30 millions de salariés relais

Comme en Mai 68, les gardiens de musée se sont mis en grève à leur tour, bloquant l’entrée du Louvre par refus de la retraite par points qui ne « vise qu’à baisser pour tous le montant des pensions » : ils ont déclaré se faire « le relais » de la grève « des salariés d’autres secteurs ». C’est un beau « relais ». Ceux de l’Opéra de Paris ont donné des concerts publics à la Bastille, et des ballets, publics sur les marches de l’Opéra Garnier. Radio France tient une grève de 40 jours, et son orchestre a donné une prestation publique de soutien. Les avocats ont jeté leurs robes dans tous les prétoires de France,  les clercs de notaire, les pompiers ont combattu, comme les infirmiers et les kinésithérapeutes, les bibliothécaires et les égoutiers. Huit raffineries sont stoppées, et les réserves de pétrole du gouvernement ont diminué à partir du 11 décembre. Sept ports entiers sont bloqués et des secteurs comme l’aéronautique militaire de Clermont-Ferrand. Des secteurs du transport routier, de marchandises, de voyageurs interurbain, déménageurs, ambulances, transport de fonds et logistique, les personnels des autoroutes, ont participé bien que le gouvernement leur multiplie les concessions à part tout comme à la police, la gendarmerie, les militaires. Les secteurs de l’énergie-électricité ont multiplié coupures et gratuité. Les hôpitaux sont en grève larvée mais soutenue depuis plus de dix mois, avec la participation de centaines de milliers d’agents révoltés et 1200 praticiens de haut niveau ont démissionné. Les caisses de grève et les galas de soutien se développent, Les enseignants s’y sont mis avec des actions spectaculaires, y compris le début de paralysie du bac Blanquer. Nombre d’étudiants et lycéens, ont bloqué leurs établissements malgré la brutalité de la répression policière systématique. La RATP, c’est le plus grand mouvement depuis la création de l’entreprise en 1948. A l’ex SNCF, les cheminots sont des héros mais la grève n’est absolument pas réductible aux seuls blocages des transports : ses « relais » sont partout. Après les Ordonnances anti-travail de l’automne 2017, la longue mobilisation des cheminots du printemps 2018, les 15 mois de l’extraordinaire mobilisation des Gilets Jaunes (en dépit d’une répression brutale), avec décembre 2019 et janvier 2020, la lutte est devenue plus longue que Mai-juin 68.Macron se résume désormais à trois ans de paralysies successives du pays. Tout est en train de muter : nous sommes en pleine guerre sociale, de relais en relais, rien n’arrêtera plus les 30 millions de salariés. Les Gilets jaunes se sont « syndicalisés », et les syndicats se sont « gilets jaunarisés » : les luttes sont multiformes, étendues, croisées, persistantes, elles sont en train de se rendre invincibles.Gérard Filoche

 

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