Le 25 avril 1974, révolution des « oeillets » au Portugal, 25 avril 1975 : majorité PS-PCF à l’assemblée constituante

 

 

 

 

Il y a 46 ans… la grande révolution portugaise

Le 25 avril 1974, un empire colonial s’effondra, une révolution populaire abattit un des plus vieilles dictatures d’Europe, elle allait durer deux ans et transformer le Portugal.

Tout commença par une montée des luttes sociales, une déroute militaire et un éclatement de l’armée, une chanson « Grandola Vila Morena », des manifestations de masse extraordinaires, et il y eut six gouvernements provisoires entre le 25 avril 1974, le 25 avril 1975 (élection de l’assemblée constituante) et le 25 avril 1976 (élections législatives). Ce fut une période révolutionnaire intense, ou des courants radicaux s’affrontèrent dans toute le pays, et qui donna finalement le pouvoir aux organisations traditionnelles de la gauche, le PSP et le PCP.

Voici un extrait de « Mai 68 histoire sans fin » (Ed Gawsewitch, 600 p, 2008, G Filoche, 23 euros) qui raconte en partie ces grands évènements. Il s’agit d’une « mémoire » militants vue de France. Dans un autre livre malheureusement épuisé
« Printemps Portugais » (Ed. Actéon, 1984, G. Filoche 600 p) un récit et un bilan détaillé de cette révolution et de ses enseignements est tiré.

Vous trouverez ci après, un billet militant sur la célèbre chanson du 25 avril qu’on a ré entendue l’an passé, à Lisbonne.

Nous vous renvoyons au N° 212 de D&S de février pour une position de Mario Soarés (88 ans en 2014) qui a reconstitué le 31 mai 2013 à Lisbonne l’unité de la gauche (PSP, PCP, Bloc de gauche) contre l’austérité de l’actuel gouvernement de droite Passos Coelho. Il dénonce l’Europe de l’austérité et prône une révolution (pacifique) en Europe.

La révolution des œillets :
du MFA à l’Assemblée constituante

« Les vingt mois de révolution portugaise auraient dû nous immuniser contre la division PS et PC et nous apprendre concrètement l’impérieuse nécessité, dans l’intérêt des travailleurs, d’une ligne unitaire…

Après la “ révolution des Œillets ” du 25 avril 1974, les grèves se multiplièrent, le soulèvement des colonies força la main à l’armée. Le vieil empire sur lequel le soleil ne se couchait jamais vacillait.

D’avril 1974 à mars 1975 ce fut une vieille baderne, le général Spinola qui tente de s’imposer ; Il se prenait pour De Gaulle à la Libération. Mais la force des luttes sociales pendant 10 mois le déstabilisa totalement. Spinola, qui cherchait à tout prix à freiner cette révolution que chacun pressentait, en Afrique comme au Portugal, tenta une manifestation de la “ majorité silencieuse ” a la façon de fin mai 68. Mais la manœuvre échoua, seule une “ minorité ténébreuse ” bougea, Spinola isolé dut remanier le gouvernement et le confier à des officiers confus, mais plus radicaux. Ce qui relança les manifestations, l’ébullition sociale, l’occupation des entreprises, la naissance de comités de quartier (moradores), les adhésions au syndicat…

Les militaires du MFA (Mouvement des forces armées composé de colonels, qui avait fait chuter la dictature de Marcelo Caetano le successeur du Dr Salazar) tentèrent en vain de canaliser ce déferlement. Ils voulurent imposer un syndicat unique par le haut. Évidemment, l’“ unicité ” syndicale, le syndicat unique obligé, n’était pas la même chose qu’une unification syndicale indépendante, venue d’en bas, souhaitée par les masses. Surtout dans un pays qui sortait de quarante ans de dicta- ture avec un syndicat unique vertical, étatique.

Des réactions se firent jour, qui opposèrent frontalement le PS et le PCP.
Mario Soares dénonça l’“ hégémonisme ” d’Alvaro Cunhal, ses pratiques totalitaires alignées sur Moscou et le stalinisme. Cunhal riposta : Soares était un diviseur, un contre-révolutionnaire, un social-démocrate de toujours, agent de Bonn et de Washington, en accord, même s’il le déguisait, avec Spinola. Les insultes fusèrent : “agents du KGB”, “agents de la CIA ”, “ totalitaires ”, “ impérialistes ”. Les maos, nombreux, prirent position pour le PS contre les “ nouveaux tsars ” agents de l’impérialisme moscovite. Les trotskistes et les guévaristes accusèrent la social-démocratie d’être contre-révolutionnaire et apportèrent peu à peu un soutien critique

au MFA et au PCP. “PCP! PCP! Assim se ver a força do PC, URSS, URSS, URSS ”, criait-t-on dans les meetings du PCP. “ Construire um pais livre ! Defénde alibertade ”, criait-on dans les meetings du PS.
En fin mars 1975, Spinola tenta un nouveau coup d’État, prétendument pour éviter une Saint-Barthélemy de ses partisans. Ce golpe échoua, Spinola dut s’enfuir. Le MFA, sous la pression de la rue, essaya d’éviter les élections, puis les organisa pour le 25 avril.
Les gauchistes – membres d’une dizaine de groupes différents, et ils étaient nombreux puisqu’ils rassemblaient, à ce moment-là, des centaines de milliers de manifestants à Lisbonne et à Porto – soit ne recherchaient pas ces élections, soit s’y ralliaient à contrecœur.
En France, chacun suivait la crise révolutionnaire portugaise avec des yeux de Mai 68. Serge July déplorait, dans Libération, l’organisation d’élections à une Assemblée constituante. Il aurait préféré que le MFA continue de gouverner : “ Ces élections vont principalement servir à légaliser et à remettre en selle la vieille droite salazariste. Autrement dit ces élections vont servir à tout le monde sauf au peuple portugais [...]. Jamais l’électoralisme et sa vanité ne sont apparus avec une telle lumière. ” Nous nous disputions aussi là-dessus dans la LCR. La majorité varia beaucoup. D’abord, elle nia qu’il y ait une révolution, affirmant que les lambertistes, qui le pré- tendaient dès avril 1974, exagéraient le mouvement des masses. Puis elle affirma qu’en mars 1975 il y avait eu une radicalisation et qu’en conséquence il ne fallait pas d’élection. Dès lors, elle mit (ce fut sur- tout le cas de Michel Lequenne, mais aussi d’Alain Krivine, de Daniel Bensaïd, de Robert March) tous ses espoirs dans le MFA, ce qui était étrange pour des antimilitaristes.

Mais fort heureusement ces élections eurent lieu et elles donnèrent, contraire- ment aux craintes de Serge July, une majorité absolue non aux salazaristes, mais à la gauche : 27,87 % des voix revenaient au PS, 12,53 % au PCP, et environ 8 % des voix se partageaient entre sept groupes d’extrême gauche. Soit 48,50 % des voix et 151 députés à la gauche, contre 34,50 % et 96 députés à la droite.

“ Ce peuple prétendument analphabète et incapable de bien voter fait mieux, à ce moment-là, que la classe ouvrière française, la majorité politique s’identifie à la majorité sociale, les voix du PS comme du PCP sont majoritairement ouvrières. À Portalegre, le PS gagne avec 52,40 % des voix contre 17,53 % au PCP. À Setubal la rouge, l’ouvrière, le PS dépasse le PCP : 38,15 % contre 37,82 %. À Beja, le PS réussit 34,49 % des voix alors que le PCP n’en fait que 3,5 %. À Evora, le PS l’emporte par 37,76 % contre 37,14 % pour le PCP. Cela démontre sans le moindre doute le partage qui s’opère au sein de la classe ouvrière. ”

Pourtant, le BP de la Ligue ne voyait pas du tout cela comme une victoire de la gauche. J’allai au Portugal, à mes propres frais, où je participai aux meetings, aux défilés et pus constater les ravages de la division. Tout le monde s’y rendait, d’ailleurs : “ C’est Cuba au bout de l’autoroute du Sud ”, écrivait Le Monde. J’ai encore l’image de Simone de Beauvoir, toute frêle, traversant la place du Rossio. Moi, je voyais mon ami Dominique Pouchin, assigné à résidence comme correspondant là-bas, je rencontrais aussi nos camarades de la Ligue portugaise et me lamentais de les voir faire les mêmes erreurs de positionnement que la Ligue en France.

Nous rediscutions même de la question du choix entre la construction d’un syndicat de soldats ou celle d’un Fsmar (Front des soldats, marins et aviateurs révolutionnaires) au sein de l’armée portugaise en crise. Nos débats avaient, au moins partiellement, des conséquences pratiques. Il y avait d’ailleurs des permanents de la Ligue sur place, Charles Michaloux, Olivier Martin, qui aidaient, conseillaient (fort mal) notre jeune groupe de camarades, quand ce n’étaient pas des dirigeants de

l’Internationale elle-même, Ernest Mandel ou Gerry Foley (un petit homme extraordinaire, Juif irlandais pour tout dire, qui par- lait vingt-trois langues et qui était spécialisé dans les questions des minorités nationales ; il fut exclu plus tard du SWP américain au milieu des années 1980 et fonda Socialist Action).

Bientôt, la division entre PS et PCP allait être telle à Lisbonne que le 1er mai 1975 deux cortèges s’affrontèrent physique- ment. Le PCP occupa le siège d’un des journaux favorables au PS, Républica. Le PS quitta ensuite le cinquième gouvernement provisoire de Vasco Gonçalves, déchaînant des manifestations de rue contre celui-ci, alors qu’il n’était plus composé que du MFA, du PCP et, bientôt, du FUR (Front uni- taire des révolutionnaires).

Le Portugal devenait un enjeu international entre l’URSS, les États-Unis et la Chine. Tous concouraient, pour des raisons différentes, à attiser les divisions et à stopper la montée, pourtant profonde, de la révolution.

La question portugaise dominait le monde… et Le Monde. Toute la gauche prenait parti. Tous les intellectuels allaient à Lisbonne. Les syndicalistes, les étudiants allaient voir la révolte des casernes, l’occupation des usines. François Mitterrand lui- même, dans un salon, mais à voix haute, déplora que “ les Français voient le Portugal à travers les yeux d’un trotskiste ”, accusant Dominique Pouchin, le correspondant du Monde, d’être ce qu’il n’était plus, d’ailleurs.

On aurait dit qu’à distance et au fur et à mesure des événements une sorte d’intériorisation s’opérait dans la Ligue, en France même, sur les choix à faire face à cette révolution. Pas seulement en France, mais dans tout le mouvement trotskiste international : des centaines sinon des milliers de pages furent écrites au jour le jour pour commenter, participer, suivre, aider, conseiller, influencer les militants qui agissaient là-bas.

Je prônai, en plein été 1975, une orientation de méfiance à l’égard du MFA auto- proclamé qui prétendait gouverner seul malgré le résultat des élections. Les militaires avaient appelé à voter blanc et se constituaient en élite supérieure à la majorité PS-PCP. D’où le risque d’un autre coup d’État.

Je prônai une ligne réclamant la fin de la division, l’unité PS-PCP, un gouvernement PS-PCP, l’unité de toute la gauche pour faire avancer les revendications populaires. Je fus interdit d’écrit dans Rouge, interdit d’expression publique sur ce sujet, malgré mon appartenance au Bureau politique. Il y avait toujours eu, dans la Ligue, des tentatives pour limiter la démocratie, elles resurgissaient de façon récurrente.

Michel Lequenne voyait dans le MFA le “ Parlement révolutionnaire ” qui devait conduire les masses portugaises à la victoire des soviets, lesquels se généralisaient, comme il le voulut le démontrer dans un film, Sétubal Rouge.

Pierre Frank, dans un Comité central réuni au local du ClAJ (Comité de liaison des Auberges de jeunesse) sur l’île de Migneaux, à Poissy, piqua, tout rouge, s’étranglant presque, une colère contre moi, expliquant que, sur le Portugal, il y avait, “ comme dans la révolution russe, un fossé entre bolcheviques et mencheviques ”, que je basculais “ irrémédiablement vers le menchevisme ”, que nul ne me laisserait “ plus jamais combler ce fossé ”, car il fallait “ lucidement choisir son camp en ce moment décisif ”. Indigné, je quittai immédiatement la TMI (tendance majoritaire internationale), après avoir proposé qu’elle se dissolve. Ce jour-là, fin août, j’osai quitter le Comité central, suivi seulement, car la terreur régnait, par deux des membres de ma propre tendance… Les événements allaient me donner raison, (et c’est pourquoi j’eus ce grand débat à cœur et j’écrivis avec ténacité, dix ans plus tard, un livre mémoire – laborieusement exhaustif – sur ce sujet).

Il n’y eut pas, ni à l’été ni l’automne 1975, une montée impétueuse des soviets portugais, comme la majorité de la Ligue croyait le voir. Ce ne fut pas l’heure du dépasse- ment des vieilles organisations traditionnelles, ni celle du passage définitif du PS de l’autre côté de la barrière de classe.

Nous avions commis une erreur en nous arc-boutant aux côtés du PCP et en voulant réaliser, comme en France, le Front unitaire des révolutionnaires (FUR), pour tirer le PCP vers la gauche de la gauche. Ernest Mandel eut tort de dénoncer publique- ment, au nom de la IVe Internationale, la “ contre-révolution démocratique ” conduite par le PS. D’abord parce qu’une contre-révolution ne saurait être démocratique, et ensuite parce que la révolution conduite par le MFA et le PCP n’avait aucune chance, elle, d’être démocratique.

Je protestai pour la première fois, dure- ment, sur une question théorique de fond ayant trait à la démocratie : la démocratie ne pouvait être qu’une arme de la révolution et non pas s’opposer à elle.

La ligne d’ “ hégémonie sur l’avant-garde large ” avait échoué, in vivo, et pourtant, en apparence, l’extrême gauche portugaise avait été, pendant quelques mois, la plus puissante d’Europe.

Non seulement il était à nouveau prouvé que le PS n’était pas bourgeois, mais on ne pouvait décidément pas faire avancer la révolution contre ou sans la grande masse des travailleurs qu’il influençait. L’usure du front constitué par l’extrême gauche et le PCP contre le PS se fit sentir dans tout le pays. Des barricades séparèrent même les deux camps de la classe ouvrière.

Cela conduisit tragiquement à un dernier coup d’État, le 25 novembre, qui, cette fois, eut raison du MFA, domestiqua l’armée, tout en permettant au PS de revenir au pouvoir, avant que de nouvelles élections législatives ne confirment, le 25 avril 1976, une deuxième fois, la volonté du peuple : une majorité de députés du PS et du PCP fut reconduite.

Nos camarades de la Ligue portugaise furent marginalisés, car ils n’avaient pas été au cœur des luttes politiques qui s’étaient déroulées au cours de cette longue crise révolutionnaire.

Ils avaient mal appréciés les rôles du PS et du PCP qui s’imposèrent ensuite. Quelle leçon !

(extrait de « mai 68 histoire sans fin ») repris dans « D&S » d’avril 2014

 

Lire « Printemps portugais » Gérard Filoche paru en 1984  éditions Actéon

 

Le 25 avril, ma journée des oeillets (Grândola vila morena)

Le 25 avril 1974 à 00h20, est diffusée sur les ondes radio portugaises, la chanson de Zeca Afonso, « Grândola, vila morena ». Cette chanson est le signal. Ce signal est une aurore. Les jeunes « capitaines d’avril » à la tête du Mouvement des Forces Armées lancent alors leurs chars sur Lisbonne afin de mettre un terme à l’une des plus longues dictatures d’extrême droite qu’ait subit un pays.

Aussi, chaque 25 avril, je m’écoute cette magnifique chanson, dans la version interprétée par la grande Amalia Rodrigues, avec des frissons … Vous trouverez ci-dessous les paroles de cette chanson, en portugais puis leur adaptation, la mienne, en français.

« 1- Grândola, vila morena… Terra da fraternidade… O povo é quem mais ordena… Dentro de ti, ó cidade.

2- Dentro de ti, ó cidade… O povo é quem mais ordena… Terra da fraternidade… Grândola, vila morena.

3- Em cada esquina um amigo… Em cada rosto igualdade… Grândola, vila morena… Terra da fraternidade.

4- Terra da fraternidade… Grândola, vila morena… Em cada rosto igualdade… O povo é quem mais ordena.

5- À sombra duma azinheira… Que já não sabia a idade… Jurei ter por companheira… Grândola a tua vontade.

6- Grândola a tua vontade… Jureiter por com- panheira… À sombra duma azinheira… Que já não sabia a idade. »


« 1- Grândola ville ensoleillée… Terre de la fraternité… Le peuple est celui qui gou- verne… A l’intérieur de ta cité.

2- A l’intérieur de ta cité… Le peuple est celui qui gouverne… Terre de la fraternité… Grândola ma ville ensoleillée.

3- A chaque carrefour une amitié… Sur chaque visage l’égalité… Grândola la ville ensoleillée… Terre de la fraternité.

4- Terre de la fraternité… Grândola ma ville ensoleillée… Sur chaque visage l’égalité… Le peuple y est celui qui gouverne.

5- A l’ombre d’un grand chêne… Dont je ne savais plus l’âge… J’ai juré d’avoir pour seule compagne… Grândola, ta volonté.

6- Grândola, ta volonté… J’ai juré d’avoir pour seule compagne… A l’ombre d’un très grand chêne… Dont je ne savais plus l’âge. »

Silgueiro Maia

couv printemps portugais

 

Depuis 2013 un nouveau « printemps portugais » : que la troïka aille se faire voir.

En mars 2013, ont été 1,5 million (l’équivalent de 11 millions de manifestants en France) dans les rues contre l’austérité, contre la troïka UE/BCE/FMI, contre Merkel et tous ceux qui donnent la priorité au remboursement de la dette aux banquiers. Ils ont chanté à nouveau Grandola Vila Morena, la chanson de la révolution portugaise, la « révolution des Œillets », celle qui donna le signe de la révolution portugaise le 25 avril 1974. (1)

En 1974-1975, la révolution contre la guerre coloniale que les armées portugaises menaient en Afrique. Ce fut aussi une révolution contre la « règle d’or » qu’impo- sait la dictature Caetano qui venait de succéder depuis 1969 à la dictature du « Doutor » Salazar, laquelle avait débuté en 1934. A l’époque, la dictature imposait « l’équilibre budgétaire » et le faisait payer au peuple : Salazar ne voulait pas qu’il manque un « escudo » dans les caisses de l’état à la fin de l’année, par rapport à ceux qui y étaient entrés. Il professait cette bêtise immense que « un état c’est comme un ménage, ça ne doit pas dépenser plus que ce que ça gagne ». Ce faisant, pendant 40 ans, Salazar avait fait du Portugal le pays le plus pauvre d’Europe, poussant plus d’un million de Portugais (sur 9 millions à fuir le pays). La « règle d’or » vue du Portugal est une sorte de crime économique prolongé sur 4 décen- nies terribles. Un monstre qui resurgit.

Et voilà que la troïka UE/BCE/FMI recommence Salazar et Caetano. Elle veut imposer la même sorte d’austérité permanente, le même genre de crime économique qui ne sert qu’aux banquiers et aux actionnaires. Donc le peuple chante l’hymne de la révolution, du printemps portugais, à nouveau.

Déjà en le 15 septembre 2012, le gouvernement de droite de Pedro Passos Coelho, obéissant au chantage de Merkel, Barroso, de l’UE, avait voulu abaisser les cotisations sociales des patrons de 22,5 % à 18,5 % et augmenter celles des salariés de 11,5 % à 18,5% : il y avait eu un tel raz de marée dans les rues des grandes villes portugaises qu’il avait du y renoncer. C’est la seule victoire des peuples d’Europe depuis l’ouverture officielle du chantage à la crise bancaire depuis 2009.

Et là, la troïka qui n’en a jamais assez, dont le but est de profiter de la crise pour imposer des régressions sociales à tous les peuples d’Europe, a encore exigé que Pedro Passos Coelho compense 78 milliards de crédit de la BCE par des baisses des salaires et des retraite, des hausses généralisées d’impôts, et des « économies » antisociales à travers d’une « reforme de l’état ».

Mais le pays a été submergé par une mobilisation sans précédent de Porto à Faro, dans toutes les grandes villes du pays. 400 000 à Porto, 800 000 à Lisbonne… (plus d’1,5 million d’habitants sur 9 millions, cela ferait l’équivalent de 9 millions de manifestants en France °). A l’appel d’un mouvement appelé « que la troïka aille se faire voir » mais aussi de la CGTP, c’est une marée humaine qui s’est mobilisée : « La troïka et le gouvernement dehors », « le Portugal aux urnes », « élec- tions maintenant », « démocratie participative ». « Qui s’endort dans la démocratie, se réveille dans la dictature », « Bandits, rendez-nous notre argent ». « C’est le peuple qui est souverain », une phrase correspondant à un des vers du chanteur engagé José Afonso, créateur de la chanson « Grândola Vila Morena », étaient le principal mot d’ordre des rassemblements.

Cela ressemble à du Hollande-Valls : : « les créanciers de la troïka pourraient consentir à un nouvel allégement des objectifs budgétaires du gouvernement, de plus en plus difficiles à respecter, alors que l’économie devrait cette année reculer de 2 %, soit deux fois plus qu’envisagé précédemment, et que le chômage a atteint le taux record de 16,9 %. »

Mais comme entre 10 à 15 % du peuple était dans la rue, ils ont gagné, le gou- vernement a du renoncer a exaucer toutes les volontés austéritaires voulues par l’Union européenne.

Lire « Printemps portugais » Ed. Actéon, 1984, Gérard Filoche

1) (Angra do Heroismo 50 | Barcelona 30 | Beja 1000 | Braga 7000 | Caldas da Rainha 3000 | Castelo Branco 1000 | Chaves 200 | Coimbra 20000 | Entroncamento 300 | Estocolmo 15 | Guarda 500 | Horta 160 | Lisboa 800000 | Londres 100 | Marinha Grande 3000 | Paris 100 | Portimão 5000 | Porto 400000 | Santarém 500 | Setúbal 7000 | Sines 120 | Tomar 200 | Torres Novas 250 | Viana do Castelo 1000 | Vila Real 1800)

 

L’effet différé de ce grand mouvement est l’actuel gouvernement d’union de la gauche, Costa, au Portugal, qui est, en 2020, le plus à gauche d’Europe.

 

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