Pourquoi exiger « jusqu’au bout » le retrait du projet de loi El Khomri conférence faite à Nice jeudi 16 juin, retranscription

Rencontre de la Pensée Critique à Nice le 16 juin 2016 : 220 personnes dans la salle place garibaldi, maison des associations,
1 kilo 400…


On a presque tous vu Pujadas présenter le Code du travail au journal télévisé.
1 kilo 400 ! 6 millions de personnes regardent cela, et on leur présente le Code du travail, 1 kg 4

de cette façon ; pas par les idées qu’il contient, ni par l’intérêt qu’il revêt pour elles, mais par son poids.

1 kilo 400 ! Du point de vue de la propagande, c’est terrifiant parce qu’on arrive à dire aux gens, en une seule image, un seul geste : vous croyez que c’est votre code ? Mais non !

1 kilo 400 ! Vous ne l’avez jamais lu, vous ne le lirez jamais. L’avez-vous ouvert ? Non ! Ils ont bien raison ceux qui veulent le diminuer.

C’est vrai que la plus part des gens ne savent pas ce qu’il y a dans le Code du travail, il est le moins enseigné des Codes, et pourtant cela conditionne leurs vies. Le Code du travail, c’est sûrement le texte le plus intime pour les 18 millions de salariés du privé et les 850000 salariés du public qui sont de droit privé. C’est le code le plus vital. Même ceux qui ne le connaissent pas auront besoin de lui un jour. C’est le code le plus essentiel parce que, finalement, notre travail en dépend ; notre salaire ; « si vous avez un booon code, vous aurez une garantie pour votre boulot ! Et vous aurez peut- être un bon salaire. Si vous avez un mauvais code, vous n’aurez rien ».

Le Code, c’est une construction d’un siècle d’histoire. Il y en a 27 en tout. Tous aussi gros.

1 kilo 400. Le Code allemand ? 1 kilo 700. Code des affaires maritimes. Code du commerce. Code civil. Code pénal. Code des impôts. Pourquoi ne se sont-ils pas attaqués à celui-là ? Ils auraient pu mettre un chapitre sur Panama. Ça aurait été « réforme » populaire, celle-là. Il n’y aurait pas eu de manif’ contre. Frapper ceux qui spéculent. Faire rentrer 80 milliards de fraude fiscale ; 100 milliards d’optimisation fiscale. C’était facile. Politique de gauche populaire faisant litière des déficits. Mais ce n’est pas ce qu’ils ont fait.

L’origine du Code du travail c’est la catastrophe de Courrières, dans le Pas-de-Calais, en 1906. Coup de grisou. 1099 mineurs vont mourir. Et le patron se comporte comme un salopard. Il refuse qu’on parte à la recherche des survivants et fait reprendre le travail tout de suite. Son argument : ne laissons pas la place au charbon polonais, auquel cas je n’aurais plus de sous, je fermerais la mine et mettrais la clé sous la porte. Autant d’arguments qui ont toujours cours aujourd’hui. Oui, mais il va y avoir des survivants. Treize jours plus tard, des mineurs parviennent à s’échapper des galeries par leurs propres moyens et à revenir au jour. Le choc dans l’opinion est terrible. Il n’y a ni BFMTV ni iTélé, mais la colère contre le patron qui avait voulu les laisser mourir est si forte qu’une décision historique va être prise par Clémenceau (« que Valls connaît bien ») : la création du Ministère du travail CONTRE  le Ministère  de l’économie.

Voilà l’origine du Code du travail : « défendre les droits des humains qui sont au travail contre les exigences de la productivité, de la rentabilité, de la compétitivité, de la flexibilité ». Pas Code des entreprises : mais Code du travail. Pas Code des patrons, Code du travail. Il nait vraiment quatre ans plus tard, en 1910. Trois lois en décembre. 80 décrets. Il n’y a que 3 millions de salariés à l’époque. En 2002, au moment des 35 heures, le salariat c’est 18 millions de salariés. Dans l’intervalle, le Code du travail passe de quelques pages à 600-700 pages. Les luttes ont imposé des précisions, que ce soit sur les chaussures de sécurité, les gardes corps, le calcul des heures de travail dans des conditions correctes, fiables et transparentes. C’est un code vivant, qui s’enrichit au fil des grèves, des occupations, des manifestations, des négociations, des batailles d’amendements au coeur de la nuit à l’Assemblée nationale. Texte vivant. Ce Code, qui est le produit des luttes sociales, n’est pas tout à fait un texte comme les autres. Il est l’expression des rapports de forces sociaux. Il les incarne à sa façon. Des universitaires ont dit, ces derniers temps, qu’ils allaient faire un séminaire et réécrire le Code ; apprécier, devant une tasse de thé, jusqu’où il faut aller dans la protection du licenciement ; mais ce n’est pas comme cela que ça se fait un Code du travail. Cela se fait parce qu’il y a une bagarre, que l’on gagne ou que l’on ne gagne pas. Le Code représente les rapports de forces et leurs évolutions. Ce ne sont pas des universitaires qui vont faire un Code !

L’histoire du Code est celle de la réduction du temps de travail. G. Filoche remonte à 1840. Le docteur Villermé fait la première étude sérieuse sur la condition des ouvriers, des ouvrières, des enfants, des femmes qui travaillent dans ce qu’on appelait à l’époque les fabriques. Dans les vingt villes de France qu’il a choisies pour son étude, il voit des gens qui travaillent 15, 16, 17, 18 heures par jour, et qui meurent au travail. Sa conclusion : il-faut- travailler-moins. Il faudra 80 ans pour passer de la journée de 17 heures à la journée de 10 heures… Ce n’est inscrit dans les textes qu’en 1919… Dans les textes seulement, parce que la disposition n’est pas respectée… À l’époque, nos grands parents se battaient pour les « 3 x 8″ : 8 heures de travail, 8 heures de loisirs et 8 heures de sommeil. Mot d’ordre génial pour G. Filoche. Parce que le corps humain n’est ni « semainisable », ni mensualisable, ni annualisable. Dans la loi El Khomri, au contraire, il est prévu de calculer les heures supplémentaires sur trois ans ! Pour G. Filoche, la durée du travail doit être liée à la vie des humains, pas aux besoins de la production. Il faut protéger les humains des exigences de la production. Il faudra encore 70 ans pour passer de la semaine de 40 heures à la semaine de 35 heures.

G. Filoche fait remarquer que pendant cette période nous avons fait quatre choses en même temps :

On a produit plus : entre 1936 et 2002, le produit intérieur brut a sans doute été multiplié de 6, 7 ou 8 fois. En fait, on ne sait même pas calculer exactement l’augmentation.

On a gagné plus : même si on ne sait pas le calculer précisément non plus, on sait que notre niveau de vie s’est développé considérablement. 5 fois ? 6 fois ? 7 fois ?

On a doublé le nombre d’emplois : 9,5 millions de salariés au temps du Front populaire, 18 millions au moment du passage aux 35 heures.

Et on a fait tout ça en travaillant moins puisque nous sommes passés de 40 heures à 35 heures !

On peut donc le faire ! Qu’est-ce qui imposerait aujourd’hui de faire tourner la roue de l’histoire à l’envers ?! De réaugmenter la durée du travail ?! De travailler plus et gagner moins ?! Il n’y a pas d’argument ! D’autant que pendant ces 70 ans notre pays a connu une Guerre mondiale et deux guerres coloniales, ce qui est autre chose que la crise prétendue dont o nous rebat les oreilles tous les matins sur France inter. Ici, G. Filoche ne peut se retenir d’avouer qu’il a un faible pour… Dominique Seux (rires).

Aujourd’hui, il faut passer à 32 heures. Si on a 6.125.000 chômeurs, toutes catégories confondues, Outre-mer inclus, c’est parce qu’on est en retard sur la réduction du temps de travail. Il faut redéfinir le partage du travail. Cette problématique est présente dans toutes les sociétés, de tous temps. Chez nous, en ce moment, le travail est partagé sauvagement : 6 millions de chômeurs et 6 millions de gens qui travaillent 50 heures. Nous voulons un partage civilisé, organisé socialement, maîtrisé. Au passage, c’est pour cela qu’il faut un Code du travail. Ou c’est Mad Max ou c’est l’organisation sociale. Durée du travail calculée, respectée, contrôlée, -et partagée. Nous avons d’autant plus intérêt à le faire en France que nous sommes en plein boom démographique. Depuis l’an 2000, en France, il y a eu 850.000 naissances par an, c’est-à-dire 2,5 fois plus que ce qui avait été projeté. Dans deux ans, le bébé de l’an 2000 aura 18 ans, et il arrivera bientôt sur le marché du travail. Cela veut dire que si rien n’est fait il faut s’attendre, chaque année, à des centaines de milliers de chômeurs en plus. Ce ne sont pas les emplois jeunes ou les contrats nouvelle génération qui sont susceptibles de régler ce problème. Il faut un partage du travail, une réduction du temps de travail. Veut-on d’une société avec 10 millions de chômeurs en 2030 ? Pour le coup, ça sera vraiment Mad Max…

Pour continuer la réduction du temps de travail, il faut un Code du travail. Cela ne se fera pas entreprise par entreprise. Il faut des lois. S’il n’y avait pas eu de lois après les accords de 36, les 40 heures n’auraient pas duré une semaine ! C’est parce qu’elles ont été inscrites dans la loi que les 40 heures sont restées. C’est la loi qui compte. Et la loi, c’est le Code du travail.

Autre point avant d’entrer dans le vif du sujet : qu’est-ce qui caractérise un contrat de travail ? C’est-un-lien-de-subordination-juridique-permanent. Dans l’entreprise, on est sub-or- don-né. C’est l’employeur qui décide la naissance du contrat, la gestion du contrat, la rupture du contrat. Et en contrepartie de la subordination, nous avons des droits. C’est parce que nous sommes subordonnés qu’il y a un Code du travail. Il n’y a pas de liberté dans l’entreprise, pas de citoyenneté, pas d’égalité. Nous sommes soumis, mais nous avons des droits. Ne succombons pas à leur propagande, dit G. Filoche. « Un patron nous donne du travail » qu’ils disent, mais un patron n’a jamais rien donné à un salarié ! Nous vendons (le plus cher possible) notre force de travail à des patrons qui nous l’achètent (le moins cher possible). C’est pour cela qu’il faut un Code, faute de quoi le contrat se conclurait au couteau. Ce n’est pas Ghosn et Tabarès qui font vivre 50.000 personnes, c’est 50.000 personnes qui les font vivre. Il y a bien exploitation de l’homme par l’homme. Et c’est encore pour cela qu’il faut un Code du travail, pour réduire l’exploitation de l’homme par l’homme, pour régir le partage des fruits du travail, pour améliorer les conditions de travail, pour lutter contre les accidents du travail.

L’autre jour, à Asnières, dit G. Filoche, un jeune de 19 ans est tombé d’un échafaudage ; il avait un baudrier, pourtant ; mais il n’y avait pas de point d’ancrage à son baudrier… « Je ne veux pas moins de Code du travail, dit-il ; je veux plus… Pas moins de contrôles, plus… Pas moins de sanctions, plus… ». Il y a 500 morts par an au travail. 4500 handicapés. Des dizaines de milliers de maladies professionnelles, la France étant d’ailleurs le pays en Europe qui les recense le moins et où leur reconnaissance est la plus difficile. 100.000 morts par l’amiante. 650.000 arrêts du travail pour blessure. Si les coups de grisou sont terminés, ils ont été « remplacés » par les accidents cardiaques (150.000) et les AVC (100.000), dont la moitié est liée au travail.

Un dernier mot de préambule, dit G. Filoche, sur cette idée selon laquelle on serait à égalité dans l’entreprise. Co-partenaires. Il raconte cette scène mille fois vécue de la DRH qui, lors de son arrivée dans l’entreprise, lui dit : « Mr l’inspecteur, je vous présente mes collaborateurs ». « Ah bon, ils sont clandestins ? Vous ne les avez pas déclarés ? Ils ne sont pas sur le registre du personnel ? ». On ne peut être à la fois subordonné et collaborateur. Ce mot ne figure pas dans le Code du travail. Il parle de salarié. Ces pratiques langagières cherchent à nous faire croire que dans l’entreprise tout le monde est dans le même « challenge », le même « défi ». Nous sommes tous « co-responsables » de l’entreprise. À égalité, et non pas subordonnés donc. Le patron et nous sommes dans le même bateau, sous le régime, -comme dit si bien le MEDEF, -de « la soumission librement consentie » (« compliance whithout pressure »). Jusqu’à ce qu’il parte avec le bateau… Nous laissant sur le quai… Au Pôle Emploi… Ce jour-là, nous comprenons que nous n’étions pas « collaborateurs », mais bien subordonnés… Ce jour-là aussi, on peut se demander si on a des droits face au licenciement… Ah tiens, que dit le Code du travail ?… Pour mon salaire… Pour mes indemnités…

Le MEDEF. Parlons du MEDEF. Il dit qu’il faut en finir avec le Code du travail. Mme Parisot dit que la liberté de penser s’arrête là où commence le Code du travail. Elle a dit aussi : la vie, la santé, l’amour sont précaires ; pourquoi le travail ne le serait-il pas ? On ne peut pas être plus barbare que ça. Si on dit que l’humanité c’est la précarité, on la trahit dans toute son histoire. Dès l’âge des cavernes, on luttait contre la précarité. On ne voulait pas avoir mal. On voulait boire, manger, vivre. On a inventé l’agriculture pour lutter contre la précarité de la cueillette ; l’élevage pour lutter contre la précarité de la chasse. Et nous luttons tous même contre la précarité de nos amours. Mais Mme Parisot ne voit là que cinquante siècles d’erreur. Vive Cro-Magnon. Soyons tous précaires ! Quand Gérard Larcher était ministre du travail il a dit qu’il y en avait « assez que les Ayatollah de la Cour de cassation donnent des interprétations salafistes des temps forts du Code du travail ». Au mois d’août dernier, enfin, Gattaz a dit : « Le Code du travail est l’ennemi n° 1 des patrons ». Pas le chômage, le Code du travail. La vraie phrase importante et signifiante c’est Hollande qui l’a prononcée dans sa conférence de presse de septembre 2015 : « Nous allons adapter les droits du travail aux besoins des entreprises ». En une seule phrase, c’était la mise à mort de cent ans de notre histoire. Ça fait cent ans qu’on se bat pour adapter les entreprises au droit du travail, et voilà Hollande qui dit qu’on va faire le contraire ! Et c’est d’ailleurs l’article 1er de la loi El Khomri. Article essentiel, qui marque une rupture historique, juridique, théorique, pratique avec un siècle d’histoire. G. Filoche insiste : c’est vraiment la casse de cent ans de Code du travail. Ils ont essayé de banaliser, bien sûr : la loi n’est pas si grave que ça, on a enlevé beaucoup de choses, on a atténué. Mensonges ! Ils n’ont rien enlevé, rien atténué. Ils ont même ajouté des choses. Le MEDEF, tout en disant qu’il n’y a plus rien dans la loi, implore le gouvernement de ne pas céder. Mais s’il n’y a plus rien dans la loi, quelle importance ?… Jeu de rôles ! En fait, la loi est très contre-révolutionnaire. Valls l’avait d’ailleurs annoncé : pas de réformette, mais une révolution. Oui, contre-révolution. Ce que des millions de gens ont compris instinctivement, même s’il y en a d’autres millions qui, en raison de la propagande acharnée, sont incertains. 1 kilo 400. Mais les gens qui disent ce genre de chose savent bien qu’ils trompent leur auditoire. Ils savent bien que dans le Code il n’y a que 675 pages de lois (250 grammes ?…) et que tout le reste, -3300 pages, -est constitué des commentaires. C’est comme si vous éditiez Françoise Sagan amendée par Marcel Proust…

« Regardons donc maintenant ce qu’il y a dans cette loi !, lance G. Filoche ». On parle souvent de l’article 2, qui inverse la hiérarchie des normes, mais il faut bien voir que le Code va être restructuré dans son architecture même. Première partie : le préambule et les principes. Deuxième partie : le champ de la négociation. Troisième partie : les lois supplétives. Celles-ci – qui doivent être réécrites jusqu’en 2019 – sont destinées à intervenir dans les domaines où la négociation n’aura pas tranché. Avec cette méthode, le futur nouveau Code sera un résidu, un complément, qui interviendra là où la négociation n’aura pas fait son oeuvre.

Le préambule – Il est dû à Robert Badinter. Voilà un homme pour qui on peut avoir beaucoup de respect ; qui a honoré l’humanité en luttant contre la peine de mort ; mais qui s’est déshonoré sur la question du droit du travail ; et ceux qui ont utilisé son nom également.

Badinter a fait un travail absolument scandaleux. Plus de durée légale du travail. Elle devient la « durée normale ». Annulées les 40 heures, les 39 heures, les 35 heures ; exit Villermé. Plus de durée maximale. Plus de repos quotidien. Tout est discutable dorénavant. Hollande et Valls cassent ainsi ce qu’ont fait Blum, Mitterrand et Jospin.

Le titre de la loi dit d’ailleurs beaucoup de choses : Loi pour les entreprises et les actifs. Pourquoi les entreprises d’abord ? Pourquoi mettre sur le même plan les entreprises et les actifs ? Pour les raisons évoquées plus haut : c’est pour mettre salariés et patrons sur le même plan, celui de « collaborateurs ». Cette loi aurait ainsi pu s’appeler : Loi pour les entreprises et les collaborateurs. Pourquoi les actifs ? Parce qu’ils veulent mêler plus tard le Code du travail, le Code civil et le Code commercial. Parce que – TAFTA aidant – on va changer de nature de contrat. On va nous « Taftaïser ». Badinter dit encore que le travail des enfants sera interdit en- dessous de 16 ans… sauf si la loi en décide autrement. C’est rassurant… Badinter encore : la rémunération sera versée avec périodicité et régularité. La mensualisation, qui existe depuis 1971, n’est pas mentionnée. Elle pourra être remise en cause. On pourra nous payer tous les quinze jours, tous les mois, tous les trois mois, ou à la tâche, ou pour une mission, ou pour un chantier.

Sur les discriminations aussi Badinter a fait fort. Toutes les discriminations (par l’âge, le sexe, le handicap, l’origine, l’orientation sexuelle…) sont très bien énumérées dans le Code actuel. Dans le texte de Badinter il est seulement question « des discriminations, notamment religieuses », ce qui revient à suggérer que le législateur place au premier rang ce type de discrimination, et ne peut qu’ouvrir un boulevard, devant les tribunaux, aux avocats qui voudront plaider dans ce sens.

D’une manière générale, le texte de Badinter renvoie la plupart des questions à la négociation.

Deuxième partie : le champ de la négociation – G. Filoche aborde pour commencer la question de la hiérarchie des normes, souvent évoquée dans le cadre du débat en cours. Cette polémique est sans aucun doute importante, mais la formule à travers laquelle elle est portée dans le débat public est, -il faut bien l’avouer, -absconse. « Imagine-t-on, demande G. Filoche, des manifestants défiler derrière une banderole Contre la hiérarchie des normes ? ». La hiérarchie des normes est la suivante : au sommet les lois-cadres, puis les lois, les accords interprofessionnels, les accords de branches, les accords d’entreprises. Jusqu’à présent, l’ordre public social se diffusait de haut en bas, de sorte que les lois de la République viennent à s’appliquer « chez le boulanger du coin ». Le droit universel se développait et s’installait partout pour protéger l’ensemble des salariés. C’est un ordre où la République l’emporte sur le contrat et le marché.

Ce qu’annonce la loi, c’est comme si on mettait un morceau de sucre en position verticale dans notre café ; au début, le haut du morceau de sucre est visible à la surface du café ; mais, petit à petit, le morceau va s’affaisser ; à la fin, le sucre a disparu, et on se retrouve avec un café bien sucré. C’est ce qui va arriver à la hiérarchie des normes ; elle va disparaître ; les lois de la République vont disparaître comme le sucre dans la tasse de café.

G. Filoche prend l’exemple concret des heures supplémentaires. Elles vont pouvoir passer de 25% à 10%, voire être compensées. Le texte dit, en effet, qu’elles peuvent être majorées ou compensées. Jusqu’à présent les HS étaient majorées à 25%. On peut discuter de ce taux, et juger que s’il était à 50% cela rendrait les HS plus chères et favoriserait l’emploi, mais ce n’est pas le sujet ici. Avec la loi, les HS ne sont plus d’ordre public ; elles peuvent être négociées. C’est en cela que les 35 heures disparaissent.

G. Filoche se fait encore plus précis, et évoque des situations d’entreprises du IIIè arrondissement de Paris qu’il a connues.

1) Rue St Martin – Habillement – 45 salariés – Patron de combat – Pas de délégué chez lui – Quatre rangées de dix femmes chacune qui travaillent sans arrêt sur les machines – La contremaîtresse est sur une estrade – Il faut lever le doigt pour aller faire pipi – Dans cette boite, avec la loi El Khomri, le patron va monter sur l’estrade, à côté de la contremaîtresse, et il va dire : « C’est simple, nous ne pouvons plus payer les HS 25% ; dorénavant, nous allons les payer 10% ». Et il va demander : « Y’a quelqu’un qui est contre ? ». Personne ne va broncher, évidemment. Elles vont toutes baisser le nez sur leur machine. Bien sûr, elles vont faire le calcul. Elles en ont besoin de ces HS avec le petit salaire qu’elles ont. Elles vont calculer fissa ce qu’elles perdent, mais elles ne vont rien dire.

2) Rue Meslay – Habillement – 35 salariés – Patron plus sympa – Pas de délégué du personnel pour autant – Le patron décide de rester à 25%, considérant qu’il a assez de marge et que ses salariées, qu’il aime bien, en ont besoin – Mais, dans ce cas, c’est le banquier qui va arriver et qui va dire au patron que son ratio de charges salariales ne permet pas de dégager suffisamment de marge. Or, les banquiers aiment bien les entreprises qui ont des marges fortes. Il va lui rappeler qu’à la fin de chaque trimestre il a des difficultés de trésorerie ; qu’il a besoin de lui, banquier, pour passer ce cap ; que lui, banquier, veut bien l’aider à passer ce cap difficile et périodique, mais s’il s’aide lui-même. Avant El Khomri, le patron pouvait dire non au banquier ; lui rappeler que de par la loi les HS sont à 25% ; mais avec El Khomri, le « patron gentil » va aller voir ses salariées et leur dire qu’il va bien falloir passer à 10%, sinon le banquier menace de le lâcher ; si je ne vous mets pas à 10%, on est tous morts qu’il va dire ; je ferme la boite. Ça me fend le cœur, mais …10%. Et il va faire comme celui de la rue St Martin.

3) Rue ND de Lazareth – Habillement – 15 salariées – Patron voyou – Le comptable est aussi voyou que lui – Des emplois non déclarés – Ne paye pas toutes les HS – L’inspection du travail à déjà dressé plusieurs procès verbaux – Le comptable fait remarquer au patron qu’il y a moyen d’échapper à l’augmentation des HS : en les compensant. « On leur donne un blouson à la fin du mois ».

Telle est la vérité de la loi El Khomri. Dans une même branche, dans trois entreprises situées à trois rues d’intervalle du même arrondissement de Paris, la concurrence déloyale défavorable fera baisser les salaires. Et ce qui vient d’être dit pour les HS se produira ensuite sur tous les sujets. Par exemple, le congé pour le décès d’un proche fera aussi l’objet de pratiques diversifiées. La loi El Khomri n’avance pas de chiffre sur ce sujet ; il sera donc réglé par les lois supplétives. Deux jours, peut-être, c’est-à-dire la moitié de ce qui était prévu avant… G. Filoche martèle : « Ça se passera comme ça sur tous les sujets avec la nouvelle architecture du texte en trois parties ».

Autre exemple : Airbus à St Nazaire. Grosse boite. Syndicats forts. Le patron fait déplacer les pointeuses du vestiaire au local des machines, ce qui décale la prise effective de poste d’une vingtaine de minutes (le temps de traverser la cour et divers ateliers). Les syndicats protestent. Le patron leur dit : on négocie. Résultat : les heures sont payées maintenant 6 € pour 10 heures au lieu de 18 €, ce qui fait 2/3 de perdus sur ces heures. C’est négocié ! Voilà de la pure loi El Khomri.

Toulouse. Centre d’appel « Téléperformance ». 400 salariés. Le patron informe ses salariés que, dorénavant, les pauses pipi seront demandées par courrier électronique. Les salariés s’insurgent. Le patron, qui-reconnaît-qu’il-a-un-peu-exagéré, concède une négociation. Tout y est passé : les pauses, le nombre d’appels par heure, etc., etc. Dans des conditions toujours plus défavorables puisque maintenant on peut négocier en-dessous de la loi.

Smart. Daimler. Moselle. Ils ont expérimenté la loi El Khomri avant tout le monde. Le patron dit : vous allez travailler 39 heures (au lieu de 35) payées 37, sinon j’emmène l’entreprise en Slovénie. 56% du personnel a voté pour, mais 62% des ouvriers ont voté contre. Les syndicats majoritaires – CGT et CFDT (dont la fédération métallurgie est contre la loi El Khomri nationalement) – n’ont pas signé. Qu’a fait le patron ? Il a convoqué chaque salarié et lui a fait signer un contrat individuel avec un avenant prévoyant de travailler 39 heures (au lieu de 35) payées 37. 90% ont accepté. Pour que la boite ne parte pas en Slovénie.

La FNAC. Les salariés ne veulent pas travailler le dimanche. Les organisations majoritaires refusent le travail du dimanche. Pour ces cas-là, la loi El Khomri invente le référendum d’entreprise contre les syndicats majoritaires. On pourrait être tenté de penser que c’est démocratique, puisque c’est un référendum ; non : voter avec un pistolet sur la tempe (du genre : si tu ne viens pas travailler le dimanche, je te vire le lundi), ce n’est pas démocratique. Oui, mais si des gens sont volontaires ? On l’entend souvent cet argument. G. Filoche martèle encore : en droit du travail, le volontariat n’existe pas. « Essayez de travailler le dimanche si votre patron ne veut pas… Essayez de ne pas travailler le dimanche si votre patron veut… « . Mais enfin, entend-on encore, dans le contexte où les syndicats n’ont plus de syndiqués, le référendum peut redonner du souffle à la représentation ? Erreur là encore : G. Filoche indique que pour être un syndicat majoritaire il faut être un peu plus fort que les députés et les élus politiques en général. Une députée a été élue récemment à Nantes avec 12,4% des inscrits. Ce n’est pas possible, cela, dans le monde professionnel car il y a un quorum ; il faut 50% des inscrits, et 50% des 50%. Chapeau les syndicalistes ! Qui connaît ces dispositions ? On dit aussi : ils n’ont pas beaucoup d’adhérents… C’est vrai : 8%. Mais, en France, nous n’avons pas un syndicalisme d’adhésion. Cela n’empêche pas que ce soit un syndicalisme de lutte, capable de jeter des millions de personnes dans la rue, ce que ne parviennent pas à faire, dans d’autres pays, des syndicats qui ont pourtant des millions d’adhérents. Bref : pour contourner des syndicats dont la représentativité est incontestable, on invente un référendum qui pourra être enclenché par un syndicat qui a 30%. Celui-ci pourra demander à l’employeur de soumettre une question au référendum, contre les syndicats qui auront eut plus de 50% ! Il fallait le trouver ! Qui plus est, le référendum ne comporte pas de quorum. Il peut se faire le samedi matin avec 20% de votants, et il sera valable, y compris contre ceux qui auront été élus avec un quorum de 50%. Le référendum n’est donc pas une formule démocratique.

Dans les entreprises de moins de 50 salariés (97% du total), la loi prévoit deux modalités : la décision collective, la meute autrement dit (cf. supra les entreprises de l’habillement), et le mandatement. Kézako ? Un mandaté, ça peut être le neveu du patron ou le comptable ; qui va signer le passage des HS de 25 à 10% ; pas besoin de parler ; même pas besoin d’en parler aux salariés ; le mandaté le fait. Bien sûr, il faut que le mandaté soit accrédité par un syndicat. Mais il n’y a pas d’ »inquiétude » à avoir à ce sujet : il y en aura bien des syndicats « bienveillants » qui accepteront de prendre des mandatés… On l’a vu pour les 35 heures : même sans syndicaliste, les petites entreprises – qui avaient trouvé des mandatés – ont reçu les subsides publics prévus par le dispositif.

G. Filoche, qui n’a pas la mémoire courte, rappelle qu’avant même la loi El Khomri d’autres lois ont dégradé les institutions représentatives du monde du travail : la loi Rebsamen a affaibli les CHSCT, la loi Sapin a diminué le droit d’information des représentants du personnel dans les comités d’entreprise, sans compter l’ANI du 11 janvier 2013. On assiste à un recul de tout ce qui permet de faire fonctionner les institutions représentatives du personnel, pour le remplacer par des mandatés ou des référendums bidons ou des soi-disant « décisions collectives ».

Pourquoi tout cela est-il si important ? parce qu’il s’agit de protéger le niveau des salaires ; celui des HS, après lesquelles des millions de salariés courent parce qu’ils ont de petits salaires. En France, ne l’oublions pas, 9 millions de personnes sont en-dessous de 900 € par mois. Le salaire médian est à 1670 €, c’est-à-dire que la moitié des salariés sont en-dessous. Et ce qui va se passer c’est que les gens vont gagner encore moins ! « Ce n’est pas une loi pour négocier ; pas une loi pour plus de démocratie ; c’est une loi pour vous piquer votre fric ; pour vous prendre votre salaire ! Pour baisser le coût du travail ! pour augmenter la marge des actionnaires ! ».

« Savez-vous, dit encore G. Filoche, que les patrons vont pouvoir négocier le jour par lequel commencera la semaine ? ». On se demande bien pourquoi… C’est que dans les textes, à propos des majorations, on ne parle pas du dimanche mais du 7è jour… Alors, si la semaine commence le mercredi, le 7è jour est le mardi, et le dimanche n’est que le 5è, et donc on ne le majore pas… Il fallait y penser ! Dans le même ordre d’idées, tous les jours fériés vont être remis en discussion. Les lois supplétives vont s’en occuper.

On va aussi pouvoir travailler 12 heures par jour, 60 heures par semaine. Le repos quotidien pourra être fractionné. Les femmes de la rue St Martin pourront faire 60 heures en trois jours avec des HS à 10%. Et le travail de nuit ? La tranche horaire est resserrée sur 0 heures-5 heures. On n’en finit plus de faire la liste des tours de passe-passe contre les salariés ! Fonctionnaires compris ! Il n’y a qu’à se reporter à ce qui s’est passé pour les retraites des fonctionnaires après 2003. Des gens comme Macron sont pour une société sans statut ; ni Code du travail ni statut de la Fonction publique ; d’ici à ce qu’on voit des fonctionnaires se reconvertir comme auto-entrepreneurs il n’y a pas loin.

G. Filoche continue sur le licenciement. On va en arriver au licenciement non motivé. Comme aux Etats-Unis : affaire réglée en deux minutes, pas d’écrit, pas de motif, pas de procédure. La France, qui, à la différence des Etats-Unis, est signataire de la convention n° 158 de l’OIT (qui promeut un droit universel du travail s’attachant aux humains et non à l’entreprise, proscrit le travail des enfants, favorise les droits syndicaux, la durée maximale du travail, la protection des salariés, etc.), respecte encore un minimum de choses. El Khomri va- t-elle dire qu’il faut basculer tout cela du côté de la négociation ?… Elle va le dire !… Elle le dit !… C’est une sacrée régression qui nous attend. La convention 158 dit 1) que le licenciement doit être écrit, 2) motivé, 3) prévoir la possibilité pour le salarié de se défendre, 4) prévoir une possibilité de recours et 5) prévoir une indemnisation ou une réintégration.

En France, le licenciement est encore écrit. Sur la motivation, il y avait déjà des brèches (cf. Villepin : pendant deux ans, le licenciement dans le cadre d’un Contrat Nouvelle Embauche n’était pas motivé ; cf. aussi X. Bertrand, qui a fait la rupture conventionnelle (300.000 par an)) que la loi El Khomri confirme (plus de motivation pour le licenciement). Sur le droit de se défendre, les protections sont déjà largement réduites (plus droit au comité d’entreprise depuis la loi Sapin). Pour (ou plutôt contre) les recours, ils mettent en place des barèmes (ils seront certes indicatifs, et non impératifs, mais devant le juge cela ne changera pas grand-chose : les avocats plaideront en s’appuyant sur le barème indicatif et le juge, sur la défensive, aura finalement du mal à ne pas l’utiliser). L’indemnisation ou la réintégration, enfin, sont déjà supprimées en vertu de la loi Macron du 8 août 2015. « Tout cela pour vous dire, martèle encore et encore G. Filoche, la gravité de tout ce qu’on est en train de vivre ! ». « Je veux alerter ; je veux expliquer ; expliquer, alerter ; alerter, expliquer ; ce n’est pas une petite affaire qu’on est en train de vivre ! Ce n’est pas une petite affaire de routine ! C’est la vie intime de millions de gens qui va changer ! ».

Chaque article de la loi El Khomri – il y en a 52 – mériterait d’être décortiqué. Ce n’est pas possible, évidemment. Mais G. Filoche renvoie au petit livre qu’il vient de publier, dans lequel il se livre à ce travail.

Il faut quand même parler, dit-il, de deux articles en particulier, « qui devraient vous faire frémir ». Le premier, c’est un article qui s’attaque non pas au salariés mais au salariat. Article 27. Chauffeurs de VTC. Voilà des gens qui peuvent rouler 20 heures par jour, 110-120 heures par semaine ; qui dorment dans leur voiture ; ne versent aucune cotisation sociale ; doivent supporter les frais de carrosserie quand ils surviennent. Et Uber ? Il ne fait que donner la course et empocher 25% de la course. Le chauffeur VTC n’a pas d’autre relation. Pas de salaire, pas d’horaire, pas de médecin du travail, pas d’inspection du travail, pas de contrat de travail, aucune obligation. Le chauffeur VTC paye sa voiture, son essence, son assurance, et gère ses clients. C’est du post-esclavage. À Paris, les URSSAF sont d’ailleurs en train de requalifier en contrats de travail nombre de situations de chauffeurs VTC. Eh bien ce ne sera plus possible avec l’article 27 de la loi El Khomri… Vive la rémunération à la tâche ! « À quand des CRS auto-entrepreneurs payés à la tâche ? », demande G. Filoche. Ghislaine Oppenheimer, du magazine Challenges, rêve de ce statut pour les jardiniers du Sénat… Il faut savoir que, d’ores et déjà, les hôpitaux ont largement recours à cette technique. Il n’y aucune raison pour qu’elle ne s’étende pas à de nombreux autres secteurs, y compris les plus inattendus. « C’est grave ! », tonne G. Filoche. « Je veux faire peur ! ». « Je ne veux pas qu’on dise, comme Hollande, que c’est équilibré ». « Ce texte est entièrement pour les patrons ».

G. Filoche veut terminer par l’article 52, sur les chômeurs. « Carrément …dégueulasse ». Les syndicats ont obtenu récemment devant la justice (arrêt du Conseil d’Etat du 15 octobre 2015), après presque deux ans de procédure, que Pôle Emploi ne puisse plus siphonner d’autorité les allocations pour récupérer des trop perçus (G. Filoche évoque à ce propos une situation dramatique qui a conduit à ce qu’une personne s’immole par le feu à Nantes en 2013 devant une agence de Pôle Emploi). Eh bien l’article 52 de la loi El Khomri casse l’arrêt du Conseil d’Etat…

« Je suis indigné contre cette loi, dit G. Filoche. Mais totalement indigné. Elle nous ramène au XIXè siècle. Un siècle de droits sont balayés ».

Mais on va gagner. On est en train de gagner. 1,3 million au bout de 9 manifs. Obligés de dire qu’on était 80.000 ! Quand on en est là, c’est que quelque part on commence à paniquer. L’opinion est toujours contre la loi. Les jeunes itoo. Ça remue pas mal au sein de la CFDT et de l’UNSA. L’opposition à la loi est majoritaire dans le pays.

Le plus raisonnable pour préserver les apparences serait sans doute de suspendre la procédure parlementaire.

Interdire les manifs ? On croit rêver ! Ils perdent pied ! « La promotion Voltaire est encerclée à l’Elysée ! ».

« Le degré de trahison est inattendu. Il est plus élevé que tout ce qui s’est passé au nom de la gauche auparavant ».

Daniel Amédro (d’après un enregistrement audio)

 

2 Commentaires

  1. lionel Mutzenberg
    Posted 24 juin 2016 at 11:00 | Permalien

    D’accord mais Pujadas, Saint Cricq, Lenglet qui se sont comportés comme des voyous médiatiques lors de l’émission Des paroles et des actes, dont Jean-Luc Mélenchon était l’invité,de ce très cher Pujadas, ils sont toujours à la télévision du service public !
    Ils font quoi au conseil supérieur de l’audiovisuel ? Encore un fromage de l’état !
    Un éditocrate insulte un Président en exercice, juste pour se payer l’invité, et rien ne se produit ?

  2. Posted 24 juin 2016 at 18:19 | Permalien

    Bonsoir à tous,
    En complément de ce qu’a écrit notre camarade Lionel Mutzenberg dans son message n° 1, je vous invite à lire l’analyse d’Acrimed, disponible à l’adresse suivante : http://www.acrimed.org/DPDA-recoit-Melenchon-les-jeux-du-cirque
    Solidairement.

Déposer un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera jamais transmise.

*