Dans son discours aux jeunes de l’UMP à la porte de Versailles, le 31 mars, Nicolas Sarkozy, annonçait qu’il créerait une « banque de la jeunesse » s’il était élu.
Il cherchait ainsi à répondre à la proposition de François Hollande de mettre en place une allocation d’études et de formation, sous conditions de ressources. Le but de cette allocation est de répondre aux besoins d’autonomie des jeunes et leur permettre de continuer leurs études sans être obligés d’occuper un emploi salarié.
Mais la proposition de Nicolas Sarkozy, sous prétexte de refuser l’ « assistanat » consiste à livrer la jeunesse aux banques.
Ce qu’il propose aux jeunes c’est de financer leurs études avec des prêts bancaires, pouvant aller jusqu’à 500 euros par mois « sans conditions de ressources et cumulables avec les bourses ».
Aucune « banque de la jeunesse » ne serait créée. Il s’agit de l’habituel effet d’annonce de Sarkozy. Seul serait mis en place un système de caution destiné à garantir une partie du remboursement des prêts bancaires. En 2008, Valérie Pécresse avait déjà proposé une mesure de la même espèce : un prêt étudiant garanti à 70 % par l’Etat, avec un montant maximal de 15 000 euros et la possibilité d’un remboursement différé. L’objectif fixé par Valérie Pécresse était de 40 000 prêts fin 2009. Les étudiants ne s’étaient pas précipités pour autant : fin 2011, seuls 27 000 prêts avaient été signés.
Le prêt proposé par Sarkozy devrait être remboursé lorsque les jeunes auraient un travail. La caution apportée par l’Etat ne changerait rien à l’affaire. Elle ne serait que partielle et, surtout, une caution qui a remboursé un prêt à la place de l’emprunteur a toujours la possibilité de se retourner contre ce dernier et d’exiger, à son tour, d’être remboursée. Un boulet au pied à traîner, de toute façon, pendant une dizaine d’années.
L’entourage de Sarkozy affirme que les remboursements seraient « modulables » et qu’en-dessous de 1,3 Smic par mois, le remboursement ne devrait pas excéder 7 euros par mois. C’est un mensonge de plus. A ce rythme là, il faudrait 215 ans pour rembourser un prêt qui auraient permis de disposer de 500 euros par mois pendant 3 ans !
Ce que propose Sarkozy c’est de livrer les jeunes de notre pays aux banques, comme le sont aujourd’hui les jeunes Américains. Selon la Réserve fédérale des Etats-Unis, la dette des étudiants américains s’élève à 1 000 milliards de dollars (750 milliards d’euros, plus du tiers du PIB de la France en 2012 !). En 2007, cette dette s’élevait à 500 milliards d’euros. Elle s’élèvera à 1 400 milliards d’euros en 2020. Ce n’est pas 7 euros ou 10 dollars par mois que ces jeunes doivent rembourser une fois qu’ils ont trouvé un travail mais 20 % (en moyenne) de leurs salaires mensuels.
Cette fuite en avant dans le crédit est de la même veine que celle qui avait provoqué la crise des « subprime » aux Etats-Unis. Sarkozy est, décidément, incapable de tirer la moindre leçon de la crise 2007-2008.
Jean-Jacques Chavigné
12 Commentaires
En tant qu’étudiant et de gauche, je ne voterais pas pour Sarkozy ni pour la Droite . Mais François Hollande ne me rassure pas non plus quand il qualifie la finance d’ennemis sans visage. Ce n’est pas vrai et beaucoup de livres comme celui de G.Geuens permettent d’identifier qui sont les groupes financiers, leur organisation, ceux qui sont à leur têtes, leur noms et leur parcours, les conseils d’administration, les financements de Think tank de gauche par des grands groupes industriels, leur liens tres etroits avec les hommes politiques sociaux democrates dans tous les pays européens. Hollande est un honnête homme mais ne remettra pas seul en cause le neoliberalisme (nouveau nom du capitalisme mais en fait c’est la même chose) car son entourage est truffé de personnes solidaires et remunérées par les groupes financiers ou industriels. Ces mêmes personnes, par exemple le banquier Pigasse, souhaitent un liberalisme soft. Mais il ne peut pas être soft et est par essence très inegalitaire ! On ne peut pas être juge et partie et beaucoup de français – qui ne veulent d’un avenir grec ou espagnol – en parlent en ce moment. Ils savent tres bien que la presence de socialistes dans d’autres pays européens n’a rien arrêté. Monsieur Filoche, j’apprecie vos prises de positions mais sont elles compatibles avec celles de P.Moscovici du cercle de l’Industrie, ou d’Hubert vedrine administrateur de LVMH et il y en a beaucoup d’autres. Cela m’inquiete beaucoup et je crois que cela explique la montée de Melenchon. On connait tous tres bien maintenant les positions haut placées des personnalités socialistes dans le systeme. Mais sont elles encore socialistes ?
@pierre : excellent, pas mieux……….mais je ne suis pas persuadé que mélenchon puisse faire mieux, qui que se soit d’ailleurs. malgré les critiques, j’irai à la pêche pour les deux tours…….
Avec le « rmi » étudiant, l’augmentation de l’alloc de rentrée scolaire, … Etc, Hollande continue de raser gratis … C’est vraiment une manière irresponsable de gérer les problèmes de la jeunesse que de l’assister, et cela donne le signal que finalement, nul besoin de faire des efforts, l’état sera toujours là pour fournir une allocation ou une autre….cela correspond bien à la mentalité socialiste, qui ne veut pas entendre parler de goût de l’effort et de récompense …
La dette publique française ne cesse d’augmenter : 122,1 milliards d’euros de plus en un an. En Espagne c’est pire et la reduction des depenses publiques accroit le chômage qui accroit les deficits qui accroit l’endettement etc… La dette publique est l’argument clé des conservateurs pour le demantelement de l’Etat. (C’est d’ailleurs l’objectif de l’ Accord Général pour le Commerce de Services — le G. A. T. S. en anglais, décidé par l’O.M.C. en 1995 — qui prévoit pour la fin de la première décennie des années 2000 la privatisation des services publics) Argument utilisé en Grèce et en Espagne. (bientôt chez nous ?) Et aucun candidat n’en parle. Ma crainte est que Hollande pour sauver les finances et sous la pression des milieux financiers – auxquels sont liés la majorité des représentants du PS – demantèle l’Etat. En Grèce comme en Espagne, la contestation fatigue et la résignation a remplacé l’indignation. C’est comme un etranglement progressif. Les dernieres mesures prises en Grece sont une vraie saignée, l’Espagne souffre beaucoup aussi et la population ne semble plus capable de s’organiser collectivement pour s’opposer. Et toujours pas de réponse de Gerard Filoche dont je suis pourtant sûr de l’honnêteté.Quelles garanties avons nous du PS que la France, avec une telle dette, ne risque pas le même destin ? Et je le répète, seul Mélenchon tire la sonnette d’alarme.C’est déjà ça…
@Vero : merci !
de toutes façons il faut bien comprendre que l’état-providence, c’est terminé…
Nemo ou Nostradamus? Des phrases avec arguments. Non des predictions. Si vous en êtes capable, bien sûr. Merci.
ça n’est pas une prédiction, c’est un constat…Et le message qu’il faut faire passer à la jeunesse, c’est qu’il va falloir se retrousser les manches…D’ailleurs Mitterand lui-même avait confessé que l’état ne pouvait pas tout…Si on veut retrouver une croissance saine, cad non créée artificiellement par de la dette, il faut commencer par arrêter de promettre monts et merveilles…
Hollande ne sera pas capable à lui seul de renverser la situation. Et même un Mélenchon à 15 % ne suffira pas, car la pression des marchés financiers et de l’UE sera terrible.
Au moins Hollande peut-il tenir bon sur les acquis sociaux (ceux que la droite n’a pas démentelé), mettre en place un début de régulation là ou le libéralisme a constamment guidé l’action des gouvernements précédents, effacer la contre-réforme fiscale sarkoziste, dégager des marges pour l’Ecole, la transition écologique, etc…
Pour aller plus loin, il faudrait un Mélenchon fort + un réveil de la gauche européenne sur des bases anti-libérales + un mouvement social de grande ampleur, coordonné.
En attendant, la gauche n’a pas le droit de démissionner, elle doit assumer les responsabilités du pouvoir. Hollande a donc raison de refuser un programme irréaliste qui ne pourra pas être mis en oeuvre dès mai 2012 (je parle de celui du Front de gauche) car la France ne vit pas sur la planète Mars, que Mélenchon le veuille ou non.
Quant aux liens entre entre les dirigeants socialistes et le monde des affaires, figurons-nous qu’il va bien falloir parler aux banquiers et autres grands patrons. La gauche réformiste est dans le compromis, ce n’est pas le grand soir qu’elle propose.
et on aura encore besoin pour longtemps des patrons, des entreprises privées et du marché.
Louis,
Sans vouloir faire dans l’extremisme le plus radical, il est rare qu’on ‘parle’ avec un banquier. Travailler dans la Finance ou la banque suppose une certaine vision de la vie et des hommes. Et ils ne connaissent que les rapports de force. Le problème est qu’il est aujourd’hui tellement en leur faveur qu’on ne peut lucidement esperer quelque chose qu’en allant au conflit. Ils ne donneront rien d’eux mêmes. C’est d’ailleurs de cette seule façon que les acquis sociaux ont pu être obtenus (sauf en 44 et 45). Malheureusement, je le repète, car il serait plus simple que chacun fasse preuve d’un peu de sagesse. Je suis inquiet car je ne crois pas ces gens capables de compromis, la possibilité de privatiser les services publics est à portée de main pour eux.Et l’Etat qui leur a pourtant sauvé la vie, les banquiers et autres ‘marchés financiers’ ne cessent de l’accuser de mauvaise gestion. On a besoin certainement besoin du marché, des entreprises, mais sans crises financieres tous les 4 ans, chômage de masse etc…On voit bien aujourd’hui que les banquiers sont un peu ‘ivres’ de leur force et même étonnés de la facilité avec laquelle ils peuvent imposer leur points de vue. On a tous un oeil sur la Grece et la transformation qu’elle vit actuellement. Le probleme est que l’Etat est composé de futurs financiers et les financiers, d’ex hommes d’Etat.
Pierre,
je suis d’accord avec l’idée du rapport de forces, je ne suis pas naïf et il n’est pas question de sagesse là-dedans.
Reste que diriger une entreprise ou une banque est un métier. reste qu’on ne peut pas demain matin supprimer le marché, ni le profit. Tout en créant un rapport de forces (par les élections notamment), il faudra bien négocier avec « le monde de la finance ».
le PS n’est pas le PSE
ni le Pasok
il n’y a pas de fatalité à perdre.
Quelles garanties avons nous du PS que la France, avec une telle dette, ne risque pas le même destin ? aucune ! raison de plus de lutter avec et pour la gauche socialiste !
Autrement dit maintenant nosu nous enjoignez de voter hollande de peur que le ps ne passe totalement à droite ?
voilà un sommet de la pensée humaine ! (heu … risible au fond)
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