Richard Abauzit : une lecture de la loi « « Pour la liberté de choisir son avenir professionnel »

L’AVENIR PROFESSIONNEL POUR TOUTE VIE

 

Une lecture de la loi « « Pour la liberté de choisir son avenir professionnel »

 

Il faut toujours comparer. Depuis une quarantaine d’années, la dégradation continuelle, et accélérée, occulte l’ampleur des changements intervenus et rend nécessaire une rapide comparaison de l’état initial et de l’état final actuel du rapport de forces que la loi « Avenir professionnel » vient d’entériner.

 

A l’apogée du rapport de forces en faveur des travailleurs, trois lois ont le 16 juillet 1971 organisé la formation professionnelle :

l’apprentissage comme « forme d’éducation », réservé aux jeunes dans le cadre de la formation professionnelle initiale ;

la formation professionnelle continue avec pour objet, outre l’adaptation des travailleurs au changement des techniques et des conditions de travail, de « favoriser leur promotion sociale par l’accès aux différents niveaux de la culture et de la qualification professionnelle et leur contribution au développement culturel, économique et social » ;

les établissements d’enseignement technologiquedevaient essentiellement permettre d’accéder à un métier grâce à la formation professionnelle initiale, par la voie scolaire et universitaire ou par l’apprentissage. Il n’était pas exclu que ces établissements participent à la formation professionnelle continue.

Le tout s’inscrivait dans le cadre de l ’« éducation permanente » dont l’objet était d’ « assurer à toutes les périodes de sa vie, la formation et le développement de l’homme, de lui permettre d’acquérir les connaissances et l’ensemble des aptitudes intellectuelles ou manuelles qui concourent à son épanouissement comme au progrès culturel, économique et social ».

Les « diplômesprofessionnels ou leurs équivalences » devaient obligatoirement être pris en compte dans les conventions collectives étendues, pour définir les classifications et niveaux de qualification professionnelle avec des coefficients hiérarchiques correspondants, base des salaires minima conventionnels.

Les contrats à durée limitée (contrats à durée déterminée ou contrats d’intérim) n’existaient pas, pas plus que les contrats de travail à temps partiel. Les chômeurs, peu nombreux, n’avaient pas besoin de « traverser la rue » et personne ne leur reprochait de ne pas le faire. Les détestables « parcours » n’avaient pas encore remplacé les « carrières ». Le contrat d’apprentissage, comme contrat de travail, faisait l’objet de garanties, tant dans sa conclusion que pour les conditions de travail et la formation théorique.

Les périodes de formation continue se déroulaient pendant le temps de travail, les durées de stage étaient  prévues pour pouvoir aboutir à une qualification, l’agrément des stages conditionnait le droit au congé de formation.

 

En résumé,le « marché du travail » était, du point de vue des salariés, encadré par des droits collectifsinscrits dans des conventions collectives étendues et le marché de la formation était inexistant : l’enseignement était dispensé dans des établissements publics ou étroitement contrôlés.

 

1/ Cette loi organise plus encore le libre marché des travailleurs

 

Un marché où ceux-ci, salariés ou non, sont tous en concurrence, leur qualification professionnelle n’étant plus reconnue, en amont même des conventions collectives.

 

11/ La destruction des qualifications, et des métiers qui vont avec, est un long chemin emprunté par l’Union européennedepuis le milieu des années quatre-vingt-dix du siècle dernier.

L’O.C.D.E avait tracé la voix, qui disait déjà en 1992 : « On a longtemps supposé qu’il y avait un conflit inévitable entre le but précis de préparer un enfant au travail et l’objectif de cultiver son esprit….Mais de plus en plus, les qualités les plus importantes exigées dans le monde du travail et celles que les entreprises veulent encourager les écoles à enseigner sont d’ordre plus général. L’adaptabilité, la faculté de communiquer, de travailler en équipe, de faire preuve d’initiative – ces qualités et d’autres compétences génériques- sont maintenant essentielles pour assurer la compétitivité des entreprises. Or, cette tendance correspond à l’évolution que connaît par ailleurs la pédagogie ». La Table Ronde des industriels européens en février 1995 avait précisé le mode d’emploi en insistant sur la nécessité d’une formation polyvalente incitant à “apprendre à apprendre” tout au long de la vie. Le « Livre Blanc sur l’éducation et la formation » inscrivait noir sur blanc en 1995 l’objectif final de la Commission européenne : « reconnaître des compétences partielles à partir d’un système d’accréditation fiable. L’individu doit pouvoir faire valider des compétences indépendamment du fait qu’il passe ou non par une formation diplômante… Chacun devrait pouvoir disposer, s’il le désire, d’une carte personnelle de compétences où seraient portées les compétences ainsi validées… ». Celle qui le disait le plus clairement en 1995 était sans doute la commissaire européenne à l’éducation qui expliquait que « le test d’accréditation permettra de juger le candidat à un emploi, non sur les connaissances générales jugées par un diplôme, mais sur les compétences très pointues recherchées par les entreprises ». Un appel d’offres de la Commission pour la mise au point par des entreprises d’une carte d’accréditation des compétences  (skill accreditation card) fut lancé le 29 février 1996 : « L’accréditation et la validation des compétences utilisera un système de logiciels interactifs relié par un réseau (Internet) qui délivrera des tests interactifs sur demande, évaluera les résultats et validera le niveau testé. Ce niveau sera enregistré sur une carte personnelle et ces cartes personnelles deviendront le véritable passeport pour l’emploi ».

La mise au point de la carte s’est avérée plus difficile que prévu, notamment parce qu’il fallait uniformiser d’abord tous les systèmes nationaux d’enseignement avec une concordance tant des « compétences » délivrées en « socle commun » dans les écoles (chantier terminé en 2008) que des diplômes et titres déclinés en « compétences » (chantier pharaonique terminé en 2012).

La carte est entretemps devenue C.V numérique, officiellement adopté par l’Union européenne le 15 décembre 2004 : il instaure un « cadre communautaire unique pour la transparence des qualifications et des compétences ». Celui ou celle qui remplit ce C.V normalisé accepte qu’il circule dans toutes les agences de placement publique et privées de l’Union européenne. En France c’est, peu ou prou, ce type de C.V qu’on oblige les chômeurs à remplir à Pôle emploi. Et depuis 2014 c’est aussi, peu ou prou, celui qui attend toute la population en âge de travailler, sous le nom de « passeport d’orientation, de formation et de compétences », un  sous-fichier du « Compte Personnel de Formation » (C.P.F, voir Annexe 1) lui-même partie du fichier « Compte Personnel d’Activité » (C.P.A) géré par la Caisse des dépôts et consignations, l’ancestrale mais de moins en moins vénérable banque publique vouée à un grand avenir.

12/Cette loi consacre le remplacement des qualifications, socialement reconnues et que pouvaient défendre de façon unie tous ceux qui les possèdent, par des « compétences » individuelles à discrétion des employeurs et que chaque individu s’efforcera de vendre. Fruit d’un long travail de propagande et de modifications incessantes de textes légaux et règlementaires, le mot « compétences » a envahi tout l’espace, public et privé, depuis une trentaine d’années. L’objectif affiché de la loi est d’ailleurs d’aller vers une « société de compétences » et, en cent quarante-cinq pages, le mot revient deux cent-une fois (le mot qualifications vingt-quatre).

 

v  La loi modifie la définition des « certifications professionnelles » inscrites au « répertoire national des certifications professionnelles » » (R.N.C.P) :

- les diplômes et titres professionnels et autres « Certificats de Qualification Professionnelle » délivrés par les branches professionnelles, pour être reconnus, devront être coupés en morceaux, dénommés « blocs de compétences », eux-mêmes inscrits au répertoire. Ces « blocs » facilitent l’interchangeabilité, la polyvalence des salariés, permettant de leur faire faire tout et n’importe quoi, sans contrepartie de rémunération.

- dans les morceaux devront également figurer, inscrites dans un « répertoire spécifique » les « compétences transversales », celles qu’on ne sait ni enseigner ni évaluer (à supposer qu’elles existent) mais dont on sait depuis peu qu’elles peuvent être très utiles pour changer de métier en traversant la rue. Pour s’en faire une petite idée – l’imaginaire patronal est sans borne – on peut citer les quatorze « compétences » intégrées au dernier logiciel mis en place à Pôle emploi pour mettre en correspondance en ligne offreurs et demandeurs d’emploi : « autonomie, capacité à fédérer, capacité d’adaptation, capacité de décision, curiosité, force de proposition, gestion du stress, persévérance, prise de recul, réactivité, rigueur, sens de l’organisation, sens de la communication, travail en équipe ».

- les représentants du personnel pourront même concourir pouracquérir un certificat de six domaines de « compétences transférables » liées à leur mandat (« Encadrement et animation d’équipe » ; « Assistance dans la prise en charge de projet » ; «  Mise en œuvre d’un service de médiation sociale » ; « Suivi de dossier social d’entreprise »…). Eventuellement attestées par l’employeur lors d’un entretien professionnel en fin de mandat, elles peuvent après examen être inscrites dans le « répertoire spécifique » après avis de « France Compétences », un nouvel organisme créé par la loi.

- aux diplômes et titres de qualification en morceaux, aux Certificats de Qualification Professionnelle des employeurs, aux « compétences transversales » répertoriées, vont s’ajouter de mystérieuses « attestations » de formation, dont la loi nous dit que les titulaires pourront « se prévaloir ». Il y a là au minimum la volonté de brouillage des repères, mais on ne peut exclure, Pénicaud l’ayant laissé entrevoir lors d’une conférence de presse, que de simples formations en ligne, notées par les stagiaires, pourraient se voir accepter comme formations « éligibles » au C.P.F, voire in fine accréditées.

- lamise en concurrence des travailleurs au niveau de l’Union européenne est organisée avec la détermination obligatoire par « France Compétences » d’une « gradation des compétences » permettant d’établir des « correspondances » avec les certifications des autres Etats de l’Union.

 

v Quant aux titulaires des certifications, leur fichagen’a pas été oublié, les « données relatives aux diplômes et compétences des élèves et des étudiants collectées par les ministres chargés de l’éducation nationale et de l’enseignement supérieur » pouvant être automatiquement transférées sur leur C .V numérique du C.P.F par la grâce du décret n°2016-1950 du 28 décembre 2016.

 

v  La durée de vie des certifications est logiquement alignée sur celles des conventions collectives qui, elles-mêmes, ont vu leur durée indéterminée ramenée à cinq ans par la loi El Khomri. Certaines certifications auront une naissance plus rapide que d’autres, celles qui conviendront particulièrement à « France Compétences » pouvant faire l’objet d’un enregistrement simplifié par cet organisme.

 

v  « France Compétences » remplace en effet l’ancienne « Commission Nationale de Certification Professionnelle » (C.N.C.P), qui avait elle-même remplacé en 2002 la Commission Technique d’Homologation créée en 1971 sur la base de la création d’une formation continue axée sur la promotion sociale et la correspondance entre les diplômes scolaires et universitaires avec les titres de qualification professionnelle.

Symbolique de l’évolution, l’article du code de l’éducation qui basait le fonctionnement de la C.N.C.P et la création d’un « répertoire des certifications professionnelles » est abrogé au profit d’un nouvel article du code du travail.

13/ La formation est, de plus en plus strictement, celle souhaitée par le patronat organisé.

 

v  Le formatage commence à l’école où l’on est désormais à partir de la maternelle évaluée en « compétences » à acquérir. Le « Socle commun de connaissances et de compétences » scolaires de 2012, à avoir acquis en fin de troisième, est pratiquement le même que le « Socle de connaissances et de compétences professionnelles » adopté en 2015 par un comité paritaire interprofessionnel national et immédiatement inscrit par décret dans le code du travail (voir Annexe 2).

 

v  Dans le supérieur, les programmes conduisant aux diplômes et titres sont, chaque année, toujours plus organisés en « compétences », l’arrêté licence du 30 juillet 2018 le formalisant désormais expressément : les « blocs de compétences » sont inscrits au « parcours pédagogique », les différents types de « compétences », dont les « transversales », sont listés.

 

v  Pour ce qui concerne l’obligation de formation au poste de travail, la loi « Avenir professionnel » la restreint toujours plus (voir plus loin) et pour ce qui est des engagements que devaient prendre les employeurs en cas de réussite d’un salarié à une formation qualifiante, elle les supprime.

 

v  Ce qui n’empêche pas les incessantes rengaines sur les miracles de la formation : vous voulez un boulot ? Formation ! Vous voulez garder votre emploi ? Formation ! Vous voulez une promotion ? Formation !

 

14/ Chômeurs, formez-vous ! Formez-vous et vous verrez…

Il est essentiel que tout le monde, chômeur ou pas, y croit : avec de la formation on a un emploi. Le mensonge est grossier, l’affirmation globalement fausse : six millions six cent mille chômeurs et, en prenant les chiffres de Pôle emploi cent cinquante mille postes vacants cela fait, et sans discuter ni la réalité ni l’acceptabilité de ces postes, six millions quatre cent cinquante mille chômeurs qui ne trouveront pas d’emploi. Quels que soient les efforts de formation effectués par les chômeurs, la file d’attente sera toujours aussi longue, tout juste peuvent-ils individuellement espérer changer de place dans la file.

 

15/ Chômeurs, traversez la rue !

Chacun connaissant autour de lui nombre de surdiplômés sans emploi, il est nécessaire de recourir à un autre argument : les chômeurs qui ne trouvent pas de travail ne veulent pas traverser la rue. L’argument partage la même quantitative absurdité que le précédent, mais il est sans doute plus efficace. La fainéantise est un défaut qu’on détecte facilement chez les autres et il suffit dès lors de la connaissance d’un seul emploi vacant ou d’une petite dose d’intoxication médiatique pour que le verdict tombe : duboulotyena !…mais…yenaqui !…

Cette division des pauvres, c’est l’invincibilité des riches. Aussi soignent-ils particulièrement et leurs discours et leurs lois.

 

Ainsi la cause principale du chômage – les licenciements -, qu’on entendait dans l’ancienne formulation des « travailleurs involontairement privés d’emploi », a disparu. Auront désormais droit aux allocations chômage les « travailleurs aptes au travail et recherchant un emploi ». Il faudra donc le mériter, on en oublierait presque qu’il s’agit d’une assurance et d’un droit collectif.

Et d’ailleurs, y a-t-il encore des licenciements ? Depuis 2008, les licenciements individuels ont pour une bonne part été remplacés par des « ruptures conventionnelles » d’un « commun accord », les anciens licenciements collectifs pour motif économique ont cédé la place aux « Plans de Sauvegarde de l’Emploi » (!), les ordonnances MACRON ont inventé les « ruptures d’un commun accord dans le cadre d’un accord collectif portant rupture conventionnelle collective » et autres « accords de performance collective ». A cet enthousiasme pour être volontairement licenciés pouvait donc se greffer des « démissions » qui n’en seraient pas vraiment et justifieraient donc leur prise en charge par l’assurance chômage.

 

La loi organise donc le tri dans les démissionnaires.

 

Selon les données de Pôle emploi pour l’année 2016 sur 1 000 000 de démissions, une moitié n’aurait pas rapidement retrouvé du travail et seulement 210 000 se sont inscrits à Pôle emploi, parmi lesquels 70 000 ont demandé une indemnisation. 55 000 l’ont eu, soit immédiatement pour démission légitime, soit après quatre mois et examen d’une commission.

La loi décide d’ajouter, aux 15 000 restants non indemnisés, les démissionnaires qui auront réussi à passer un redoutable tri, le Ministère du travail estimant à environ 30 000 le nombre potentiel des élu-e-s.

 

Il faudra répondre à des « conditions d’activité antérieures spécifiques » et poursuivre un « projet de reconversion professionnelle nécessitant le suivi d’une formation ou un projet de création ou de reprise d’une entreprise ». Projet qui devra être reconnu comme « réel et sérieux » par une « commission paritaire interprofessionnelle régionale ».

Et encore faudra-t-il que le « privé d’emploi volontaire » ait pensé, préalablement à sa démission, à saisir un « conseil en évolution professionnelle » qui va lui expliquer qu’il pourrait sans doute garder son emploi tout en mettant en œuvre son « projet » de reconversion. Projet que le salarié devra d’ailleurs établir avec ledit conseil.

Au bout du bout, il lui faudra justifier, sous peine de radiation, qu’il persiste à mériter. Des contrôles seront mis en œuvre à cette fin par Pôle emploi au plus tard dans les six mois.

 

16/ Chômeurs, nous avons enfin tous les moyens de vous radier

Les suicides n’y auront rien fait. Ils en rêvaient, il est là. Pouvoir est donné à Pôle emploi de remplacer le Préfet. Ainsi, juge et partie, Pôle emploi pourra supprimer (la suspension ne sera plus même possible) le revenu de remplacement, décider des pénalités administratives et les recouvrer.

Et pour radier, Pôle emploi aura des motifs supplémentaires, aussi violents que discrétionnaires.

 

Le changement n’est pas uniquement quantitatif (de dix motifs, on passe à douze).

 

L’insuffisance d’ « actes positifs et répétés » pour retrouver un emploi, créer ou reprendre une entreprise ne suffit pas. Il faudra aussi le cas échéant prouver qu’on s’est aussi décarcassé en vue de « développer une entreprise »

Là où un refus de suivre une formation, « sans motif légitime », était sanctionné, désormais la seule absence, ou l’abandon, « sans motif légitime », suffira pour radier.

Là où le refus de répondre à toute convocation « sans motif légitime » était impardonnable, une seule absence à un rendez-vous, « sans motif légitime » entraînera la radiation.

L’« abandon » d’une action d’aide à la recherche d’une activité professionnelle » figure parmi les nouveaux motifs de radiation et son caractère flou permettra tout et n’importe quoi.

 

La recherche devra aussi permettre de « traverser la rue » : le « projet personnalisé d’accès à l’emploi » s’est en effet enrichi du « projet de reconversion professionnelle ». Un projet qui va s’avérer de plus en plus souvent incontournable, car les « offres raisonnables d’emploi » ne sont plus définies, l’ancienne référence au salaire antérieurement perçu ayant notamment disparu.

 

Enfin, àtitre expérimental et pendant dix-huit mois dans des régions désignées !,pourront être radiés les demandeurs d’emploi qui n’établiront pas régulièrement le recueil de « l’état d’avancement de leur recherche d’emploi »…

 

17/ Chômeurs, le chômage ne paie plus

 

L’arrivée potentielle de nouveaux indemnisés (20 à 30 000 « démissionnaires », et un nombre équivalent d’indépendants non cotisants) sera sans doute un prétexte à une baisse des indemnités.

 

Mais les importantes baisses prévisibles tiennent surtout à la liquidation par la loi de ce qui restait de la gestion paritaire de l’assurance chômage.

A défaut d’obtenir des « partenaires sociaux » le respect strict des « recommandations », la loi remet en effet dans les mains du gouvernement, à travers des lettres de « cadrage » l’entière détermination des critères de tri des chômeurs, des règles de l’indemnisation tant sur le montant que sur les sanctions.

Le critère essentiel du « cadrage » étant la limitation du montant global (indemnisation et fonctionnement) du coût financier qui doit rester « compatible avec la trajectoire financière » défini dans le « document de cadrage ».

Les intermittents du spectacle ne sont pas oubliés, qui ont droit à un double « cadrage » pour le même objectif.

 

18/ Tant qu’il y aura des chômeurs…

Le chômage de masse n’est pas le seul motif qui pousse à « traverser la rue » pour accepter l’inacceptable mais il est l’élément essentiel de la dissolution des collectifs de travail qui y conduit.

 

Chaque dégradation du rapport de forces est l’occasion d’innovations sur les chemins qui mènent à l’esclavage.

 

18-1/ Apprenti-e à vie

Depuis le début du XXèmesiècle, le contrat d’apprentissage ouvrait symboliquement le code du travail. Poursuite de l’école et travail formateur en entreprise, il s’adressait aux jeunes. Désormais, tant pour le travail que pour la formation, finies les garanties liées à la jeunesse des apprentis.

 

D’abord, ils ne seront plus si jeunes, la limite d’âge pour commencer un contrat d’apprentissage passant de vingt-cinq à trente ans.

A titre expérimental d’ici 2022,là où on dit manquer de bras (« secteur en tension »), il semble bien que l’on pourra désormais imposer des contrats d’apprentissage aux privés d’emploi et aux personnes au R.S.A.

Et les prisonniers auront leur chance aussi, à titre expérimental et pendant trois ans…

 

Cela n’empêchera pas de pouvoir commencer plus tôt qu’avant, la limite de quinze ans pour le pré-apprentissage étant remplacée par le début de la 3ème, donc autour de quatorze ans, dans des classes « prépa-métiers » dont les élèves seront « immergés » en entreprise et en Centres de Formation d’Apprentis (C.F.A). Au passage, le code du travail a été modifié dans le même sens, abaissant l’âge d’admission au travail des élèves de l’enseignement général de quatorze ans au début de la 4ème.

 

18-2/ Les travailleurs en cours d’apprentissage seront des travailleurs comme les autres ou presque

 

v Pour le droit du travail, les contrats d’apprentissage qui ne feront plus l’objet d’un enregistrement, et donc du contrôle qui y était associé, sont strictement alignés sur le droit commun et notamment les contrats de professionnalisation qui relèvent de la formation professionnelle continue.

 

Ainsi, pour la durée du travail, plus aucune protection des jeunes apprentis, ils sont désormais de « jeunes travailleurs » comme les autres. La loi commence par allonger la durée de travail possible pour les jeunes travailleurs pour certaines activités qui vont être déterminées par décret : jusqu’à 40 heures par semaine et 10 h par jour. Puis elle aligne les jeunes apprentis de moins de dix-huit ans sur cette nouvelle législation, supprimant ainsi l’autorisation préalable de l’inspecteur du travail et l’avis conforme du médecin du travail qui, jusqu’ici, limitaient cet allongement du temps de travail. Un médecin du travail que ne verra peut-être jamais l’apprenti : à titre expérimental et pendant quatre ans, la « visite d’information et de prévention » qui a remplacé la visite d’embauche, pourra ne pas être faite par un médecin du travail, mais par « un professionnel de santé de la médecine de ville ».

v  Le contrat d’apprentissage pourra être encore plus précaire dans sa durée (6 mois au lieu d’un an).La réduction à six mois était jusqu’ici strictement limitée à des cas précis qui le justifiaient, le bien fondé étant apprécié par la Région. La durée du contrat pourra même être inférieure à la durée de la formation qui lui est liée si on (de fait l’employeur) estime que l’apprenti n’a pas besoin de celle-ci. La durée du contrat sera alors fixée par convention entre le centre de formation, l’employeur et l’apprenti ! Jusqu’ici il était certes possible d’adapter la durée du contrat au niveau de l’apprenti, mais ce niveau était évalué et il fallait l’autorisation de l’inspection de l’apprentissage.

 

v  La date d’embauche sera souple. La notion d’examen pour l’obtention du diplôme ou du titre visé dans le contrat d’apprentissage est en effet remplacée par l’obtention de ce diplôme ou titre sans que soient prévues les modalités de cette obtention. Il s’agit en fait de passer au contrôle continu, ce qui permet aux entreprises de pouvoir embaucher en apprentissage toute l’année. Uneembauche tout au long de l’année confirmée par la modification de l’article L.6222-12 qui ne parle plus de « début (scolaire) du cycle du centre de formation d’apprentis », mais de la « période de formation en centre de formation d’apprentis » qui sera fixée… par le contrat d’apprentissage.

 

v  Les apprentis pourront voir du pays, même en dehors de l’Union européenne. La durée du contrat à l’étranger ne sera plus « déterminée », quand bien même elle sera limitée. Elle pourra même être très limitée puisqu’on apprend qu’il sera possible d’avoir une « période de mobilité » de seulement quatre semaines, la loi utilisant de façon pertinente la formulation de « mise à disposition d’un apprenti ».

L’article L.6211-2 ne s’appliquant pas à ces apprentissages à l’étranger, on doit donc considérer qu’ils n’y seront plus une « forme d’éducation alternée ». Est-ce encore de l’apprentissage ?

Les principales conditions de travail (santé, sécurité, rémunération, durée du travail, repos hebdomadaire et jours fériés) seront celles du pays d’accueil.

L’apprenti pourra ne pas être salarié. En ce cas, si le pays d’accueil est en dehors de l’Union européenne, l’apprenti devra prendre une « assurance volontaire ».

v  Rompre un contrat d’apprentissage était trop contraignant pour les employeurs. Ce sera désormais… un jeu d’enfant.

Pour l’employeur, plus de passage par les prud’hommesen cas de volonté de rupture du contrat pour faute grave ou de manquements répétés de l’une des parties à ses obligations ou pour inaptitude de l’apprenti. L’employeur pourra rompre sans autre forme de procès. Et il n’aura plus aucune obligation de reclassement en cas d’inaptitude de l’apprenti.

Par contre, l’apprenti qui voudra rompre son contrat ne pourra le faire qu’après un préavis (et on sait que nombre de ruptures se font dans des conditions rendant impossible la présence de l’apprenti dans l’entreprise), mais également après sollicitation du médiateur consulaire.

18-3/ « Employabilisable » à vie

 

A titre expérimental et ce pendant trois ans, un nouveau contrat jusqu’ici illégal va voir le jour : le « contrat de travail à temps partagé aux fins d’employabilité ». On savoure d’autant plus l’absurdité de la formulation des « fins d’employabilité » quand on sait qu’il s’agit d’un contrat à durée…indéterminée.

Les entreprises de travail à temps partagé avaient été crées en 2005, officiellement pour apporter du « personnel qualifié » aux petites et moyennes entreprises qui n’en disposaient pas. Ce faisant cette mise à disposition de main d’œuvre à but lucratif, alors interdite (sauf pour les entreprises de travail temporaire) était, par ce biais, légalisée.

Une étape supplémentaire est franchie. Désormais, le personnel mis à disposition pourra être non qualifié.

 

Le salarié pourra également, contrairement à la législation antérieure, ne pas avoir de travail entre deux missions auprès des entreprises utilisatrices. Il sera en « intermissions » et ces périodes seront payées au tarif du salaire horaire de base de la dernière mission…

 

La justification de ces contrats est qu’ils permettraient d’aider les « personnes rencontrant des difficultés particulières d’insertion professionnelle » à trouver un emploi à la sortie de ce qui est pourtant un C.D.I (une façon de reconnaître la misère de ces C.D.I « aux fins d’employabilité ». Pour cela, il est annoncé que le salarié suivra des formations prises en charge par l’entreprise, formations qui peuvent se limiter à la tentative d’acquérir un « bloc de compétences »…

 

18-4/ Intérim à vie

Le même type de contrat d’intérim permanent est légalisé pour les entreprises de travail temporaire. Une affaire qui vient de loin : l’Accord National Interprofessionnel du11 janvier 2013 demandait à la branche patronale de l’intérim de conclure un accord en ce sens, chose faite le 10 juillet 2013. La loi Rebsamen de 2015 a introduit une « expérimentation » qui devait se terminer le 31 décembre 2018. La loi « Avenir professionnel » l’inscrit désormais dans le code du travail.

 

v Comme pour les entreprises de travail à temps partagé (qui peuvent d’ailleurs être des entreprises de travail temporaire), ces C.D.I très particuliers seront une succession de « missions » qui pourront aller jusqu’à trois ans, auprès d’entreprise utilisatrices.

 

Il y aura des « intermissions », périodes sans travail qui seront en réalité des astreintes car le contrat  doit prévoir « les horaires pendant lesquels le salarié doit être joignable pendant les périodes sans exécution de mission».

 

v  Quelle sera la durée de travail ? L’employeur n’est pas tenu de fixer une durée de travail !Le contrat doit simplement mentionner « le cas échéant, les conditions relatives à la durée du travail, notamment le travail de nuit ».

 

v  Combien seront payés ces salariés bons à tout faire (le contrat doit prévoir la « description des emplois correspondant aux qualifications du salarié »), à toute heure, partout (le contrat doit prévoir le « périmètre de mobilité ») ? Le respect du seul S.M.I.C est demandé…

La rémunération de la période d’essai est inconnue car, d’une part la durée de celle-ci peut être différente de celle de la convention collective, et d’autre part la rémunération de cette période d’essai peut être différente de celle prévue par la « lettre de mission ».

Le maintien de la rémunération en cas de fin anticipée d’une mission n’est plus garanti.

 

v  La rupture du contrat de mise à disposition entre l’entreprise de travail temporaire et l’entreprise utilisatrice pourra être considérée comme un cas de force majeure.

 

v  A la fin de chaque mission, l’entreprise utilisatrice pourra désormais sans aucun délai de carence réemployer sur le poste tenu un autre salarié en C.D.D ou en intérim, contournant ainsi l’interdiction de faire succéder sur un même poste sans délai de carence des salariés en contrats courts, en piétinant l’obligation de faire appel à des salariés en C.D.I pour des besoins permanents de l’entreprise.

 

18-5/ Des contrats à courte vie

A titre expérimentalet pendant deux ans, un contrat à durée déterminée ou un contrat d’intérim pourra servir à remplacer plusieurs salariés sur des secteurs qui seront définis par décret.

 

Toujours à titre expérimentalet pendant trois ans, un nouveau cas de recours aux contrats courts d’intérim sera possible : employer sur ces contrats un travailleur handicapé tiendra lieu de motif valable.

 

Et encore à titre expérimentalet pendant quatre ans, tout sera permis avec une « entreprise adaptée » qui emploie essentiellement des travailleurs handicapés. Ces entreprises pourront avoir n’importe quel statut juridique et créer des entreprises d’intérim. Elles pourront également passer des contrats à durée déterminée sans autre motif que ces contrats seront « aidés », les contrats auront des durées à géométrie variable, des durées de travail qui seront…ceux que le contrat prévoira.

18-6/ Ubérisation pour tous

A titre expérimentalet pendant trois ans les personnes « rencontrant des difficultés sociales et professionnelles particulières »  pourront être considérés comme indépendantss’ils sont mis en relation avec des « clients » par un « service de mise en relation ».

Ils travailleront avec une « entreprise d’insertion par le travail indépendant ». Mais il n’y aura pas travail illégal, nous dit la loi, car il faudra considérer qu’il n’y a aucun lien de subordination entre l’entreprise d’insertion et le travailleur « indépendant ».

 

18-7/ Travail illégal, si besoin

 

Pour des « prestations et opérations de courte durée ou dans le cadre d’évènements ponctuels », sur certaines activités décidées par un simple arrêté ministériel, les employeurs détachant des salariés en France seront allégés de leurs maigres obligations : ils seront dispensés de la déclaration préalable à l’inspection du travail et de la désignation d’un représentant en France pour le contact avec l’inspection du travail. D’autres « adaptations » seront encore possible par décret, notamment des assouplissements pour la traduction et la conservation des documents à présenter à l’inspection du travail attestant de la régularité de la prestation de travail en France…

 

Pour les mêmes obligations, le D.I.R.E.C.C.T.E (Directeur Régional des Entreprises, de la Concurrence, de la Consommation et des fraudes, du Travail et de l’Emploi, le tout puissant hiérarchique des inspecteurs du travail qui, comme l’intitulé de ses multiples administrations le suggère, a autant à voir avec l’indépendance de l’inspection du travail que Bayer Monsanto avec le vol des abeilles) pourra, à la demande d’employeurs, les « aménager » pendant un an. Renouvelable.

 

Quant aux employeurs détachant des salariés en France, ils seront soulagés de la contribution destinée à participer aux coûts générés par les contrôles de cette activité ; de même que les donneurs d’ordres qui devaient payer en cas de non versement par l’employeur.

 

2/ Cette loi accélère la construction du libre marché de la formation

21/ Il faut toujours comparer

La formation tout au long de la vie, du berceau au tombeau, pour avoir du boulot ou pour ne pas mourir idiot, la ritournelle est si lancinante depuis plusieurs décennies, qu’on oublie d’où l’on vient.

 

L’obligation de contribution des employeurs à la formation professionnelle des salariés date de 1971. En 1974, la durée de formation moyenne pour les stagiaires était de 62 heures par an, quarante ans plus tard en 2014, elle avait chuté à 27 heures.

Les institutions publiques (A.F.P.A, Association nationale pour la Formation Professionnelle des Adultes ; GRETA, Groupement d’établissements du second degré public) assuraient des formations assez longues. En 2010 par exemple, les organismes du secteur public et parapublic représentaient 3% des 55 300 organismes de formation mais 24 % du nombre d’heures-stagiaires ; en 2016, la durée moyenne d’une formation référencée ou homologuée de l’A.F.P.A était encore de 650 heures pour les demandeurs d’emploi et 198 heures pour les salariés.

 

Quant au taux de participation financière des entreprises de plus de dix salariés il est passé de 3,3 % à 2,7 % de la masse salariale brute entre 1993 et 2013.

 

L’A.F.P.A, héritage du Conseil national de la Résistance, est devenue « Agence » le 1erjanvier 2017 et a été transformée en E.P.I.C (Etablissement Public Industriel et Commercial avec une filiale « A.F.P.A Entreprises » chargé des activités concurrentielles) ; et en 2019, 550 postes devraient s’ajouter aux 1000 supprimés en 2018 quand menace la faillite résultant d’une baisse des prix imposés par les Régions dans les appels d’offres.

Quant au nombre de GRETA, organismes publics soumis eux aussi à la concurrence, il ne cesse de diminuer et en 2016, 40% du chiffre d’affaires provenait de fonds privés.

 

22/ Un marché prometteur

En 2015, les dépenses globales de formation professionnelle (formations, rémunérations des stagiaires, financement) étaient de 24,9 milliards d’euros dont 19,4 pour les salariés du privé.

Sur ces 19,4 milliards, la contribution des entreprises (hors dépenses directes) était de 7,6 ; celles des Régions 4,6 ; de l’Etat 3,5 ; de l’U.N.E.D.I.C et de Pôle emploi 2,1 et les ménages 1,4.

 

23/ Toujours moins d’obligations pour les employeurs…

Des obligations légales toujours réduites.

 

En 2014, la cotisationlégale pour la formation professionnelle des entreprises de plus de trois cents salariés est passée de 1,6 à 1% de la masse salariale, leur obligation de dépense au titre du plan de formation (0,9%) ayant disparu au profit d’une obligation de « faire ».

 

Voici maintenant que la loi redéfinit l’obligation de l’employeur de former ses salariés au poste de travail à travers le plan de formation.

La nouvelle formulation (« formation qui conditionne l’exercice d’une activité ou d’une fonction, en application d’une convention internationale ou de dispositions légales et règlementaires ») est suffisamment restrictive pour qu’elle permette à nombre d’employeurs de s’en dispenser en déclarant non obligatoire des formations qui auparavant l’étaient.

Y aura-t-il maintien du contrôledu versement de la contribution obligatoire des employeurs au financement de la formation professionnelle, les employeurs devant justifier de la « réalité » et du « bien fondé » de leurs dépenses ? Bien que ce contrôle fut jusqu’ici resté modeste (une quarantaine de contrôles pour versement insuffisant sur les 1523 contrôles effectués en 2016), la loi a supprimé cette mission des agents de contrôle.

Les employeurs ne devront plus justifier, et pour les seules entreprises de plus de cinquante salariés, que du respect d’une seule « obligation » : avoir fait, dans le délai de six ans, passer un entretien professionnel à un salarié (ce qui est rarement un cadeau pour le salarié) et qu’il ait eu, dans le même délai, une « formation »…

 

24/ Et « en même temps », moins de droits et plus d’obligations pour les salariés et les chômeurs

v  Par le biais d’un accord d’entreprise,  l’employeur  pourra imposer aux salariés des formations hors temps de travail et sans maintien de la rémunération.

Et en l’absence d’accord d’entreprise, il semble bien qu’il ne sera plus possible au salarié de refuser pendant le temps de travail une formation non obligatoire. Comment comprendre autrement l’ajout par la loi de la condition de se situer en dehors du temps de travail pour que le refus du salarié d’y participer ne soit ni une faute ni un motif de licenciement.

 

v  Si la formation, de droit se transforme en obligation, les engagements que l’employeur devait prendre à l’égard du salarié, avant son départ en formation, en cas de réussite à celle-ci (accès « en priorité, dans un délai d’un an, à l’issue de la formation aux fonctions disponibles correspondant aux connaissances ainsi acquises » ; « attribution de la classification correspondant à l’emploi occupé »), disparaissent avec l’abrogation de l’article du code du travail correspondant.

 

v  Pour les formations plus ou moins choisies par les salariés, les formations longues, qualifiantes vont devenir rarissimes avec la suppression du CIF et avec la monétisation des « droits » à des montants bien faibles.

Le « compte personnel de formation » enregistrera en effet les « droits » à formation en euros et non plus en heures de formation. Les heures acquises étant converties sur la base de 14,28 euros de l’heure (coût moyen de prise en charge par l’AFPA) et le coût moyen de prise en charge d’une heure de formation étant, tous organismes de formation confondus, de 41 euros, le financement des formations se fera de plus en plus souvent en demandant au salarié de chercher auprès de sa branche professionnelle, de son entreprise, ou de sa poche le financement manquant. Si on ne peut savoir quels seront les plafonds de prise en charge des futurs organismes qui vont remplacer les financeurs actuels, quelques plafonds ont déjà été décidés dans la Fonction publique : 24 euros pour les services du Premier Ministre, 15 euros pour le Ministère de l’intérieur…

 

v  Plus aucune formation n’échappera à son utilité pour l’employeur :

 

-       dans la liste des « formations éligibles » au CPF, disparaissent les « actions d’acquisition, d’entretien ou de perfectionnement des connaissances » qui avaient pour objet d’« offrir aux travailleurs les moyens d’accéder à la culture, de maintenir ou de parfaire leur qualification ou leur niveau culturel ainsi que d’assumer des responsabilités accrues dans la vie associative » ; les « formations destinées à permettre aux bénévoles du mouvement coopératif, associatif ou mutualiste et aux volontaires en service civique d’acquérir les compétences nécessaires à l’exercice de leurs missions » ; les « formations destinées aux salariés en arrêt de travail [...] »  et les « actions de formation continue relatives au développement durable et à la transition énergétique ».

-       à titre expérimental pendant trois ans,une innovation à laquelle on n’aurait pas pensé. Du point de vue de la formation, les anciens contrats de qualification avaient été dégradés en cédant la place aux contrats de professionnalisation. Ceux-ci conduisent de plus en plus souvent à des formations au rabais. Voici venu le temps des contrats de professionnalisation où c’est l’employeur qui va définir, avec l’ « opérateur de compétences », les « compétences » qu’il veut voir acquérir par le stagiaire.

-       Enfin, à titre expérimentalet pendant quatre ans, les demandeurs d’une VAE pourront demander à ne voir reconnus qu’une miette de diplôme ou de titre (« un ou plusieurs blocs de compétences »). Cette nouvelle formule de la « deuxième chance » a un goût d’autant plus amer que la loi précise que cette « action de VAE » permettra de mesurer l’aptitude de la personne (« positionnement préalable ») à pouvoir, ou non, suivre une « action de formation » pour…changer de travail (« projet de transition professionnelle »).

 

v  Les chômeurs n’ont pas été oubliés.

 

Quand Pôle emploi, la Région ou l’association pour l’insertion professionnelle des handicapés auront « acheté » une formation, les euros seront automatiquement débités du compte du demandeur d’emploi dès qu’il aura donné son « acceptation » de cette formation qui va de fait se révéler obligatoire. Qui prendra le risque, par un refus, d’être sanctionné pour insuffisance d’efforts ?

Et il faut souhaiter aux chômeurs de terminer leur formation avant la fin de leurs droits, car la loi a supprimé la possibilité de percevoir l’allocation de solidarité spécifique à la fin de la « rémunération de fin de formation », rémunération qui prenait le relais de l’ARE quand on est dans une formation prescrite par Pôle emploi et que sa durée excède celle de ce droit.

 

25/ En amont, « France compétences »

Cette nouvelle institution publique, dotée de la personnalité morale et de l’autonomie financière, a vocation à s’occuper de tout :

-       verser des fondsaux « opérateurs de compétences » pour les contrats d’apprentissage et de professionnalisation, les reconversions et le « développement des compétences », aux Régions pour les CFA, à la Caisse des dépôts pour le CPF, à l’Etat pour les demandeurs d’emploi, aux commissions paritaires interprofessionnelles régionales pour les « projets de transition professionnelle » (voirAnnexe 3);

-       organiser le « libre » marché de la formation : « assurer la veille, l’observation et la transparence des coûts et des règles de prise en charge » ; « collecter les informations » transmises par les marchands de formation financés ; « publier des indicateurs permettant d’apprécier la valeur ajoutée des actions de formation », intervenir dans la fixation des « indicateurs » permettant d’apprécier les « critères » d’une formation de qualité,  financer des « enquêtes de satisfaction pour évaluer la qualité de l’offre de service », en clair désigner les meilleurs ; « suivre la mise en œuvre des contrats de plan régionaux » ; « organiser le partage d’informations prévu à l’article L. 6353-10 » c’est-à-direle flicage et la mise en concurrence des salariés ;

-       établir le « répertoire national des certifications professionnelles »ainsi que le « répertoire spécifique » qui seront ainsi fixés sans contrôle académique ;

-       œuvrer à laréalisation complète du programme électoral de Macron, la fusion des contrats d’apprentissage et de professionnalisation baptisés « alternance »(émission de recommandations sur le « niveau et les règles de prise en charge du financement de l’alternance afin de favoriser leur convergence »).

26/ Et « France compétences », ce sont les « forces du marché »

v  « France Compétences » est une institution attrape-tout qui fusionne quatre instances actuelles, dont deux paritaires : la « Commission Nationale de Certification Professionnelle », le « Comité Paritaire interprofessionnel National pour l’Emploi et la Formation » (COPANEF), le « Conseil National de l’Emploi, de la Formation et de l’Orientation Professionnelles » (CNEFOP) et le Fonds Paritaire de Sécurisation des parcours Professionnels (FPSPP).

 

v  Comme les recommandations de l’Etat pour l’assurance chômage, les recommandations de « France compétences » vaudront ordre.

 

v  Les contrôles des « opérateurs de compétences » seront exercés par « France compétences »,en concurrence avec les inspecteurs du travail, les inspecteurs de la formation professionnelle et autres agents de contrôle publics.

 

v  Comme pour l’assurance maladie passée peu à peu sous le contrôle de l’Etat en 1995 et 2004, « France compétences » aura un directeur général, nommé par décret. Et pour que rien n’échappe,  le président du conseil d’administration sera une « personnalité qualifiée » nommée par décret du président de la République en personne. Les membres du conseil d’administration seront eux aussi nommés par décret et pour la composition,  du cousu main, quatre des cinq collèges seront peu ou prou sous le contrôle du Medef, le cinquième (organisations syndicales de salariés) n’ayant par ailleurs jamais causé grand souci dans les instances paritaires nationales.

Les agents de « France compétences » seront tous de droit privé. On aurait pu penser que, vu les missions d’intérêt public de cet établissement public, un peu d’indépendance lié au statut de la Fonction publique n’aurait pas nui. D’autant que cet étrange établissement public est soumis en matière de gestion financière et comptable aux règles applicables aux entreprises industrielles et commerciales et que les recettes, outre les impôts, sont peu claires (« redevances pour service rendu, produit des ventes et des locations ainsi que dons et legs et recettes diverses »).

 

A travers « France Compétences », le patronat organisé met donc la main sur le contenu des formations, initiale et continue, sur l’enregistrement de l’ensemble des certifications et d’une façon globale sur l’ensemble du marché de la formation.

27/ Les à-côtés

Avant cette loi, le marché était encadré par de multiples institutions.

 

v  Pour ce qui concerne les informations, l’organisme national (O.N.I.S.E.P, Office National d’Information sur les Enseignements et les Formations, établissement public administratif créé en 1970) voit avec la loi ses directions régionales tout simplement transférées aux Régions, plus près des besoins locaux du patronat.

L’information dans les établissements scolaires ne sera plus assurée par les conseillers d’orientation-psychologues et directeurs de C.I.O, devenus « psychologues de l’Education nationale », mais par les enseignants…« volontaires »…

 

v  Les Régions perdent le rôle de coordination du service public régional de l’orientation et du « conseil en évolution professionnelle ».

 

v  Le « conseil en évolution professionnelle », rabatteur imaginé déjà par Fillon en 2005 pour remplacer les C.I.O, a été mis en place en 2014.

 

Il est certes annoncé comme un service gratuit mais non désintéressé.

 

Mais, d’une part il n’interviendra plus dans le cadre du service public régional de l’orientation en lien avec la Région, « France compétences » étant désormais chargé de l’organiser.

 

D’autre part, les cinq types d’organismes qui vont distribuer ce conseil auront essentiellement pour fonction de tenir la main des personnes pour utiliser les multiples services en ligne derrière lesquels se trouvent les marchands d’espoir d’emploi.

 

Il y aura comme actuellement les quatre types d’organismes qui ont déjà intégré ce type de fonctionnement :

 

  • pour les chômeurs, parmi lesquels les trois quarts des personnes handicapées, Pôle emploi, qui, lorsqu’il ne renvoie pas à un organisme prestataire, conseille l’utilisation de ses services en ligne (« Emploi store » et ses services web, MOOC, Serious Game, sessions d’e-learning ; « Activ’Projet » et ses professionnels de l’orientation) ; 
  • pour les moins de 26 ans, les Missions locales et ses 7000 conseillers promis soit à la fusion soit à la mise sous tutelle de Pôle emploi ; 
  • pour les cadres,l’APECet ses 500 consultants, payés sur les cotisations des entreprises et des cadres qui voient  leur missions progressivement transférées au site job board et aux passerelles créées avec les réseaux sociaux professionnels Linkedin et Viadeo ; 
  • et pour environ un quart des personnes handicapées, souvent en délégation de Pôle emploi, Cap Emploiet son réseau associatif de 1700 salariés, qui  a souvent recours à des prestataires externes et dont le rapprochement souhaité, selon le rapport de l’Igas de 2017, avec Pôle emploi au même titre que les Missions locales laisse entrevoir le même futur au titre de la « rationalisation » des moyens.

 

Pour tous les autres, un cinquième organisme, dénommé « opérateur régional » rabattra vers le CPF transition professionnelle.

 

v  Et lorsque la personne en recherche de formation découvre sur son « compte » C.P.F des organismes qui lui sont proposés, il lui est suggéré de faire une étude comparative (tarifs, programmes, contenu de la formation) et là : « Besoin d’être accompagné ?
Votre
conseiller en évolution professionnelle peut vous accompagner dans le choix de votre organisme ».

28/ En aval, les « organismes de formation »

Les marchands font connaître donc leurs offres de formation professionnelle sur le « Système national d’information » abrité par la C.D.C, qui, elle, aura le monopole de la passation des marchés publics.

 

v  Qui va contrôler les marchands ?

 

Jusqu’à présent, en amont, ce contrôle était directement assuré par les financeurs : Organismes paritaires collecteurs agréés (O.P.C.A), Etat, régions, Pôle emploi, fonds de développement pour l’insertion professionnelle des handicapés.

 

Désormais, en amont, les marchands vont être « certifiés » par des « organismes certificateurs » qui eux-mêmes seront « accrédités » soit par l’ « instance nationale d’accréditation » (le COFRAC, créé en 1994) soit par « tout autre organisme signataire d’un accord européen » sur l’accréditation, soit par une « instance de labellisation ».

Les « certificateurs » devront certifier sur la base de « critères » définis par décret, mais les « indicateurs d’appréciation » de ces critères et les « modalités d’audit associées » seront eux-mêmes fixés par décret…sur la base de l’avis de « France Compétences » ; et « l’instance de labellisation » devra être « reconnue » par « France Compétences ». A qui donc tout revient.

En aval, les « organismes de formation » n’auront plus l’obligation de transmettre à l’autorité administrative  le document retraçant l’emploi des sommes reçues, le bilan pédagogique et financier, le bilan, le compte de résultat et l’annexe du dernier exercice clos. Ce document ne sera transmis que si les « inspections compétentes » le demandent…

 

La loi encadrait précisément les modalités des formations dispensées. Désormais les obligations des « organismes de formation » à l’égard des payeurs relèveront d’une « convention » dont les modalités seront déterminées par un simple décret.

 

Le « contrôle » par les stagiaires et les apprentis sera très fortement allégé. il ne sera plus obligatoire de transmettre aux stagiaires, et désormais aussi aux apprentis, « le programme et les objectifs de la formation, la liste des formateurs avec la mention de leurs titres ou qualités, les horaires, les modalités d’évaluation de la formation, les coordonnées de la personne chargée des relations avec les stagiaires ou les apprentis par l’entité commanditaire de la formation et le règlement intérieur applicable à la formation ». Ces éléments d’information ne seront que « mis à disposition », sauf la mention, importante, des titres ou qualités des formateurs qui, elle, a été retirée des informations à mettre à disposition…

v  Tout le monde sera bientôt « organisme de formation »au même titre que le secteur privé et soumis à une concurrence libre et légèrement faussée.

 

Dans la concurrence qui est organisée entre organismes de formation, on a vu le sort réservé à l’A.F.P.A et aux GRETA.

 

Lesétablissements d’enseignement secondaire publicsn’échapperont pas à la mise en concurrence sur le marché de la formation dès lors qu’ils dispensent des « actions de formation par apprentissage ». Ils devront en effet être « certifiés » à partir de 2022 selon les nouvelles règles du code du travail.

 

Et si lesétablissements d’enseignement supérieur publics continuent à être « accrédités » selon les règles du code de l’éducation et, à ce titre, à être généreusement « réputés avoir satisfait à l’obligation de certification », leur« accréditation » fera l’objet – tant pour les « critères » que pour les « indicateurs » mis en œuvre – d’une conférence annuelle entre … « France Compétences » et les deux instances actuelles de contrôle (le Haut Conseil de l’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur et la Commission des Titres d’Ingénieur créée en 1934) composées majoritairement de collèges académiques.

 

Un chef d’établissement public d’enseignement pourra désormais passer, « de sa propre initiative » la convention de formation professionnelle qui liait, lors de la création d’un C.F.A, la Région à de multiples intervenants dont les établissements publics. Et pourra, en conséquence, faire ladéclaration d’activité de prestataire de formation professionnelle.

 

Les créations, par convention, de sections d’apprentissage (S.A) à l’intérieur des établissements d’enseignement va échapper à la Régionqui déterminait jusqu’ici le contenu de ladite convention. Ces créations, sous forme d’« Unités de Formation par Apprentissage » (U.F.A), pourront désormais intervenir par une simple convention passée entre le C.F.A et l’établissement d’enseignement. Avec ce remplacement des S.A par des U.F.A, l’établissement perd, au profit du C.F.A, la responsabilité administrative et financière.

 

D’une façon générale, la transformation des établissements publics d’enseignement en prestataires de la formation professionnelle continue est entamée par un nouvel article du code de l’éducation, qui limite cependant le contenu des formations à la « prévention » sans que l’on sache le contenu et les limites de cette notion.

 

Les C.F.A eux-mêmes sont transformés en « organismes de formation » comme les autres par l’application à ces C.F.A de l’ensemble des dispositions applicables aux organismes de formation entérinant la fin de la distinction entre formation initiale et continue.

Ils pourront sous-traiter tout ou partie de leurs missions non seulement à des établissements d’enseignement comme jusqu’ici mais aussi à des « organismes de formation », sans autre précision. Et pour la sous-traitance aux entreprises, elle pourra être totale (les apprentis pourront même y être hébergés) et sans contrôle, alors qu’elle ne pouvait l’être que partiellement et sous condition d’habilitation de l’inspection de l’apprentissage.

L’étude d’impact de la loi « Avenir professionnel » indique bien le but visé par la transformation du statut juridique des C.FA ainsi que leur dégagement de la tutelle des Régions : en finir avec le « manque de réactivité à proposer une formation répondant à un besoin exprimé par une entreprise » ; permettre au C.F.A de « répondre aux besoins en compétences des entreprises sans être dépendant d’une décision administrative préalable ». Ou dit encore plus clairement : « En transformant le système, le gouvernement souhaite passer d’un système administré à un système de libre développement des C.F.A, correspondant à la demande des entrepriseset aux attentes des jeunes » ; « instaurer un financement de l’apprentissage plus direct, dans une relation désintermédiée entre l’entreprise et le centre de formation d’apprenti[...] un système où les coûts pratiqués sont la résultante d’une prestation rendue répondant aux exigences du commanditaire ».

Les chambres consulaires, établissements publics certes, mais qui pour l’essentiel véhiculent les intérêts patronaux, pourront désormais créer, gérer et financer des « établissements publics d’enseignement » dans le cadre de leur mission relative à la formation professionnelle. Elles pourront également s’occuper des contrats d’apprentissage et autres (formation professionnelle initiale et continue) dans le secteur public non industriel et commercial dont le personnel ne relève pas du droit privé.

vLefonctionnement des « organismes de formation » va se rapprocher de celui desentreprises.

 

Le règlement intérieur qui ne concernait que les stagiaires, sera aussi valable pour les apprentis. De même, tant le contenu de ce règlement intérieur que la « représentation des stagiaires et des apprentis » qui sera prévue dans tous les cas et non seulement pour les formations longues, sont analogues aux dispositions concernant les salariés dans les entreprises.

 

En ce domaine, le plus spectaculaire est sans doute la création, pour le 1erjanvier 2020, des « écoles de production ». L’enseignement technique privé va être résolument moderne : à côté des écoles des chambres de commerce et d’industrie, des écoles techniques et des centres d’apprentissage privés, voici donc venir d’improbables « écoles », qui seront destinataires d’une partie de la taxe d’apprentissage. Reconnues par l’Etat et gérées par des organismes à but non lucratif, elles sont censées mettre des jeunes sous statut scolaire « en condition réelle de production ». De la chair à actions gratuite pour les entreprises avec lesquelles ces « écoles de production » pourront passer des « conventions financières ». La main d’œuvre visée est celle des jeunes sans qualification. La garderie sociale, en passant ainsi de l’école à l’usine, sera enfin génératrice de profits directs, pour l’usine et pour l’école.

 

N’ont pas été oubliés les « établissements publics à caractère scientifique, culturel et professionnel » qui pouvaient certes déjà « créer des services d’activités industrielles et commerciales ou prendre des participations, participer à des groupements et créer des filiales », mais cela restait justifié par la volonté de « faire connaître leurs réalisations » et surtout la nécessité de « gérer et valoriser leur patrimoine immobilier » depuis que l’Etat les avait condamnés à l’ « autonomie ».

Désormais, ces établissements pourront se transformer en entreprise pour vendre leur « offre de formation continue ».

 

Les moteurs de la concurrence ?

Le financementbien sûr, qui va passer de plus en plus aux branches professionnelles et même directement à l’entreprise par exemple pour la décision d’affectation d’une partie de la taxe d’apprentissage.

Pour le choix des investisseurs , des familles et des personnes en formation, pourront être mis à profit les résultats de la diffusion publique des chiffres de chaque C.F.A et de chaque lycée professionnel : « taux d’insertion professionnelle », « taux d’obtention des diplômes ou titres professionnels » ; « taux de poursuite d’études » ; « taux d’interruption en cours de formation » ; « taux de rupture des contrats d’apprentissage conclus » et, last but not the least : « valeur ajoutée de l’établissement ».

 

Mais le moteur attendu, c’est le clientfinal, salarié, chômeur ou travailleur indépendant qui, muni de son C.P.F monétisé en euros, va pouvoir, de son mobile, aller consulter les offres sur le site de la C.D.C et faire son marché. En effet, le système actuel, où les financeurs, font l’intermédiaire entre le client et l’organisme de formation avait plusieurs inconvénients selon l’étude d’impact : un marché de la formation « peu challengé », insuffisamment débarrassé des formateurs : « peu adapté aux nouvelles modalités pédagogiques (formation à distance, pédagogies numériques, etc.) ».

A ce jeu, c’est bien sûr l’offre publicitaire qui orientera le marché réel. Quelques minutes passées sur le site Emploi store de Pôle emploi permet de se faire une idée du mythe de la concurrence non faussée : on peut rapidement apprendre tout l’intérêt à se former en ligne et à retenir les meilleurs sur le marché (Microsoft Academy par exemple) ; on peut également y apprendre gratuitement « comment se vendre en deux minutes » avec le coach Yves Gauthier (1 148 997 vues au 12 octobre 2018) qui vous emmènera sur son site www .EntretienEmbauche.TV où vous pourrez pour la modique somme de 17 euros vous procurer le Pdf « Apparaître sur le radar des recruteurs » voire, en ajoutant 27 euros au panier « Trouver un emploi par le réseau » (pour ceux qui ne savent pas encore qu’en traversant la rue, c’est gratuit.

Et le caissier ?

Pour l’apport financier des « comptes » C.P.F, la C.D.C se félicite ainsi sur son site  des avancées de la loi « Avenir professionnel »: « La Caisse des Dépôts, jusque-là opérateur technique du compte personnel de formation (C.P.F) et du compte personnel d’activité (C.P.A), devient un acteur de premier plan de la formation professionnelle : premier financeur avec 1,5 à 2 milliards d’euros de droits C.P.F centralisés[...]. Elle mobilise aujourd’hui ses équipes informatiques ainsi que la fabrique Caisse des Dépôts, sa start-up interne, sur le projet phare de cette loi, le C.P.F, avec la création d’une place de marché, d’un service internet et d’une application mobile présentant l’offre des organismes de formation et la possibilité de payer en ligne ».

3/ La loi « Avenir professionnel » fait sa part dans la destruction de la Sécurité sociale

La Sécurité Sociale, arrachée en 1945 et 1946, était basée sur le principe d’assurance collective solidaire : payer selon ses possibilités et recevoir selon ses besoins. Ainsi la solidarité allait vers ceux qui ne peuvent pas ou plus travailler (malades, invalides, chômeurs, retraités).

Pour cela les actifs salariés consentaient au versement de cotisations sociales (réparties en une part dite salariale, qui diminue leur rémunération mensuelle, et une part dite patronale, versée par l’employeur).

 

Pour que le système soit sûr et stable, la condition impérative était que la redistribution se fasse immédiatement sans spéculation avec la masse financière des cotisations. L’expérience alors récente de la faillite des fonds d’épargne retraite pendant les années trente avait aidé à prendre cette sage et ferme résolution.

 

Les fondateurs de la Sécurité sociale voulaient que les travailleurs en contrôlent le fonctionnement, par des représentants élus des organisations syndicales de salariés. En 1967, par ordonnances, ce contrôle est devenu paritaire avec les représentants des employeurs, puis ceux-ci en ont pris pour l’essentiel la direction par Etat interposé (1995 et 2004 notamment).

La part des cotisations sociales dans le financement de la Sécurité sociale, qui justifiait le contrôle par les travailleurs, a fondu progressivement et de plus en plus rapidement : en 1981 il n’était plus que de 77 %, en 2017 il est de 56 % (voir Annexe 4). Autant que les employeurs ne paient plus, le financement complémentaire s’effectuant sous forme d’impôts et de taxes, essentiellement (environ 90 %) payés par les travailleurs. Chaque année apporte son lot d’exonérations de cotisations sociales pour les employeurs, quand ce n’est pas la disparition complète de la part salariale des cotisations, celle pour la maladie et le chômage étant les dernières en date.

 

31/ La loi institutionnalise la disparition de la solidarité avec la monétisation du C.P.F

 

Sous couvert d’une égalité…des chances, cette égalité qui sert de paravent idéologique à tous les reculs. Ceux qui s’habillent en « socle commun », « universalité » et autres prétendus combats contre les « privilégiés ».

Avec 500 euros par an, compte tenu du coût moyen actuel des formations, on divise par deux la durée des formations accessibles. Il y aura donc deux catégories de « clients » : ceux qui renonceront à une formation ou s’achèteront des panoplies en kit pour « « savoir se vendre » et ceux qui pourront sortir de leur poche le complément nécessaire, les premiers de cordée » et les premiers de corvée.

 

C’est la même logique, épargne individuelle contre assurance collective, que l’on retrouve dans la loi qui retire, de fait, la gestion de l’U.N.E.D.I.C et de Pôle emploi aux « partenaires sociaux », éliminant ainsi les pourtant faibles résistances qui avaient par exemple permis de revenir sur la dégressivité de l’indemnisation du chômage.

 

La Sécurité Sociale est progressivement mise en « comptes »individuels. Par le C.P.A, hébergé par la Caisse des dépôts et consignations, trois « comptes » sont déjà en place : le « compte » pivot essentiel, le C.P.F qui a vocation à organiser la transparence du marché des travailleurs et de la formation ; le C.E.C, « Compte d’Engagement Citoyen » pour le travail gratuit ; le C.P.P, « Compte Professionnel de Prévention », qui évite de prendre en compte pour la retraite les travaux pénibles et dangereux.

 

Via le C.P.A, ou par « France Connect » conçu pour à terme assurer la connexion à toutes les administrations et organismes sociaux, on accède au P.N.D.S (« Portail National des Droits Sociaux ») édité par la Caisse Centrale de Mutualité sociale Agricole et hébergé par la société SIGMAP. En un seul clic vous accèderez à ce service « universel, simple…lisible » et y découvrirez vos « droits sociaux » « personnalisés » pour l’assurance maladie, la retraite, Pôle emploi, la famille, le logement, les minimas sociaux. Vous accèderez « simplement » à vos « comptes personnels », pourrez y faire des simulations et « engager des démarches » sans plus avoir à faire à ceux qui iront grossir les files d’attente à Pôle emploi.

Derrière ce portail sont déjà présents toutes les branches de la Sécurité sociale et même la M.G.E.N, Pôle emploi et la C.D.C

 

L’idée est de réunir tous les « comptes » ayant trait à une activité, salariée ou non, avec pour objectif de pouvoir, grâce à une unité commune (euros ou points transformables en euros) faire des transferts de « compte » à « compte ».

Pour l’essentiel des transferts à sens unique vers le « compte » de formation C.P.F comme le préconisait le rapport préparatoire à la loi El Khomri : vous avez des « points » de pénibilité (C.P.P, vous préférez faire une formation pour changer de métier, prenez vos points de pénibilité qui ne vous seraient utiles que lors du départ en retraite. La règlementation l’a d’ailleurs anticipé qui affecte les vingt premiers points de ce « compte » C.P.P au compte de formation. Ou bien vous avez des heures supplémentaires ou des congés que votre employeur économise dans votre « compte » épargne-temps, il vous manque quelques sous pour une formation, n’hésitez-pas.

 

32/ La loi donne l’avant-dernier coup de la destruction de la Sécurité sociale

 

Passer à un système social fonctionnant par capitalisation (l’Etat assure un socle indécent par l’impôt et la loi du plus riche s’occupe du reste) nécessite d’en finir avec ce qui reste de la solidarité.

v  Pour ce qui est de l’assurance maladie, sa reprise en mains par l’Etat et ceux qui y sont dominants s’est faite en trois temps (1967, 1995, 2004). Que ce soit au niveau de la direction de cet organisme que du financement, la longue marche pour remplacer les cotisations sociales qui fondent la solidarité par les impôts et les taxes a beaucoup progressé.

Les déremboursements et autres dégradations du secteur public de la santé conduisent au recours de plus en plus nécessaire aux assurances privées et autres « complémentaires ». Le mouvement va s’accélérer avec la disparition des cotisations salariales maladie et chômage et la pérennisation d’exonérations de cotisations sociales patronales, qui pourraient même ne plus être compensées.

Le proche achèvement de l’unification avec le régime général des autres régimes de sécurité sociale du secteur privé (R.S.I, M.S.A) sous la bannière de la PUMa (« Protection universelle maladie »). Cette PUMa permet de supprimer les ayant-droits et de pouvoir enfin avoir son « compte Ameli » individuel dès 18 ans voire, à la demande, dès 16 ans. Elle rend aussi toujours plus logique le passage à l’impôt pour le financement de la Sécurité sociale

v  Pour ce qui est des retraites, il suffit d’ouvrir les yeux. Le gouvernement prépare une retraite « universelle » c’est-à-dire également faible pour le plus grand nombre, sur le modèle du C.P.F : tu travailles toute ta vie, tu accumules des points qui dans 45 ans ou plus vaudront des euros, tu verras alors ce qu’il te restera pour vivre : cela dépendra de la conjoncture économique et financière, de l’espérance de vie telle qu’elle sera dans 45 ans, et puis du bon vouloir des gouvernants dans la fixation de la valeur du point.

v  La question déterminante est toujours la même : quelles cotisations et que fait-on avec, répartition ou capitalisation ?

 

-      La C.A.D.E.S(« Caisse d’Amortissement de la Dette Sociale ») créée par Juppé en 1996 est un étrange et discret établissement bancaire (voir « Sécurité Sociale Main basse sur le trou », Editions Carnot, 2004) créé pour héberger et officiellement combler le « trou » de la Sécurité sociale. Alimenté depuis vingt-deux ans par une cotisation spéciale (C.R.D.S, « Contribution au remboursement de la Dette Sociale ») puis également par une portion toujours plus importante de la C.S.G payée à 90% par les salariés, chômeurs et retraités, cette caisse joue des cotisations payées avec les marchés financiers (le contraire de la répartition) et a versé, de 1996 à 2017, 51,6 milliards d’euros d’intérêts financiers au titre du remboursement de la dette.

En 2017 restait à « amortir » 121 milliards d’euros de dette. Il a été décidé en 2016 de combler ce « trou » d’ici à 2024 : en siphonnant le Fonds de Réserve des Retraites, en tablant sur la perpétuation de taux d’intérêt historiquement bas et surtout sur l’arrêt en cours des déficits annuels du régime général de sécurité sociale enfin obtenu à grand renfort de dégradation des retraites versées et des soins dispensés.

En juillet 2017, la suppression de fait de la C.A.D.E.S a été décidée. Ses missions et ses agents contractuels vont être repris à Bercy par l’Etat, représenté par l’Agence France Trésor, qui assurera donc « la responsabilité des activités de financement et la gestion du service de la dette sociale » en lieu et place de la banque de la Sécurité sociale (A.C.O.S.S). Pourquoi ne pas redonner à la banque de la Sécurité sociale la gestion de ses ressources si ce n’est pour continuer à jouer aux placements sur les marchés financiers ?

-       Pour refermer le cercueil de la Sécurité sociale il manque encore un deuxième clou. Il a sans doute comme nom C.D.C, la mieux placée pour mettre en œuvre le régime unique de retraite « par points » que Macron va vraisemblablement tenter de faire passer cet été.

 

La C.D.Cen 2017, c’est déjà 1 retraité sur 5.

7,6 millions de cotisants et 3,8 millions de pensionnés (Régime de base des fonctionnaires territoriaux et hospitaliers ; Retraitesdes mineurs, des ouvriers de l’État, des personnels de la Banque de France ;Retraite complémentaire des agents publics non titulaires et des élus : Ircantec ; Retraite additionnelle des fonctionnaires : RAFP ; Retraites catégorielles et supplémentaires : débitants de tabac, régies, Agence française pour la biodiversité (ex Onema), Compagnie générale maritime, élus locaux).

 

Que le groupe C.D.C puisse absorber ce qui lui manque, la retraite de base du régime général et celle des fonctionnaires d’Etat, cela ne fait aucun doute.

Sur le « panorama » de ses activités en 2017, on peut lire que « la Caisse des Dépôts assure pour l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale (Acoss) les prestations bancaires indispensables à la performance de la gestion de trésorerie du régime général de la Sécurité sociale. Elle propose également des services bancaires adaptés, comme le traitement de leurs flux financiers de masse, aux organismes de Sécurité sociale ainsi qu’aux régimes de protection sociale obligatoires gérés par la direction des retraites et de la solidarité … [...] Modèle unique dans le paysage français de la protection sociale et opérateur multifonds. La direction des retraites et de la solidarité met ses savoir-faire au service de ses mandants et des pouvoirs publics. Elle gère tous types de régimes, de base, complémentaire ou supplémentaire, en annuités ou en points ».

 

L’absorption en cours de La Poste par la C.D.C conduit à la constitution d’un groupe financier (C.D.C, La Poste, C.N.P, Bpifrance) qui va peser un millier de milliards d’euros, la moitié du PIB, trois fois le budget de l’Etat ou les recettes de la Sécurité sociale.

Les dérives de la C.D.C qui voient grandir ses activités concurrentielles à travers ses filiales, l’évolution de son statut vers une banque commerciale ordinaire, l’ouverture des retraites complémentaires aux fonds de pension par la loi PACTE en cours, s’ajoutent au tableau pour conforter l’hypothèse sur le rôle que va être amenée à jouer la CDC dans la casse des retraites annoncée.

 

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Sources :

 

Code du travail ;

Code de l’éducation ;

Code de la Sécurité sociale ;

Annexe au projet de loi de Finances 2018 Formation professionnelle ;

DARES Analyses, octobre 2012 ;

France Stratégie « Le marché de la formation professionnelle continue à l’épreuve de l’enjeu de la qualité », 2015 ;

Site Eduscol, « L’essentiel sur le réseau des Greta », mars 2018 ;

Rapport de l’IGAS « Evaluation des Cap emploi et de l’accompagnement vers l’emploi des travailleurs handicapés chômeurs de longue durée », mai 2017 ;

Etude d’impact « PROJET DE LOI pour la liberté de choisir son avenir professionnel », 26 avril 2018 ;

CADES, site, juillet 2017 ;

Les Comptes de la Sécurité sociale, Rapport à la Commission des comptes de la sécurité sociale, juillet 2017 ;

Leslie VARENNE, Philippe BLANCHARD, « Sécurité Sociale Main basse sur le trou », Editions Carnot, 2004 ;

Panorama Groupe Caisse des Dépôts 2017

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Annexe 1

MESURÉ(E), POSITIONNÉ(E), ACCOMPAGNÉ(E), FICHÉ(E)

tout au long de sa vie

Ci-dessous, le contenu succinct du fichier « Compte Personnel de Formation » dont « bénéficie », depuis la loi n°2014-288 du 5 mars 2014, chaque personne en âge de travailler, et ce tout au long de sa vie et un peu de sa mort. Le fichier peut en effet « vivre » trois ans après la mort, en cas d’héritiers des « droits » inscrits et un peu plus même en cas de contentieux : « Les données à caractère personnel et les informations enregistrées dans le traitement sont conservées pendant une durée de trois ans à compter de la date du décès du titulaire du compte personnel de formationEn cas de contentieux, ce délai est prorogé, le cas échéant, jusqu’à l’intervention d’une décision juridictionnelle définitive » (Article R.6323-20 du code du travail issu du décret n°2014-1717 du 30 décembre 2014)

Article R.6323-15 du code du travail :

Dans la mesure où leur exploitation est nécessaire à la poursuite des finalités définies aux 1° à 5° de l’article R.6323-14, les catégories de données à caractère personnel pouvant être enregistrées dans le traitement automatisé sont les suivantes:

1° Données personnelles relatives au titulaire du compte personnel de formation:

a) Numéro d’inscription au répertoire national d’identification des personnes physiques (NIR) ;

b) Date de création dans le référentiel CPF ;

c) Nom de naissance, nom d’usage, nom marital et prénoms, sexe, date et lieu de naissanceindication d’un handicap éventuel;

d) Adresseen France et, le cas échéant, à l’étranger, adresse du lieu de travail, numéro de téléphone et adresse électronique ;

e) Le cas échéant, date de décès ;

f) Le cas échéant, les numéros d’identifiant internes à Pôle emploimentionnés au a du 1° de l’article R.5312-42.

2° Données relatives aux heures comptabilisées:

a) Heures acquises au titre du droit individuel à la formation mentionné au V de la loi n°2014-288 du 5 mars 2014 relative à la formation professionnelle, à l’emploi et à la démocratie sociale ;

b) Heures inscrites sur le compte personnel de formation ;

b bis) Heures inscrites au titre du compte d’engagement citoyen : nature et date des activités au titre desquelles les heures ont été acquises, identité du déclarant ;

b ter) Indicateur sur la présence de points sur le compte professionnel de prévention;

c) Informations sur la nature des droits : périodes d’activité et d’inactivité (avec le motif de celle-ci), dates prises en compte ;

d) SIRET de l’employeur, code profession ;

e) Temps de travail, taux de temps de travail;

f) Rémunérationdu titulaire du compte ;

3° Données relatives au dossier de formation:

a) Formations éligibles ;

b) Historique des opérations effectuées sur le compte ;

c) Champ de saisie de commentaires par le titulaire ;

d) Titre, intitulé complet et objectif de la formation ;

e) Date d’accord du titulaire pour la mobilisation d’heures inscrites au compte ;

f) Données relatives à l’organisme de formation : SIRET, raison sociale, coordonnées, contact, adresse inscription, renseignement spécifique, code public visé ;

g) Données relatives à la formation: date, durée et coût total de la formation, prévus et réalisés, modalités (lieu, présentielle ou à distance, interne ou externe, entrée-sortie), contenu, rythme, contact, parcours, conditions (niveau d’entrée, code de ce niveau, conditions spécifiques) ;

h) Statut du stagiaire, niveau ou titre obtenu, catégorie socio-professionnelle ;

i) En cas de stagiaire salarié : SIRET, raison sociale, effectifs, adresse de l’employeur, URSSAF, activité principale de l’entreprise/ nomenclature des activités françaises (APE/ NAF), OPCA de l’entreprise, identifiant convention collective/ convention collective nationale (IDCC/ CCN), imputation ;

j) Rémunération éventuelle sur le minimum de 0,2 % du montant des rémunérations mentionné au I de l’article L.6323-20; prise en charge éventuelle des frais ;

k) Financement de la formation : solde disponible en heures du droit individuel à la formation et des droits acquis au titre du compte personnel de formation ; droits acquis en heures mobilisés au titre du droit individuel à la formation et au titre du compte personnel de formation ; coût des frais pédagogiques annexes ; montant de la rémunération prise en charge ; en cas de financement d’heures complémentaires en application du II de l’article L.6323-4, et par financeur, nom de l’organisme, nombre d’heures financées, montant financé, commentaire;

4° Données relatives au passeport d’orientation, de formation et de compétences:

a) Etudes et formations suivies;

b) Diplômes et certifications obtenus et dates d’obtention;

c) Qualifications détenues et exercées;

d) Expérience professionnelle;

e) Aptitudes et compétences;

f) Permis de conduire;

g) Langues étrangères;

h) Assermentations;

5° Données relatives aux gestionnaires des organismes:

a) Nom et prénom, fonction ;

b) Organisme employeur, unité d’appartenance, numéro de téléphone et adresse électronique.

6° Données relatives aux engagements bénévoles et de volontariat:

a) Date et description des activités exercées ;

b) Identité des organismes au sein desquels ces activités ont été exercées ;

c) Aptitudes et compétences acquises dans le cadre de ces activités;

d) Jours de congés accordés par l’employeur en application de l’article L.5151-12 ;

7° Données relatives au bulletin de salaire:

a) Opérateur communiquant le bulletin de salaire;

b) Clé de sécurité et date de validité de la clé.

Dans la mesure où leur exploitation est nécessaire à la poursuite des finalités définies au 6° de l’article R. 6323-14, les catégories de données à caractère personnel pouvant être enregistrées dans le traitement automatisé sont les suivantes:

1° Données d’identification du titulaire du compte personnel de formation, y compris le numéro d’inscription au répertoire national d’identification des personnes physiques (NIR) ;

2° Données relatives à l’action de formation ;

3° Données relatives à l’entrée effective, aux interruptions et aux sorties de formation;

4° Données relatives au parcours professionneldu titulaire du compte ;

5° Données relatives au parcours de formationdu titulaire du compte.

Article R.6323-18 du code du travail

I.-Dans le cadre des finalités définies à l’article R.6323-14 et dans la limite des informations nécessaires, le traitement peut être alimenté par les traitements automatisés relatifs:

1° Au Système national de gestion des identifiants;

2° Aux données sociales collectées par le Centre national de transfert de données sociales;

3° Aux données sociales collectées par la Mutualité sociale agricole ;

3° bis Aux données sociales collectées par l’Etablissement national des invalides de la marine ;

3° ter Aux données sociales détenues par l’agence centrale des organismes de sécurité sociale et par les unions pour le recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales;

3° quater Aux données collectées par l’association pour la gestion de la sécurité sociale des auteurs et la maison des artistes;

4° Aux données sociales collectées au titre des activités mentionnées aux articles L.6331-55, L.6331-63 et L.6331-65;

5° Aux données collectées par les organismes collecteurs paritaires agréés pour alimenter le compte par les heures complémentaires et supplémentaires [...] ;

5° bis Aux données collectées par les fonds d’assurance-formation de non-salariés, les chambres de métiers et de l’artisanat de région, les chambres régionales de métiers et de l’artisanat et les organismes collecteurs paritaires agrées [...], pour alimenter le compte par les heures complémentaires et supplémentaires [...] ;

5° ter Aux données collectées par l’IRCEM Prévoyance, institution de prévoyance ;

6° Aux donnéesmentionnées à l’article L. 313-7 du code de l’éducation relatives aux jeunes quittant les systèmes de formation initiale sans diplôme ni qualification professionnelle;

7° Aux données relatives aux diplômes et compétences des élèves et des étudiantscollectées par les ministres chargés de l’éducation nationale et de l’enseignement supérieur ;

8° Aux données relatives aux parcours de formation professionnellementionnées à l’article L.6353-10.

II.-Dans le cadre des mêmes finalités, le traitement peut être mis en relation avec les traitements automatisés des collectivités et organismesmentionnés au III de l’article R.6323-16. Ces mises en relation sont subordonnées, conformément au II de l’article 30 de la loi n°78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés, à l’information préalable de la Commission nationale de l’informatique et des libertés et, le cas échéant, à la modification des actes portant autorisation de ces traitements.

III.-Dans le cadre de la finalité mentionnée au 5° de l’article R. 6323-14, le traitement peut être alimenté par les traitements automatisés relatifs:

1° Aux données collectées par les ministres chargés des affaires étrangères et du commerce extérieur, l’Agence des services et de paiement, Business Franceet l’association France Volontaires dans le cadre du service civique;

2° Aux données collectées par l’Agence nationale de santé publique dans le cadre de la réserve sanitaire ;

3° Aux données collectées par les ministres chargés de la défense et de l’intérieur dans le cadre de la réserve militaire ;

4° Aux données collectées par les communes dans le cadre de la réserve communale de sécurité civile ;

5° A l’activité de maître d’apprentissage, par l’intermédiaire du service dématérialisé mentionné à l’article 4 de la loi n° 2011-893 du 28 juillet 2011 pour le développement de l’alternance et la sécurisation des parcours professionnels.

 

 

 

 

 

Annexe 2:

 

QU’AS-TU APPRIS A L’ECOLE MON FILS ?

 

En 2006, l’Union européenne a défini huit « compétences clés pour l’éducation et la formation tout au long de la vie ». La même année, la France a fait de même (« Socle commun de connaissances et de compétences ») pour les sept « compétences » à acquérir à l’école (fin de troisième), inscrit au code de l’éducation (D.122-1).

En 2015, un « Socle de connaissances et de compétences professionnelles » a été adopté par un comité paritaire interprofessionnel national et immédiatement inscrit sans changement par un décret dans le code du travail(D.6113-2).

 

Ici comparaison vaut raison (le socle français a été modifié en 2012 dans sa structure et a ajouté à la dénomination du « socle » le mot « culture », mais le fonds reste inchangé) : mis à part la culture humaniste (et on voit le sort qui leur est réservé depuis quelques années dans l’éducation) et la langue étrangère, toute chose que les employeurs ne jugent pas utile pour la main d’œuvre de base, les « compétences » que les employeurs veulent sont bien les mêmes que celles que doivent acquérir les enfants.

 

CorrespondancesSocle scolaire 2006 / Socle U.E 2006 / Socle interprofessionnel 2015 :

 

  • 1Maîtrise de la langue française /Communication dans la langue maternelle / 1.La communication en français;
  • 2.  Pratique d’une langue vivante étrangère /Communication en langues étrangères / Rien ;
  • 3Principaux éléments de mathématiques et culture scientifique et technologique / Compétence mathématique et compétences de base en sciences et technologies / 2L’utilisation des règles de base de calcul et du raisonnement mathématique ;
  • 4. Maîtrise des techniques usuelles de l’information et de la communication / Compétence numérique / 3.L’utilisation des techniques usuelles de l’information et de la communication numérique;
  • 5. Culture humaniste / Sensibilité et expression culturelles / Rien ;
  • 6. Compétences sociales et civiques /Compétences sociales et civiques /4.L’aptitude à travailler dans le cadre de règles définies d’un travail en équipe– 5.  La maîtrise des gestes et postures, et le respect des règles d’hygiène, de sécurité et environnementales élémentaires;
  • 7. Autonomie et initiative Esprit d’initiative et d’entreprise 6.L’aptitude à travailler en autonomie et à réaliser un objectif individuel ;
  • 7.  Autonomie et initiative / Apprendre à apprendre /7. La capacité d’apprendre à apprendre tout au long de la vie

 

Annexe 3 :

REPARTITION par France COMPETENCES de la COLLECTE de l’URSSAF

 

 

 

 

Annexe 4 :

L’ASPHYXIE de la SECURITE SOCIALE

 

Les recettes du Régime général de la Sécurité sociale en 2012 se répartissent de la façon suivante :

les cotisations : 58,4 % (56 %en 2016)

la Contribution Sociale Généralisée : 20,4 % (24 %en 2016)

les impôts et taxes : 13 % (13% en 2016)

transferts : 6,3 %

les autres produits : 1,1 %

les cotisations prises en charge par l’État : 0,8 %

 

 

 

One Commentaire

  1. Pierre Guivarc'h
    Posted 19 octobre 2018 at 12:06 | Permalien

    Bonjour,
    Très intéressant, comme toujours, mais afin de ne pas effrayer les éventuels lecteurs ne pas reproduire le texte, déjà complexe, quatre fois.
    Cordialement.

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