qu’on ne croyait pas possible en 1962 était arrivé, après mai 68, en 1981. 1981 était un effet différé de mai 68 et un effet direct de la majorité numérique des salariés.

En fait quand on avait connu la déroute en 1993 (55 députés de gauche), il n’y avait pas eu de retournement profond de situation : la droite avait gagné en 1993 avec moins de voix en chiffres absolus que ce qu’elle avait en 1981 quand elle avait perdu ! Ce n’était pas un retournement, c’était la gauche qui massivement s’abstenait, déçue par la politique du deuxième septennat. Et à ceux qui disaient que la France était repassée à droite, le démenti le plus formel fut adressé en novembre-décembre 1995 et le 1er juin 1997.

Ceux qui avaient annoncé la mort de la gauche et du PS en 1969, 1986, 1993, et 2002 en ont été pour leurs frais. Le poids du salariat et la défense légitime, élémentaire, de ses intérêts le poussait massivement à voter à gauche.

On dira que le score était net en mai juin 2012, 73 % des salariés votaient Hollande et à gauche. Il est net dans les derniers scrutins : 73 % des salariés s’abstiennent.

A qui « appartient » l’abstention ? À nous !

La droite UMP ou FN monte peu ou pas en chiffres absolus de voix : elle monte surtout en pourcentage, pas en voix.  Il y a peu de glissements entre la gauche et la droite, pratiquement depuis plus de 30 ans. Il y a glissement entre UMP et FN : la majorité de la gauche, elle, s’abstient.

Elle est à nous.

Il n’est pas vrai que la France se « droitise ». Ça, c’est du baratin pour nous faire de mauvaises excuses. C’est nous qui ne sommes pas à la hauteur de la France salariale de gauche, telle est la vérité !

La thèse selon laquelle, il y aurait des renversements idéologiques,  des nouvelles idéologies dominantes n’a aucune consistance. Les idéologies dominantes, certes elles dominent dans les médias depuis plus de 50 ans. Rien de nouveau là-dedans.  On sait pourquoi : tant qu’on ne s’attaque pas à ceux qui  détiennent indument et abusivement, de façon scandaleusement concentrée, les grands médias.

Mais la base sociale de résistance à ces idéologies libérales, c’est le salariat. Il est majoritaire, c’est 93 % des actifs. Même si ça embête le Medef qui clame et rêve à la fois la fin du salariat. Le salariat n’a jamais été aussi fort et nombreux. Il est « tout ». Son point commun central, générateur de ses pensées, et de ses luttes, c’est qu’il doit chaque jour vendre sa force de travail. Tout part de là. Du ventre, pas du délire. L’idéologie, ce n’est pas volatile. Ca ne vole pas dans les airs. Ce ne sont pas des mauvaises ondes qui l’emportent contre de « bonnes ». Ce n’est pas une « mode » comme les chiffons. Ce ne sont pas des cycles réversibles sans que les bases sociales aient été renversées. Ça ne s’attrape pas comme un mauvais esprit soudain devenu réactionnaire

La majorité de notre salariat votait massivement pour nous, il s’abstient massivement. Voilà ce qui se passe.

Pourquoi est-il est réduit à l’abstention ? Parce que depuis deux ans nous le décevons, nous ne faisons rien pour lui, et même notre politique lui fait du mal. Il y a 500 000 chômeurs de plus alors que nous avions promis de réduire le chômage, comme point central de notre programme. Et c’est notre politique qui augmente le chômage en laissant la bride sur le coup à la finance et au patronat pour licencier, pour « faire du fric plutôt que de l’emploi ». Pour réduire le chômage il faut augmenter les salaires  et baisser les dividendes, pas l’inverse ; ça tout le monde le sait !

Il est fidèle, notre électorat socialiste, il ne va pas voter ailleurs. D’autant plus que les divisions de la gauche le repoussent ; chaque jour, vu la politique suivie par le gouvernement Valls et Macron, la division s’accroit et devient féroce. Il y a désormais une haine à gauche contre nous : l’autre partie de la gauche nous accuse d’être de droite, à tort d’ailleurs car ainsi elle se prive d’attirer nos abstentions. Chaque fois que Jean -Luc Mélenchon tombe dans le panneau et fait des déclarations anti socialistes, il y a des dizaines de milliers de voix qu’il ne gagne pas et désespère davantage ! Il devrait le savoir, lui qui a été élevé dans l’idée de la nécessaire unité de la gauche mais il fait comme s’il avait tout oublié : il croit lui aussi à la suprématie des idéologies qui volent  dans les airs. A tort.

Notre premier ministre en faisant une campagne politique centrale nationale contre le FN n’a pas aidé dans ce scrutin :  ça fait au FN plus de pub que de mal.

Car à ce stade, on le sait, ce n’est pas la seule bataille des idées, même si elle compte, qui peut les faire reculer, c’est la réussite ou pas de notre action, conforme à notre programme. Montrons que la gauche augmente les salaires, redistribue les richesses, fait de l’emploi, contrôle les licenciements, redonne des droits matériels  aux salariés et aux chômeurs,  et le FN reculera. Des millions parmi ceux qui votent FN ne le font pas pour ce qu’il dit, souvent ignoré ou sous-estimé, mais parce que les autres partis de droite et de gauche n’ont RIEN fait pour eux ! D’où le succès de l’aberrant slogan « UMPS » !  Que la droite ne fasse rien et agisse contre le peuple, contre le salariat, même contre la partie du salariat (30%) qui vote pour elle, ce n’est pas une surprise, c’est toujours ainsi… mais que la gauche ne fasse rien et parfois fasse pire (casse du droit du travail accélérée… chômage accru, salaires bloqués),  ça c’est renversant.

Il faut quelque chose dans l’assiette des gens ! Il faut de quoi vivre décemment pour dix à vingt millions de Français qui n’ont presque rien. Arnaud et Bettencourt possèdent à eux deux, plus que 20 millions de Français. Les 500 familles possèdent 440 milliards, une fois et demi le budget de l’Etat. Des millions de gens regardent la télévision et voient ces inégalités criantes, ils les reçoivent comme des gifles ; et c’est cela qui crée incompréhension, division, haine, xénophobie, racisme, c’est matériel et social, pas volatile. Le mot « République » sans contenu social, c’est un mot vide !

On peut retrouver cet électorat, notre électorat : il est toujours là. Mais il faut faire la politique qu’il attend. Pas le contraire !

On peut refaire l’union de la gauche, mais sur une politique de gauche, pas sur une politique de droite à la Attali-Macron.

On peut sauver le quinquennat, mais il faut répondre à nos électeurs, pas les attaquer, pas leur prendre 50 milliards sur les besoins publics pour donner 41 milliards au grand patronat qui se réjouit du chômage…  qui conforte ses marges !

One Commentaire

  1. Posted 15 avril 2015 at 20:25 | Permalien

    Bonsoir à tous,
    Il semblerait que les membres du Gouvernement n’aient pas bien compris ce que leur a clairement expliqué notre camarade Gérard Filoche, car ils poursuivent inexorablement leur politique anti-sociale. En effet, suite aux oukases de Bruxelles, l’austérité va encore s’amplifier dans notre pays. Ceux d’entre vous qui voudraient en savoir plus, pourront lire l’article intitulé « Programme budgétaire, l’austérité, plus que jamais », disponible à l’adresse suivante : http://www.politis.fr/Programme-budgetaire-l-austerite,30834.html
    Solidairement.

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