Réponse point à point à l’argumentaire de la Motion Valls-Cambadélis contre la motion B

 

Les phrases soulignées et en rouge sont issues de l’argumentaire de la motion A

La motion B reconnaît certaines avancées réalisées par les gouvernements de gauche depuis 3 ans.

La motion B, en effet, analyse la réalité et constate qu’un certain nombre d’avancées ont été réalisées par les deux gouvernements de gauche.

Il faut aussi, malheureusement, constater que bien des engagements importants pris par François Hollande n’ont pas été tenus et, pire, que toute une série de mesures aux antipodes de l’orientation du discours du Bourget ont été mises en œuvre

Cf. Argumentaire : « 60 engagements – An III » (déjà publié)

Elle formule beaucoup de propositions similaires aux nôtres pour réussir la deuxième partie du quinquennat.

La motion A pratique l’art du grand écart. Bien des mesures qu’elle propose sont en contradiction complète avec la politique de nos deux gouvernements socialistes successifs.

Ce n’est pas la 1ère fois. La « Charte des socialistes pour le progrès humain » avait déjà mis en évidence la facilité avec laquelle Jean-Christophe Cambadélis pratiquait la politique du grand écart en faisant adopter une charte dont les principes étaient en parfaite opposition à la politique du gouvernement Valls. Il est vrai que le succès n’avait pas été au rendez-vous, et que seulement 25,5 % des adhérents socialistes avaient approuvé cette « charte ».

Qui peut accorder la moindre confiance aux ministres et secrétaires d’Etat, signataires de la motion Valls-Cambadélis, pour faire, dans la  2ème partie du quinquennat, l’inverse de ce qu’ils ont pratiqué jusque-là ? Manuel Valls ou Michel Sapin, avaient, d’ailleurs, déjà  annoncé, après le nouvel échec des départementales, qu’ils continueraient la même politique.

Prudemment, le vote du projet de la Macron a été repoussé à la fin du mois de juin pour tenter d’éviter une nouvelle utilisation de l’article 49-3. D’autres mesures, allant dans le même sens, tel le projet de loi Rebsamen, seront infligées aux habitants de notre pays, si la motion B n’est pas majoritaire au congrès de Poitiers et si notre parti n’oblige pas François Hollande à l’écouter.

I-  La motion B sous-estime gravement l’affaissement de l’industrie française durant la décennie UMP

La France occupe la 15ème place des pays de la zone euro derrière l’Allemagne (29,6 %), la Suède, l’Italie (18 %), l’Espagne et la GB

La présentation est biaisée, même si l’on veut bien oublier que la Grande-Bretagne ne fait pas partie de la zone euro.  La France est à la 15ème place en fonction de la place qu’occupe l’industrie dans son PIB. Mais sa production industrielle est bien évidemment supérieure (en valeur absolue) à celle de la Suède…

De toute façon, cette « fixation » de la motion A sur l’industrie est surprenante.

D’abord parce que nos deux gouvernements socialistes n’ont rien fait pour empêcher les délocalisations et les plans sociaux qui continuent à se multiplier dans ce secteur. Il faut reconnaître à Emmanuel Macron d’avoir assumé tout le cynisme de cette politique en déclarant à « La Tribune » : « Mon job n’est pas de préserver les emplois existants ».

Ensuite parce que  la diminution de la part de l’industrie est commune à tous les pays développés. Le Royaume-Uni et les Etats-Unis sont dans une situation analogue à celle de notre pays. Même en Allemagne, la part de l’industrie a nettement diminué depuis le début des années 1980. Ce changement de la structure économique correspond à un changement dans la structure de la demande : éducation, santé, culture, plutôt que machines à laver et automobiles qui sont devenus des biens de consommation « courants ». Il est étonnant que la motion A, aussi éprise de « modernité », ne soit pas aperçue que les « 30 glorieuses » étaient terminées.

Ce  n’est pas la diminution de la part de l’industrie qui est problématique mais, avant tout, l’incapacité de l’économie française à créer des emplois dans tous les secteurs d’activité !

La balance commerciale qui était excédentaire après 5 ans de gouvernement Jospin (3 milliards d’euros en 2002) est déficitaire après 10 ans de gouvernements de droite (-75 milliards d’euros en 2012)

Cela prouve bien qu’il est possible (merci aux rédacteurs de cet argumentaire de la motion A de la rappeler) d’avoir une balance commerciale  excédentaire, en diminuant le temps de travail et en donnant plusieurs « coups de pouce » importants au Smic.

Les causes de cet effondrement sont multiples :

Piètre qualité de notre démocratie sociale

La motion A prend l’exemple sur l’Allemagne uniquement quand ça l’arrange. En termes de démocratie sociale, notre gouvernement aurait pourtant beaucoup à apprendre d’elle : 50 % des membres des Conseils d’administration sont des salariés, une instance représentative des salariés est mise en place dès qu’une entreprise atteint 5 salariés…

La suppression programmée des CHSCT et la réduction des instances représentatives du personnel (projet de loi Rebsamen) comme des informations que les entreprises doivent leur fournir (loi Sapin de juin 2013) ne facilitent pas, c’est le moins que l’on puisse dire, cette « démocratie sociale » que la motion A affirme, pourtant, appeler de ses vœux.

Faiblesse de notre tissu de grosses PME et d’ETI

Ce tissu est, en effet, beaucoup moins serré qu’en Allemagne et en Italie, où existent de très nombreuses PME et ETI (entreprises de taille intermédiaires) indépendantes des grands groupes. En France, la situation est tout à fait différente. La part des PME et ETI indépendantes des grands groupes est, selon l’Insee[1], plutôt modeste : 2 millions de salariés employés par les PME (grosses et petites) et 166 000 par les ETI indépendantes des grands groupes. Le secteur marchand compte 16,2 millions de salariés.

A chaque fois que des exonérations fiscales et sociales sont accordées aux PME ou aux ETI, ce sont les grands groupes qui en profitent. Notre gouvernement n’y a rien changé mais s’étonne de la faiblesse des PME et des ETI.

Spécialisation de notre économie dans le milieu de gamme et insuffisance de la recherche

Les deux phénomènes sont étroitement liés. Les grandes sociétés françaises ont fait le choix d’augmenter la distribution de dividendes plutôt que d’augmenter l’investissement productif et la recherche-développement. Cette dernière s’élevait à 42 % des dividendes versés en 1992 et seulement à 25 % en 2012. Les entreprises allemandes consacrent (au total) deux fois plus à la recherche-développement que les entreprises françaises.  Les brevets déposés sont trois fois plus nombreux en Allemagne qu’en France.

Comment s’étonner, dans ces conditions que l’industrie française n’ait pas pu se spécialiser dans le « haut de gamme » comme l’Allemagne ? Ce manque de compétitivité n’a pas grand-chose à voir avec le « coût du travail » qui, dans l’industrie, est à peu-près le même en France qu’en Allemagne. Il tient, avant tout,  à la préférence des détenteurs de capitaux, en France, pour les dividendes ; à une préférence aussi pour la rentabilité à court terme plutôt que pour les investissements à long terme.

Le taux de marge[2] d’exploitation des entreprises à un plus bas historique, après la crise de 2008, a également pesé

Le taux de marge des entreprises françaises a baissé de 31,5 % en 2008 à 28,4 % en 2012.

Cette baisse est la conséquence directe de la crise financière de 2007-2008.

Si la marge n’est que de 20 % pour les PME-ETI cela tient, essentiellement, à l’absence d’indépendance de ces entreprises à l’égard des grands groupes qui captent une bonne partie de leur valeur ajoutée.

Si le taux de marge  est plus important en Allemagne, c’est parce que les investisseurs allemands ont une vision à plus long terme de leurs investissements et ont su investir dans le « haut de gamme ». C’est aussi parce que les industriels allemands ont profité à plein de l’élargissement de l’UE au pays d’Europe centrale et Orientale (PECO). Une bonne partie de leur production industrielle n’est qu’assemblée en Allemagne, après que les éléments ont été produits dans les PECO. Ce qui, en fonction du rapport de force entre donneur d’ordres et sous-traitants, profite, évidemment, au taux de marge des entreprises allemandes… C’est, enfin, parce que le gouvernement Schröder (un « social-démocrate » dont se réclame la motion A) a imposé un double marché du travail avec la « création » de plusieurs millions de « mini jobs » payés 400 euros par mois !

Les capacités des entreprises pour investir et embaucher se sont réduites

Le soi-disant « théorème d’Helmut Schmidt » de 1974 (« Les profits d’aujourd’hui, seront les investissements de demain et les emplois d’après-demain ») nous est de nouveau servi par la motion A.

Ce « théorème » a pourtant fait toute la preuve de son inanité : après le virage néolibéral de l’économie, au début des années 1980, les profits ont retrouvé leur niveau d’avant la crise de 1973-1974, mais le taux d’investissement a stagné et le chômage a été multiplié par trois, dans notre pays.

Les « capacités » des entreprises pour investir et embaucher », comme l’écrit la motion A, avaient augmenté mais elles n’ont pas servi à investir et surtout à créer des emplois. Ces capacités ont été utilisées à spéculer, à gonfler les bulles financières dont l’éclatement avait mené à la chute du marché des actions des « nouvelles technologies » en 2000, et surtout à la crise financière de 2007-2008.

Il n’existe, aujourd’hui, pas la moindre garantie que l’augmentation du taux de marge des entreprises n’ira (ne va pas déjà)  pas gonfler de nouveau des bulles financières et préparer la prochaine crise financière. Notre gouvernement se refuse, cependant, à tirer la moindre leçon de l’échec du « théorème d’Helmut Schmidt » : il fait une confiance aveugle au patronat en  lui distribuant les exonérations fiscales et sociales, sans exercer le moindre contrôle sur leur utilisation.

Pour contribuer à rétablir la compétitivité les gouvernements de gauche ont :

Créé la Banque Public d’Investissement.

Cette banque n’a que des moyens dérisoires. Le total de son bilan représente 2,7 % du PIB alors que celui de la BNP-Paribas atteint 100 % de ce PIB.

Soutenu la démocratie sociale

En guise de soutien à la démocratie sociale, nos gouvernements n’ont cessé de la faire reculer : loi Sapin, projet de loi Macron, projet de loi Rebsamen…

Réorienté l’UE :

Nouvelle politique de la BCE pour un euro moins cher

La BCE est « indépendante ». La France n’a donc rien à voir dans sa « réorientation ». C’est l’échec de sa politique habituelle de baisse des taux (ils étaient proches de zéro et rien ne changeait) qui a amené la BCE à se lancer dans une politique de « Quantitative Easing ». Cette politique consiste, selon la même logique que celle des « pactes » de compétitivité et de responsabilité en France, à distribuer 1 140 milliards d’euros aux banques sans exiger d’elles la moindre contrepartie en termes de crédits aux entreprises et aux ménages. Rien n’empêchera donc les banques de spéculer de plus belle avec ces 1 140 milliards d’euros et, de nous rapprocher de la prochaine crise financière.

Cf. argumentaire sur « Le plan Draghi ».

Plans d’investissement de 315 milliards d’euros

Ce plan dispose en tout et pour tout de 21 milliards d’argent public (dont 6 seulement n’étaient pas déjà programmés). Les 294 milliards d’euros supplémentaires devraient provenir du secteur privé qui n’investira jamais de telles sommes avec seulement 21 milliards de fonds publics en garantie.

Ce plan est bâti avec les mêmes ingrédients que le « Pacte de croissance » de 120 milliards d’euros de François Hollande, en 2012. Il avait occupé une grande place lors des débats du congrès de Toulouse mais plus personne, ensuite, n’en a entendu parler.

Cf. argumentaire sur « Le plan Juncker ». (déjà paru)

Garanties jeunes

Un sommet « sur l’emploi » s’est tenu à Rome, annoncé à coups de trompettes par Matteo Renzi, en septembre dernier. Son objectif était de s’attaquer au chômage des jeunes.  Il n’en est rien sorti et rares sont ceux qui, aujourd’hui, se souviennent même que ce « sommet » ait eut lieu. Exactement comme avaient été, aussitôt, oubliées les mesures « contre le chômage des jeunes », baptisées « garanties jeunes » annoncées, le 28 mai 2013, par François Hollande et Angela Merkel. Ces mesures consistaient à débloquer une somme de 6 milliards d’euros entre 2014 et 2020. Une somme dérisoire au regard des 50 % de jeunes au chômage en Grèce, aux 40 % de l’Espagne et du Portugal, et qui n’a, évidemment, pas eu le moindre effet…

Union bancaire

Angela Merkel a obtenu ce qu’elle voulait. La supervision des banques ne concernera que 200 grosses banques dont le bilan dépasse 30 milliards d’euros. Il y a pourtant 6 000 banques dans la zone euro, et la crise bancaire espagnole a trouvé son origine dans des Caisses d’épargne qui n’auraient pas été concernées par la supervision mise en place par les ministres des finances de l’UE. Seules une caisse d’épargne et une banque mutualiste allemandes sur 1500 seront concernées. Les autres continueront à n’être supervisées que par des institutions allemandes. Ces deux secteurs représentent pourtant les 2/3 du marché de la banque de détail en Allemagne.

La séparation des activités spéculatives des banques de leurs activités de crédit aux entreprises et au ménage ressemble étrangement aux lois bancaires françaises, belges et allemandes, adoptées en 2013 et 2014. Or, ces lois ne séparent rien du tout, si ce n’est de façon infinitésimale.

L’Union bancaire a pour perspective d’instaurer un fonds de garantie européen des dépôts bancaires. Mais la Commission européenne le reconnaît, cela ne sera pas possible avant 10 ans et ce fonds ne s’élèverait qu’à 1,5 %  du montant des dépôts.  Ce fonds ne serait d’ailleurs en rien européen dans un premier temps puisque le financement de ce fonds serait du ressort de chaque Etat et que les banques d’autres Etats ne pourraient pas y faire appel. La « mutualisation » européenne des dettes bancaires n’est prévue que dans un second temps, mais l’Allemagne a déjà prévenu qu’elle refusait de s’engager dans cette voie.

La création d’un fonds de renflouement des banques. Il n’aurait pas  pour fonction, comme le précédent, d’éviter une panique bancaire qui survient lorsque les déposants se précipitent aux guichets des banques pour retirer leurs fonds, mais de fournir des fonds propres aux banques sur le point de faire faillite.  La création de ce mécanisme est renvoyée à 2018. La crise chypriote vient, pourtant, de démontrer l’urgence de la question.

(Pour la réforme bancaire française cf. argumentaire « Loi bancaire ») (déjà paru)

Lutte contre l’évasion fiscale

L’harmonisation progressive de la fiscalité fait un pas en avant grâce à l’échange automatique d’informations bancaires. Le problème est que, dans tous les pays de l’UE, sous le coup des politiques d’austérité, les administrations fiscales ont vu leurs effectifs diminuer et qu’il n’y aura pas assez de personnes qualifiées pour examiner ces informations.

Rappelons, enfin, que le Parti socialiste européen s’est bien gardé de proposer une motion de censure contre Jean-Claude Juncker, le président de la Commission européenne. Pourtant, le scandale « Luxleaks » avait mis en lumière le fait que le Luxembourg (que Juncker a dirigé pendant près de 20 ans) était une pièce maîtresse d’un système d’optimisation fiscale qui fait perdre plus de 1 000 milliards d’euros, chaque année, aux budgets des Etats européens.

2400 milliards blanchis en 30 ans avec 340 multinationales dont 58 multinationales françaises (Total en 1er) qui nous détournent 100 milliards/an

Rien de tout cela n’existait avant 2012 et l’élection de F. Hollande

C’est vrai mais, au total, cela ne fait surtout pas grand-chose !

Comme la motion B nous voulons corriger les inévitables effets d’aubaine du CICE :

Une taxe spéciale sur la grande distribution

C’est un pas en avant, mais un tout petit pas : 200 millions d’euros comparés au 41 milliards des deux « pactes ».

Pour que les fonds servent à l’investissement productif, à la formation et à l’emploi et non à la distribution de dividendes.

Les ministres et secrétaires d’Etat socialistes sont tous signataires de la motion A. Ils ont toujours refusé, et Manuel Valls le premier, que soit imposée la moindre contrepartie au patronat en retour des 41 milliards d’euros annuels qui lui sont progressivement versés (sous forme d’exonération fiscale et sociale)  à partir de 2014.

Quelle peut être leur crédibilité, comparée à celle de la motion B dont les signataires se sont toujours vu opposer le même refus lorsqu’ils proposaient ces contreparties, notamment sous le forme d’amendements parlementaires ?

II-          Ne pas confondre austérité et sérieux budgétaire

Nous nous sommes efforcés de réduire progressivement nos déficits publics et de réduire progressivement la dette publique (elle atteignait  95 % du PIB en 2012, elle n’était que de 900 milliards d’euros en 2002, elle dépasse aujourd’hui les 2 000 milliards d’euros) et le service de ses intérêts (50 milliards d’euros par an)

Il s’agit sans doute d’une erreur dans l’écriture de l’argumentaire de la motion A : la dette publique atteignait 86 % du PIB fin 2011 et 95 % fin 2014. Une augmentation de 9 points du PIB ! La politique d’austérité qui avait pour fonction de réduire la dette publique n’a donc fait que l’accroître. Pourquoi notre gouvernement n’en tire-t-il pas la conclusion que cette politique est néfaste sur le plan économique, sur le plan social, mais aussi sur le plan financier qui est pourtant son premier objectif ?

Parler d’austérité, c’est vider les mots de leur sens

Licenciement de 500 000 fonctionnaires comme en GB.

Réduction des salaires et des pensions de 10 à 20 % comme en Espagne, en Italie et au Portugal ; pour ne rien dire de la Grèce.

Nous n’avons pas instauré la retraite à 67 ans et réduit la durée de l’allocation chômage de 32 à 12 mois, comme en Allemagne.

Nos dépenses publiques ont continué de croître, à un rythme déclinant

Le pouvoir d’achat des Français a été affecté par la montée du chômage (plus de 600 000 demandeurs d’emplois) et les augmentations d’impôts qui n’ont pas épargné les bas revenus.  Mais nous allons commencer à baisser les impôts des ménages modestes…

La politique d’austérité est prônée par la droite : 130 milliards de réduction de la dépense publique, abolition des 35 heures, du CDI, dénonciation de l’ « assistanat »…

Merci, donc, à nos deux gouvernements de gauche de n’avoir pas licencié 500 000 fonctionnaires même si la Révision générale des politiques publiques (RGPP) continue sous le nom de la Modernisation de l’action publique (MAP) !

Merci de n’avoir fait que geler le montant des retraites :

Merci de ne pas avoir porté l’âge de la retraite à 67 ans et de n’avoir allongé que de 6 mois la durée de cotisation !

Merci pour le simple déclin du rythme de croissance de nos dépenses publiques, alors qu’il y a tant de besoins sociaux insatisfaits !

Merci pour la stagnation du salaire médian !

Merci de ne supprimer que progressivement les acquis sociaux accumulés depuis 70 ans !

Merci de n’avoir pas agi comme la droite affirme qu’elle le fera, en oubliant au passage que notre politique risque fort de lui avoir servi de marchepied pour gagner en 2017 et lui servir de levier, ensuite, pour aller encore plus loin dans l’austérité et les « réformes structurelles » !

Merci de ne vous être assis que sur la plus grande partie des engagements de François Hollande !

La distinction sémantique que veut imposer la motion A est dérisoire. Une politique

- qui diminue la dépense publique : Etat, Sécurité sociale, collectivités territoriales,

-qui gèle la valeur du point dans la fonction publique,

-qui ne donne qu’un seul coup de pouce au Smic en 3 ans,

-qui allonge de 6 mois la durée de cotisation pour la retraite,

-qui provoque une augmentation du nombre de demandeurs d’emplois de 600 000 (pour la seule catégorie A) et de 1,3 million (pour les catégories A, B et C, qui facilite les licenciements,

-qui impose aux salariés des commerces de proximité (à 80 % des femmes) l’extension du travail dominical… est bien une politique d’austérité, à l’exact opposé du  discours prononcé au Bourget, en janvier 21012, par François Hollande.

Il est, cependant, possible de concéder à la motion A que notre pays n’a pas subi les plans de destruction sociale qui ont été imposés à la Grèce (dont il est facile de comprendre pourquoi la motion A n’a rien à dire tant la politique que le gouvernement Valls mène à son égard est indigne), à l’Irlande, au Portugal, à l’Italie, à Chypre… Mais peut-être est-ce tout simplement, parce qu’il n’a pas été possible à la Commission européenne de traiter notre pays qui représente plus de 20 % du PIB de la zone euro et sans lequel l’Union européenne ne pourrait exister, comme des pays dont le poids économique et politique est moins important ?

Nous pratiquons le sérieux budgétaire

Ce « sérieux budgétaire » aboutit à de bien étranges résultats : une augmentation de 180 milliards de la dette publique en 3 ans et une diminution à pas de tortue du déficit public (les 3 % étaient programmés pour fin 2013 et ne seraient, dans le meilleur des cas, atteints qu’en 2017!), tout simplement parce que vouloir réduire ces déficits à marche forcée ne pouvait qu’aboutir à l’inverse du but poursuivi.

III- Il faut agir conjointement sur l’offre et la demande et non opposer l’une à l’autre

L’expérience de 1982 indique que la relance profite aux exportateurs étrangers et creuse notre déficit commercial

La relance de 1982 n’a pas seulement « profité » aux exportateurs étrangers, mais aussi aux entreprises françaises qui ont disposé d’un supplément de demande et donc de débouchés pour leur production.

Le creusement d’un déficit commercial dépend, aussi, de l’absence de politique d’investissement public.

La compétitivité « hors coût » est, elle aussi, très importante. Cette compétitivité passe par les infrastructures, les transports, l’enseignement, les services publics et donc par l’augmentation massive des investissements publics de l’Etat ou des collectivités territoriales (70 % de l’investissement public dans notre pays), plutôt que par la diminution continuelle de ses investissements.

L’Allemagne commence à payer le prix de l’insuffisance de ces investissements publics : les routes, ponts, voies ferrées sont de plus en plus vétuste et nuisent à sa compétitivité.

Une bonne santé publique, par exemple, est non seulement un objectif social des plus importants mais aussi un moyen déterminant d’être compétitive pour une économie. Il n’est pas sûr que le plan d’économie de 3 milliards d’euros, programmé par le gouvernement de Manuel Valls, qui se traduira par une diminution de 22 000 emplois dans les hôpitaux publics aille dans ce sens.

Quant à la compétitivité « coût », elle doit tenir compte non seulement du « coût du travail » mais de celui du capital qui ne cesse d’augmenter.

La « politique de l’offre », ramenée à une politique de l’offre privé et à une baisse du « coût du travail »,  sous la forme de la réduction des cotisations sociale patronales, a été appliquée par la droite avec constance depuis 10 ans. Elle n’a jamais créé un seul emploi ; au contraire, le nombre des demandeurs d’emplois, entre 2002 et 2012, a augmenté de 1 million en France. Pourquoi les « pactes »  de compétitivité et de responsabilité, qui accentuent encore la « politique de l’offre » de la droite, auraient-ils des effets différents ?

Il faut être « réalistes », affirme notre gouvernement : dans le cadre de la mondialisation, il n’est pas possible pour un pays de développer seul une politique de relance. Mais si la « mondialisation » est aussi achevée qu’il le prétend, pourquoi faudrait-il négocier un traité de libre-échange transatlantique ? Comment notre gouvernement peut-il accepter de cautionner la négociation secrète de ce traité (pour les citoyens, pas pour les firmes transnationales) ?  Ce traité n’a qu’un seul objectif : accroître la mondialisation libérale, en nivelant par le bas les normes sociales, sanitaires, financières, environnementales… Tout cela, au nom de la réalité indépassable que serait la « mondialisation ». Elle serait, pourtant, beaucoup plus « indépassable » demain, si le traité transatlantique finissait par être signé.

La meilleure façon de mettre fin à ce déni de démocratie serait que notre gouvernement exige publiquement que les représentants de l’Union européenne quittent immédiatement la table de négociation, et non pas d’attendre, comme le propose la motion A, que tout ait été négocié et qu’il soit beaucoup plus difficile de faire machine arrière.

La relance par la demande, nous la pratiquons depuis 30 ans, notre dépense publique a dépassé les 57 % du PIB (record européen) et notre dette s’achemine vers les 10 % du PIB en 2017.

Les dépenses publiques avaient atteint un point culminant (54,5 % du PIB) (addition de l’impôt et des cotisations sociales….) en 1996. Entre 1996 et 2007, elles resteront toujours inférieures à ce chiffre. Ce qui explique l’augmentation des dépenses publiques après 2007, c’est la récession provoquée par la crise financière de 2007-2008. Sans cette augmentation de la dépense publique, notre économie serait toujours en plein récession. Ce sont pourtant ces « amortisseurs » de crise que l’UE veut mettre à mal !

La « politique de l’offre », au sens où l’entendent la motion A et notre gouvernement, ne peut être, comme pour la droite, qu’une politique de l’ « offre privée » réduite à la baisse du « coût du travail ». Ils ne semblent même pas soupçonner que puisse exister un « politique de l’offre publique ».

La dette publique s’achemine vers les 100 % du PIB en 2017, écrit l’argumentaire de la motion A, indiquant ainsi, sans équivoque, son peu de confiance dans la politique menée par notre  gouvernement. Mais si la dette publique a augmenté, depuis 30 ans,  c’est essentiellement parce que les recettes publiques ont diminué. Du fait des récessions (1993-1994 ; 2009-2012…) de plus en plus fréquentes dans une économie financiarisée, mais surtout à cause de la diminution continue des impôts payés par les grandes entreprises et les particuliers les plus fortunés. A cela, nos deux gouvernements n’ont rien changé : les niches fiscales des grandes entreprises ont encore augmenté de 41 milliards d’euros par an, et l’impôt sur le revenu est toujours aussi peu progressif que sous Sarkozy ou Chirac : 5 tranches d’imposition au lieu de 13 en 1986.

Il faut agir conjointement sur les deux leviers :

Renforcer la demande des ménages en augmentant le pouvoir d’achat : prime d’activité ou baisse engagée de la fiscalité qu’il faut rendre plus progressive

Les impôts des grandes entreprises ont, certes, été considérablement diminués. Il n’en est pas allé de même pour l’impôt sur les revenus les plus modestes. Il a d’abord été accru du fait du gel des tranches d’imposition. Ils ont légèrement diminué en 2014. Mais il s’agit d’une baisse de 3,3 milliards d’euros, au total, sans commune mesure avec les 41 milliards accordés aux entreprises.

Le pouvoir d’achat a subi de plein fouet l’absence de coup de pouce au Smic, le gel de la valeur du point dans la Fonction publique, le gel des retraites (complémentaires et de base), la stagnation des salaires sous l’impact de la montée du chômage et de la précarité, dus à la politique d’austérité et de « réformes structurelles » (dont le but est de facilité les licenciements et de rendre les salariés « taillables et corvéables à merci »…)  imposée par nos deux gouvernements successifs pour répondre aux exigences de la Commission européenne et du Medef.

L’argumentaire de la motion A et du gouvernement de Manuel Valls fait comme si la diminution des dépenses de l’Etat et des collectivités territoriales n’accentuait pas encore la baisse du pouvoir d’achat de ceux qui sont obligés (lorsqu’ils en ont encore les moyens) de faire appel à des services privés pour palier la dégradation des services publics.

L’argumentaire de la motion A oublie, également, que la diminution des dépenses de la Sécurité sociale contribue, elle-aussi, à réduire le pouvoir d’achat de ceux qui peuvent encore payer l’augmentation de leurs assurances complémentaires (mutuelles ou compagnies d’assurance) pour garder les mêmes possibilités d’accès aux soins. Les autres, comme 1/3 des habitants de notre pays, ont renoncé à des soins en 2014.

Cela passe aussi par des améliorations possibles, concernant l’investissement productif public (collectivités locales) comme privés (entreprises)

Le  terme « possible » concernant l’investissement productif public indique les limites de l’engagement proposé par la motion A.

Ce que ne comprennent pas les rédacteurs de la motion A, c’est la contradiction de la situation actuelle que l’on peut résumer ainsi : les entreprises ne veulent pas ; les Etats ne peuvent pas !

Les entreprises ne veulent pas, car elles n’ont aucun intérêt à investir tant qu’elles ne savent pas si leur production supplémentaire pourrait trouver un débouché. C’est ce qu’exprimait clairement le président de la CGPME quand il répondait à la question de savoir si le CICE serait efficace et permettrait d’investir et de créer des emplois « Il faudrait pour cela que les carnets de commande se remplissent ».

Les Etats ne peuvent pas parce que les « règles » absurdes fixées par la Commission européenne et le TSCG leur lient les mains en les obligeant, avant tout, à réduire les déficits publics.

L’investissement public, l’offre publique, c’est pourtant, la seule méthode pour dépasser la contradiction devant laquelle se trouve chaque entreprise qui attend, avant d’investir et d’embaucher, que les autres entreprises aient d’abord investi, embauché pour assurer un débouché à leur production.  Toutes, en réalité, se contentent donc d’attendre et investissent leurs profits dans la spéculation car c’est le plus rentable, en l’absence de débouchés pour une production supplémentaire.

Le développement d’une offre publique permette de dépasser cette contradiction. L’Etat investit massivement, crée des emplois publics (dans la transition énergétique ou les services publics dans les quartiers populaires, les zones rurales ou périurbaines, par exemple) et crée, ainsi, une demande et un débouché pour la production des entreprises privées. Ces entreprises se mettent alors à investir, à embaucher. Les nouveaux salariés du secteur privé se mettent à consommer. Un cercle vertueux est ainsi initié, remplaçant le cercle vicieux actuel de l’austérité qui étouffe la croissance, augmente la dette publique et provoque de nouvelles politiques d’austérité…

IV- Réorienter l’Europe : stratégie d’assaut ou stratégie de mouvement ?

La motion B accuse F. Hollande d’avoir capitulé devant A. Merkel et J-M Baroso au sommet européen de juin 2012, en ne rejetant pas le traité de stabilité ratifié par son prédécesseur dès lors qu’il était compété par une clause de croissance assez symbolique.

François Hollande a, effectivement, capitulé devant la droite européenne en renonçant à son 11ème engagement : « Je renégocierai le traité européen issu de l’accord du 9 décembre 2011 en privilégiant la croissance et l’emploi… » Il a, au contraire, accepté de faire adopter le traité rédigé par Angela Merkel et Nicolas Sarkozy, le TSCG, sans en changer un seul mot, une seule virgule.

Le « pacte de croissance » qui devait compenser ce traité a complètement disparu, sans laisser la moindre trace. Il était, en effet, comme le dit l’argumentaire de la motion A, « assez symbolique ».

C’est ne pas tenir compte de la conjoncture d’alors et de la réalité des rapports de force.

Au printemps 2012, la spéculation internationale contre les dettes souveraines européennes battait son plein, l’implosion de l’euro et de la zone euro était un scénario vraisemblable.

La crise de l’euro n’avait pas éclaté au printemps 2012. Lors de l’arrivée de François Hollande au pouvoir, l’euro avait déjà été « sauvé » 8 fois au cours, à chaque fois d’un « sommet de la dernière chance » : multiples crises de la dette publique grecque, crise irlandaise, crise portugaise, crise espagnole… En s’engageant à renégocier le traité Merkel-Sarkozy dans ses « 60 engagements »,  François Hollande savait donc parfaitement ce qu’il faisait.

L’implosion de l’euro est toujours un scénario vraisemblable. Encore plus vraisemblable qu’en 2012 avec la politique menée par la Commission européenne et les 27 Etats européens (dont la France) qui poussent la Grèce hors de la zone euro, sans bien mesurer les conséquences de leur politique.

Avec l’arrivée au pouvoir, en Grèce, d’Alexis Tsipras, l’UE se retrouve face à un dilemme.

Soit accepter de reconnaître que ce sont les politiques d’austérité et de « réformes structurelles » imposées par la Troïka à la Grèce qui ont produit le recul de 26 % de son PIB, ont plongé 27 % de sa population active au chômage et entraîné l’augmentation de sa dette publique de 113 %, fin 2009 à 187 %, fin 2014.

Soit ne pas reconnaître cette évidence et continuer à vouloir imposer des mesures encore plus dures à la Grèce, en la poussant hors de la zone euro.

Notre parti, lui aussi, est face à ce dilemme, parfaitement exprimé dans les déclarations contradictoire de Jean-Christophe Cambadélis et de Manuel Valls. Alors que Jean-Christophe Cambadélis annonçait, le lendemain de la victoire de Syriza que cette victoire renforçait le « front anti-austérité » en Europe, Manuel Valls, montrant le peu de cas qu’il fait de la parole de notre actuel premier secrétaire, s’est délibérément situé du côté de l’austérité. Depuis Lisbonne, le 10 avril, il exigeait de la Grèce des « réformes plus profondes », ce qui signifie, comme le demandait la Commission européenne, de nouvelles baisses des salaires, des pensions, des prestations sociales, une nouvelle augmentation de la TVA…

Si l’Union européenne continue à exiger de la Grèce qu’elle rembourse une dette impossible à rembourser, et si la BCE coupe l’approvisionnement en euros des banques grecques, la Grèce ne pourra pas faire autrement que faire défaut de sa dette. Or, la dette publique grecque est détenue en grande partie (223 milliards d’euros) par les institutions et les Etats européens. Il ne restera plus qu’à accentuer les politiques d’austérité pour renforcer le capital social de la BCE et écraser, ainsi, dans l’œuf toute possibilité de « reprise ».

En cas de « Grexit », le mythe de l’irréversibilité de l’euro prendra fin.

L’euro ne sera plus une véritable « monnaie unique », comme le dollar, défendue par la banque centrale, au Texas comme dans le Massachussetts. Les marchés financiers tenteront donc, selon leur louable habitude, de « tester » la capacité de la zone euro à défendre son unité en attaquant ses points faibles : le Portugal, l’Espagne, la Slovénie, Chypre, dans un 1er temps. Les taux d’intérêt des pays périphérique de la zone euro se mettront, de nouveau, à augmenter et à diverger fortement de ceux des Etats du nord de l’Union européenne. Ils ont, d’ailleurs, déjà commencé.

La crise de l’euro qui avait simplement été dissimulée sous le tapis, pendant près de 3 ans, ressurgira de plus belle.

La victoire de David Cameron aux dernières législatives britanniques accroit encore le danger. Il avait promis, en cas de victoire, d’organiser un référendum sur l’appartenance ou non du Royaume-Uni à l’Union européenne. En cas de sortie de la Grèce de la zone euro et, du même coup de l’UE, le risque d’un éclatement de l’Union européenne, elle-même,  s’accentuera.

Si le gouvernement français avait engagé une épreuve de force avec ses partenaires, il l’aurait perdue et aurait aggravé considérablement la crise européenne, à un moment de grande fragilité de l’Union.

Il est, certes, difficile d’engager une bataille quand on l’estime perdue d’avance. L’Union européenne est, cependant, encore plus fragile aujourd’hui car, en trois ans, les politiques d’austérité imposées (de façon simultanée, qui plus est) aux Etats de l’UE n’ont fait que renforcer les trois crises que subit l’Europe : économique, sociale et financière.

C’est une illusion de penser qu’il serait possible de résoudre ces trois crises autrement que sur le terrain politique, sans engager la bataille contre la droite européenne pour sortir des politiques d’austérité et de « réformes structurelles » qui sont les sources de la triple crise que connaît l’UE.

Le moment était  particulièrement propice, lors de l’arrivée de François Hollande au pouvoir. Beaucoup de gouvernements européens, même de droite, attendaient qu’il desserre l’étau de la politique mortifère de la Commission européenne.

La crise grecque nous offre une nouvelle « fenêtre de tir » pour changer la donne en Europe. La Grèce tient tête à l’UE avec un PIB qui pèse moins de 3 % de celui de la zone euro. Si la France se rangeait à ses côtés, avec son poids économique (plus de 20 % du PIB de la zone euro) et politique (il n’y aurait pas d’UE sans la France), elle permettrait que le dilemme de l’UE soit tranché en faveur des peuples européens, étranglés par des politiques d’austérité et de « réformes structurelles » qui ne profitent qu’aux banques et aux grandes entreprises.

F. Hollande a mis en œuvre une stratégie de mouvement pour réorienter l’UE, en s’alliant avec l’Italie et l’Espagne et en relançant le couple franco-allemande.

Cette « stratégie de mouvement »  signifiait, en réalité, l’immobilisme le plus complet.

François Hollande a renoncé à renégocier le traité Merkel-Sarkozy.

Il n’a rien fait pour que son « pacte de croissance » de 120 milliards d’euros ne disparaisse corps et biens.

Il a accepté le calendrier de réduction du déficit public de notre pays, fixé, arbitrairement, par la Commission européenne.

Il a entériné, sans coup férir, le recul du budget européen, en complète contradiction avec son 12ème engagement.

Lors de la crise bancaire chypriote, il a souscrit, avec son ministre des Finances, Pierre Moscovici, à toutes les préconisations de la Commission européenne et de l’Eurogroupe. Il a accepté, dans un 1er temps, la mise à contribution de l’ensemble des déposants des quatre banques grecques proches de la faillite ; puis, dans un 2ème temps la confiscation des seuls dépôts supérieurs à 100 000. De quoi provoquer une solide panique bancaire dès le prochain accident financier.

Il a entériné les 1 140 milliards d’euros accordées aux banques sans contrepartie par le plan Draghi, la chimère du plan Juncker, la mystification d’une Union bancaire sans la moindre consistance, une taxe sur les transactions financières vidée de son contenu (57 milliards de recettes étaient annoncés en 2012 contre 4,7 milliards aujourd’hui)…

Il a entériné les politiques d’austérité et de « réformes structurelles » qui ont considérablement augmenté les dettes publiques de la Grèce, de l’Irlande, du Portugal, de l’Espagne, de l’Italie et bien sûr de la France, tout en étouffant leur croissance et en provoquant un chômage dont les chiffres atteignaient ceux des années 1930 : 27 % en Grèce, 26 % en Espagne, 17 % au Portugal…

Les pays excédentaires d’Europe du Nord ont relancé leur consommation populaire, puis leurs investissements pour servir de locomotive à l’Europe. L’Allemagne s’est dotée d’un Smic à 8,50 euros de l’heure, les salaires y augmentent de 3 % par an, tandis que le chômage est tombé à 4,7 %.

L’Allemagne n’a rien relancé du tout.

Ses investissements publics sont notoirement insuffisants et nombre de ses infrastructures sont aujourd’hui en piteux état.

Les salaires ont augmenté en Allemagne parce que les salariés et leurs syndicats se sont battus pour y parvenir.

Le salaire minimum allemand n’a pas grand-chose d’un Smic : il ne concerne ni les « seniors » ni les jeunes de moins de 25 ans et de nombreux secteurs ne sont pas concernés.

Quant au 4,7 % de chômage ils tiennent à trois raisons essentielles. D’abord à la baisse brutale des salaires avec les réformes Schröder qui a permis à l’Allemagne d’imposer un véritable dumping social aux autres pays européens. Ensuite à la comptabilisation des « mini-jobs » à 400 euros par mois comme de véritables emplois. Enfin, à la baisse dramatique du nombre de jeunes (le taux de fécondité s’élève à 1,4 % en Allemagne contre 2,1 % en France). Il n’y a pas de chômage des jeunes en Allemagne tout simplement parce qu’il y a très peu de jeunes, ce qui, à terme, est un drame pour ce pays.

La Commission a assoupli les délais nécessaires pour le retour des pays en déficits excessifs sous la barre des 3 % de déficit public.

La Commission européenne a été obligée de faire de nécessité vertu. Elle a constaté que les rythmes de réduction des déficits qu’elle avait imposés à la France étaient intenables car ils auraient mené à une récession beaucoup plus profonde la 2ème économie de la zone euro. Elle a donc troqué un allongement du calendrier contre des « réformes structurelles » qui, les unes après les autres, rognent tous les acquis sociaux accumulés depuis la fin de la seconde guerre mondiale.

La relance par l’investissement a été mise en place (à l’initiative du PSE) et un programme de 315 milliards d’euros pour financer des projets d’intérêt européen a été adopté.

Le plan Juncker a autant de consistance que le « pacte de croissance » de 120 milliards d’euros de François Hollande. Il a, très certainement, le même avenir.

(Cf. l’argumentaire sur « Le plan Juncker ») (dejà publié précédemment)

La BCE a élargi ses missions et conduit désormais une politique monétaire expansionniste.

La BCE est « indépendante », affirme le traité de Lisbonne. La France n’a donc rien à voir avec le changement de politique de Mario Draghi, et Manuel Valls se pare des plumes du paon. Ces plumes sont d’ailleurs plutôt celles d’un poulet car le « plan Draghi » consiste à accorder 1 140 milliards aux banques européennes, sans exiger la moindre contrepartie en termes de crédit aux entreprises ou au ménage.

(Cf. l’argumentaire sur « Le plan Draghi ») (déjà envoyé)

Les taux d’intérêt sont en conséquence tombés au plus bas dans la quasi-totalité des Etats-membres et la parité euro-dollar est redevenue favorable à nos exportations.

Les taux d’intérêts ne sont pas tombés très bas pour tous les pays de l’UE, loin de là. Et si la crise grecque se dénoue par un « Grexit », les taux d’intérêt des Etats périphériques augmenteront à grande vitesse, car le lâchage de la Grèce aura livré leurs dettes publiques à la spéculation des marchés financiers.

Ceux qui, hier, se vantaient d’un euro cher qu’ils baptisaient « euro fort » applaudissent aujourd’hui la baisse de la valeur de l’euro par rapport au dollar. C’est un progrès mais il ne faut pas oublier deux choses. La première est qu’à la différence de la Réserve fédérale américaine, la BCE n’a toujours pas pour mission d’assurer la croissance économique. Mario Draghi a été très clair à ce sujet : son seul objectif reste une inflation inférieure à 2 %. La deuxième est que la baisse de l’euro dépend tout autant de la politique de la Réserve fédérale des Etats-Unis.

De nouveau, en Europe, la croissance, l’emploi, l’investissement sont à l’ordre du jour des sommets européens.

La motion Valls-Cambadélis a  raison de préciser que ce retour n’est à l’ordre du jour que « dans les sommets européens ».

Dans la réalité, l’ordre du jour est très différent : la croissance est toujours atone, une prévision de croissance de 1 % en France est reçue comme un miracle ; 1,3 millions de personnes supplémentaires sont au chômage (catégorie A, B et C) en France, depuis mai 2012 ; les prévisions d’augmentation de l’investissement sont le fruit d’études basées sur des déclarations d’intention de chefs d’entreprises, à chaque fois démenties par les faits depuis 2011.

Rien de tout cela n’aurait été obtenu par une épreuve de force, à laquelle la zone euro n’aurait sans doute pas survécu.

Certes, il n’y a pas eu d’épreuve de force mais, rien, non plus n’a été obtenu.

La zone euro n’est pas du tout certaine de survivre à la crise grecque. Les échéances n’ont été que repoussées et la chute risque d’être encore plus dure.

Les prochaines étapes sont :

La mise en œuvre à grande échelle  et le renforcement du plan Junker, le parachèvement de l’Union bancaire

Une chimère +  une coquille vide = pas grand chose (voir plus haut).

L’élaboration d’un traité social européen

Le traité de Lisbonne a été adopté (malgré les 55 % de « non » au référendum sur le Traité Constitutionnel européen en 2005) grâce à la révision constitutionnelle adoptée par le Parlement réuni en Congrès à Versailles en février 2008. La majorité des 2/3 nécessaire à Nicolas Sarkozy a été obtenue grâce au vote de la majorité des parlementaires socialiste (dont François Hollande, Jean-Marc Ayrault, Manuel Valls, Jean-Christophe Cambadélis…)

Le traité de Lisbonne interdit toute harmonisation fiscale et sociale puisqu’il faut l’unanimité des Etats-membres pour y parvenir. Un traité social européen est donc impossible dans le cadre de ce traité. Mais sans doute Jean-Marc Ayrault, Manuel Valls et Jean-Christophe Cambadélis, tous signataires de la motion A, l’ignoraient-ils…

On peut, au demeurant, présenter un bon bilan économique et social – comme ce fut le cas de Lionel Jospin en 2002 – et perdre les élections.

Il est possible, en effet, de perdre avec un bon bilan économique et social. Mais cela ne prouve surtout pas qu’il serait possible de gagner avec un bilan économique et social exécrable ! Nos électeurs ne nous l’ont pas envoyé dire aux municipales, aux européennes, aux sénatoriales et aux départementales.

Si nous ne changeons pas de politique, il en ira de même aux européennes de 2016, à la présidentielle et aux législatives de 2017. Nous avons deux ans pour changer de cap et répondre aux aspirations de notre électorat, comme le propose la motion B.

Le socialisme c’est d’abord un projet de civilisation.

Le projet de civilisation que nous propose le gouvernement de Manuel Valls (dont tous les membres sont signataires de la motion A) a-t-il quelque chose à voir avec le projet de loi Macron qui organise la marchandisation du sang alors que notre pays se singularise, avec fierté, par le don du sang et l’impossibilité d’en faire commerce ?

Ce projet de civilisation a-t-il quelque chose à voir avec l’extension du travail du dimanche (le seul jour où une vie familiale et sociale un peu apaisée reste encore possible) et le recul du travail de nuit de 21 heures à 24 heures, pour les salariés du secteur du commerce de proximité, un salariat particulièrement exploité, composé à 80 % de femmes ?

(Cf. argumentaire Projet de loi Macron) (paru ici plusieurs fois)

 

Jean Jacques Chavigné


[1] Insee Première n° 1399 – Mars 2012 « Un tissu productif plus concentré qu’il ne semblait ».

[2] Excédent brut d’exploitation / Valeur ajoutée (en %).

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