Le chômage et sa courbe (4ème partie)

 

5- Les entreprises, seules, ne créent pas l’emploi

  • Pourquoi les entreprises, aujourd’hui, n’embauchent-elle qu’au compte-gouttes ?

Les entreprises licencient ou, au mieux, limitent très sévèrement leurs recrutement parce qu’elles ne savent pas si leur production trouvera un débouché. Chaque entreprise attend que les autres entreprises commencent à embaucher ou à augmenter les salaires de leur personnel, pour que son carnet de commande commence à se remplir et se mettre, elle-même, à embaucher.

Ce qui est rationnel au niveau d’une seule entreprise est parfaitement irrationnel au niveau de l’ensemble de l’économie et conduit à l’impasse dans laquelle nous sommes aujourd’hui.

Face à une telle paralysie, seul l’État peut débloquer la situation, en relançant l’investissement et  l’emploi publics, en augmentant le Smic, et en diminuant le temps de travail.

  • Le gouvernement de Manuel Valls fait exactement le contraire de ce qu’il faudrait faire, s’étonne du résultat mais n’a de cesse d’en rajouter une louche

La demande salariale est bridée par la stagnation du Smic, le refus d’augmenter la valeur du point dans la fonction publique, la stagnation des allocations sociales et des retraites, la part de plus en plus importante prise par les assurances santé complémentaires ou par l’épargne-retraite.

La demande publique est étouffée par les politiques budgétaires restrictives imposées par la Commission européenne, avec la complicité active de la plupart des gouvernements européens, le nôtre en particulier.

Les carnets de commande des entreprises ne peuvent donc pas se remplir et elles n’embauchent pas ou très peu.

  • La fameuse demande des « classes moyennes » chinoises, russes ou brésiliennes n’était qu’un mirage

Cette demande devait servir de débouchés aux entreprises françaises, dès qu’elles seraient devenues « compétitives ». Elle n’était qu’une illusion qui s’est évanouie avec la crise économique et financière qui frappe les pays émergents.

  • Les dizaines de milliards d’euros accordés au patronat par le CICE et le « pacte de responsabilité » n’atteignent aucun des objectifs annoncés

Le chômage ne cesse de croître et les investissements productifs des entreprises industrielles, après avoir diminué de 3 % en 2014, ont encore diminué de 2 % en 2015. Seules les marges bénéficiaires des entreprises (surtout les grandes) ont augmenté.

  • Dans un tel contexte, la mise en demeure de Jean-Christophe aux « cadres du Parti socialiste » semble venir de la planète Mars

La mise en demeure de Jean-Christophe Cambadélis « à tous les dirigeants » du PS de se prononcer, dès maintenant, « pour ou contre » une candidature de François Hollande en 2017, n’a pas le moindre sens.

François Hollande n’est pas candidat et on ne voit comment il pourrait l’être s’il prend au sérieux le critère qu’il a lui-même fixé dès la fin 2012. Un critère qu’il a réaffirmé lors de sa conférence de presse du 19 février : il ne sera pas candidat si le chômage ne baisse pas. Comment pourrait-il l’être alors que le nombre de chômeurs pour la France entière, catégorie A, B, C, D et E de Pôle emploi, a augmenté de 1,7 million depuis mai 2012 et que les seuls demandeurs d’emploi de la catégorie A sont 700 000 de plus qu’à son arrivée au pouvoir ?

  • L’allongement de la durée du travail contre l’emploi

Après la réforme des retraites de 2013 qui allongeait le temps de travail sur la durée de la vie, le gouvernement prétend, avec le projet de loi El Khomri, allonger la durée du travail hebdomadaire en transformant les 35 heures en passoire.

Le résultat serait couru d’avance. La loi Aubry avait permis, la création de 400 000 emplois à temps-plein, dans les deux années qui avaient suivi son adoption par le Parlement. La mise au rebut de la réduction du travail, dans l’actuel contexte de stagnation économique, provoquerait l’arrivée de beaucoup plus de 400 000 demandeurs d’emploi supplémentaires, au cours des deux prochaines années.

  • Le projet de loi El Khomri utilise le poids du chômage de masse pour faire passer les exigences du MEDEF

Malgré les affirmations de Manuel Valls, le projet de loi El Khomri n’a pas pour objectif de diminuer le chômage. Ce projet utilise, au contraire, la menace que constitue le chômage de masse pour imposer aux salariés une baisse historique de leurs droits, dans le seul but d’augmenter les profits des entreprises.

Les marges bénéficiaires des entreprises – du moins de celles qui survivront – continueront sans doute à augmenter… jusqu’à l’éclatement de la prochaine crise économique et financière à laquelle la politique de François Hollande aura apporté son inestimable contribution.

 

 

Jean Jacques chavigné

 

 

4 Commentaires

  1. MUNNIA RENE
    Posted 15 mars 2016 at 8:49 | Permalien

    Bien que retraité, je suis totalement mortifié par le projet de loi El Khomri qui confirme l’adhésion du gouvernement Hollande au modèle libéral ; mortification d’autant plus importante que des collègues ayant participé comme moi à la mise en place des 35 heures soutiennent ce projet de réforme du code du travail « qui diminuerait le chômage ». Quelle déception de constater le recul des idées progressistes !

    L’égarement ne viendrait-il pas du manque cruel d’informations sur le monde du travail : définitions des actifs, des taux d’activité et de chômage, répartitions des salariés selon leur statut et la taille des entreprises, comparatif des coûts du travail selon le statut (CDI, CDD ou Interim), proportion de salariés pauvres dans les différents pays européens, salaire moyen des dirigeants selon la taille de l’entreprise… Il me semblerait primordial que les animateurs médiatiques fassent systématiquement précéder les débats par ce type de données datées et référencées (INSEE). Comment leur faire savoir ?

    Je suis également attentif à l’argument avancé par de jeunes dirigeants de TPE et PME, favorables à ce projet de loi, qui assimilent les contrats de travail actuels à un risque économique pour leur entreprise.
    Ne peut-on envisager l’intervention de l’état pour affaiblir ce «risque » ?
    - d’une part en élargissant le rôle de Pôle Emploi avec la mise en place d’une Section de Travail Temporaire offrant du travail intérimaire concurrençant les Entreprises privées de Travail Temporaire ; ce devrait être possible quand on sait que le coût actuel du travail intérimaire est au moins de 30 % supérieur à celui d’un CDD.
    - d’autre part en renforçant la prise en charge de la gestion des ressources humaines des TPE et PME, que les dirigeants ne peuvent pas assurer.

    Qu’en pense Gérard Filoche dont les interventions nous sont si précieuses ?

  2. sans ressources
    Posted 15 mars 2016 at 10:20 | Permalien

    Ne pas oublier une attaque insidieuse à la démocratie après l’état d’urgence, une attaque déguisée à la séparation des pouvoirs, j’ai nommer l’indépendance de la justice, en effet, qu’on le veuille ou non, les Prud’hommes sont la justice, le plafonnement des indemnités est une attaque intolérable à l’indépendance du juge, à sa liberté, attention, ce n’est pas un sujet mineur, si ça passe il faudra s’attendre à d’autre agressions d’une tout autre ampleur, alors rien que pour ça, retrait total de la loi belle connerie

  3. Posted 15 mars 2016 at 19:18 | Permalien

    Bonsoir à tous,
    Le troisième numéro du bulletin Solidaires de mobilisation intitulé « La grève interprofessionnelle et nationale pour le retrait du projet de Loi Travail » est disponible à l’adresse suivante : http://www.solidaires.org/La-greve-Numero-3-15-mars-2016
    Solidairement.

  4. socrate
    Posted 17 mars 2016 at 11:39 | Permalien

    toucher a la hiérarchie des norme et inacceptable.
    rien que cela justifie le retrait de ce projet
    de loi
    comment se prétendre socialiste est aller sur le terrain pénalisant les salariés les plus faibles ?

    on en revient toujours au meme point : ceux qui se prétendent socialiste et dirigent le pays comme la droite et les autres ; divisés ; partagés entre hollandais , vallsiste ; macroniens et quelques socialistes qui ont gardé les valeurs de gauche.

    si le PS tout entier se levait pour réclamer la fin du PDL El khomeri ; demain on en parlerait plus.
    c’est donc bien avant tout un probleme politique

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