in Huffington Post, 18 juillet, à propos de la commission Cahuzac

Quelle était l’ambition de la commission d’enquête parlementaire concernant la forfaiture Cahuzac? Tenter de prouver que les membres du gouvernement ont été embarrassés, gênés par les révélations de Mediapart à partir du 4 décembre 2012? Il est probable qu’il y ait eu des échanges informels, intraçables, des gênes, des passivités, des envies de nier, d’éluder, des espoirs que l’affaire fasse « pschiiitt », tant que Cahuzac lui-même, le coupable, niait effrontément, « les yeux dans les yeux ». L’important est qu’aucun acte réel confirmé, d’entrave, n’ait empêché la vérité d’éclater, comme cela a été souligné, en 117 jours, entre le 4 décembre et le 2 avril 2013.

D’autres questions me tentent: Pierre Moscovici explique que son collègue menteur était un bon ministre et qu’ils ont fait un bon et gros travail ensemble, soit « six lois budgétaires et fiscales ». Y avait-il un Dr. Jekyll et un Mr. Hyde dans la personnalité bien carrée, arrogante et droitière de Cahuzac? Était-il partagé entre un bon côté, celui qui luttait contre la fraude fiscale, et un mauvais côté, celui qui fraudait fiscalement? Nul ne peut croire cela, puisqu’il a fallu attendre sa démission, ses aveux, pour qu’une loi soit mise en chantier pour lutter vraiment contre ladite fraude.

Ses collègues au gouvernement, et son ministre de tutelle, lui ont ils fait confiance de juin 2012 à mars 2013 pour aller chercher les 60 a 80 milliards de fraude fiscale? Pourquoi l’ont ils laissé dire à la télévision que « la réforme fiscale était faite »? Y aurait-il eu une complicité intellectuelle, politique, si forte avec Cahuzac que nul n’ait vu alors qu’il était plus « juste » de traquer les fraudeurs fiscaux que les petites retraites, les allocations familiales ou les points d’indice des bas salaires des petits fonctionnaires? Est-ce que l’orientation du gouvernement appliquant la rigueur budgétaire était conciliable avec une impasse sur la recherche et la taxation des 590 milliards d’avoirs français dans les paradis fiscaux, dont 108 milliards en Suisse? Comment, politiquement, Cahuzac est-il arrivé, avec ses convictions, dans le casting gouvernemental? Comment a-t-il pu augmenter son autorité politique – jusqu’à révélation de sa forfaiture – dans l’élaboration et la mise en oeuvre des choix fondamentaux du gouvernement: car le budget, c’est essentiel, n’est ce pas? Delphine Batho se l’est vu rappeler avec force.

On voit que c’est seulement en 2014, que la colonne « recette » du budget envisage 2 milliards issus de la lutte contre la fraude fiscale? D’ailleurs pourquoi seulement 2 milliards? Si on recrutait 2000 inspecteurs des impôts et plus de 50 magistrats (dans le nouveau parquet financier) cela pourrait être bien plus que 2 milliards, non? Il est vrai que cela n’était même pas envisageable sous Cahuzac. Sous Cahuzac il n’y avait pas que la fraude de l’individu, il y avait aussi, en dépit des proclamations, des affichages, un refus de facto de lutter contre la fraude fiscale de masse. Ça, ça vaut bien des questions qui n’y ont pas été posées par la commission De Courson.

Et ça vaut aussi bien des enseignements: comment faire une loi pour que les citoyens aient les moyens d’interférer pour que à l’avenir, fisc et parquet, administration et justice, soient saisissables et contraints de mettre tous les moyens nécessaires à la traque de ceux qui fraudent la République en « optimisant », en contournant, en trichant sur leurs obligations vis a vis de la collectivité?

Gérard Filoche est l’auteur de Le choc, après Cahuzac (128 pages, juin 2013, 9,90€) et de La dette indigne (240p. 14,90€) aux éditions Gawsewitch.

9 Commentaires

  1. Gilbert Duroux
    Posted 2 août 2013 at 14:44 | Permalien

    Tiens, Gérard reprend les questions que je posais sur ce forum et qui vont bien au delà du seul cas Cacuhuzac (caca huzac, ça sonne bien). On s’éloigne du ripoux mis en parallèle avec le « parti sain ». Merci, Gérard, de confirmer que c’est bien un système qui est à l’œuvre et qu’un parti qui fait grimper dans la hiérarchie des gens aussi avides d’argent que DSK, Cahuzac, Fabius, Bartolone… (complétez la liste ad libitum) n’a rien d’un parti de gauche.

  2. Jean-jacques
    Posted 2 août 2013 at 19:19 | Permalien

    Nous avons l’affaire de la vente du Printemps et de Publicis. Il est vrai que les ministres socialistes sortent de familles aux revenus importants.Pourquoi voulez-vous qu’ils s’intéressent aux Ouvriers en dehors des scrutins électoraux ?Et les 25% d’augmentation de l’avoir des plus riches sous un gouvernement et un Président qui parlent la langue de bois avec les mots Justice et Equité . Lévy dit qu’il a eu les encouragements de Moscovici pour sa fusion ,ce dernier aura un point de chute pour sa reconversion .
    ECOEURE après plus de 12 mois de cette présidence ……

  3. Posted 3 août 2013 at 10:38 | Permalien

    j’ai lu vite, mais en gros oui, bon contribution a vous en depit de nos différences
    gerard

  4. Labellebleue
    Posted 3 août 2013 at 21:36 | Permalien

    Cher Gérard Filoche, ça fait un bout de temps que j’ai une question pour vous. Que faites-vous au parti socialiste ??

  5. Gilbert Duroux
    Posted 4 août 2013 at 3:45 | Permalien

    C’est une question stupide, Gérard a déjà répondu mille fois : il ancre le PS à gauche.
    Il a bien du mérite parce que c’est aussi difficile d’ancrer le PS à gauche que d’ancrer l’UMP à gauche (ces deux partis étant de même nature).

    Extrait d’un petit billet du sociologue Alain Accardo (ancien dirigeant du PCF bordelais), qui montre bien l’escroquerie qui consiste à faire de Cahuzac un cas à part (à côté d’un « parti sain ») :
    http://blog.agone.org/post/2013/05/23/Les-baudets-pesteux

    « (…) La distinction traditionnelle entre la droite classique et la gauche de gouvernement (PS) a perdu toute espèce de pertinence. Il n’y a qu’à voir comment ils réagissent à la succession des « affaires » calamiteuses qui mettent gravement en cause l’honneur et la probité d’un nombre significatif d’entre eux, et non des moindres.
    Leur commun réflexe est de recourir à la méthode éprouvée de l’individualisation de la faute, en isolant le baudet galeux pour mieux le charger. Vieux procédé cautionné par toutes les mythologies du libre-arbitre. Quelles que soient la matérialité et les circonstances du crime, on se donne l’illusion d’aller à la racine du mal en mettant en cause la nature peccamineuse du seul criminel. Le remède serait donc de mettre tous ces pervers à l’abri d’eux-mêmes en multipliant les mesures personnalisées du type « Déclaration de patrimoine », « Non-cumul des mandats », « Contrôle fiscal », etc.
    Pour combattre la peste il suffirait d’établir un cordon sanitaire autour de chaque pestiféré. Rares sont les hommes ou les femmes d’État pour dénoncer le lien que de tels agissements personnels peuvent avoir avec la logique objective et impersonnelle d’un système que ses « ressources humaines » les mieux formatées et les plus zélées, telles que son patronat, ses cadres, ses politiciens ou ses intellectuels, ont profondément intériorisée (…) »

  6. Posted 4 août 2013 at 8:49 | Permalien

    parce que c’est mon parti depuis 20 ans et que c’est la que ça se joue
    lire « mai 68 histoire sans fin » Ed. Gawsewitch
    et remontez sur ce blog il y a des dizaines d’articles de fond qui répondent a cette question,

  7. Gilbert Duroux
    Posted 15 août 2013 at 15:48 | Permalien

    De gauche, qu’il disait :
    https://twitter.com/GuillaumeTC/status/367385630910590977/photo/1

  8. Edouard
    Posted 28 août 2013 at 11:26 | Permalien

    c’est MON parti, na na nèreeuuuu … c’est MON Yop !

    hahaha ! ridicule mon ami

  9. DANIEL SIRERE
    Posted 10 septembre 2013 at 9:56 | Permalien

    tiens bon Gérard , quand le navire prend l’eau seuls les rats le quittent . Tu as l’habitude d’être confronté à l’exclusion d’une section , d’une fédération , mais il y a toujours des sections qui veulent que pour la richesse du débat , c’est que tous les camarades aient leur place . Pour mémoire nous avons à l’unanimité accueilli Gérard FILLOCHE à la section du Mée sur Seine dans ce cadre là .

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