Chronique Humanité Dimanche n°90 : augmenter le coût du travail !

On nous fait pleurer sur les petits patrons qui ne supporteraient pas une augmentation de salaires. Stop, assez, n’en jetez plus ! J’en ai contrôlé des petits commerçants, tiens, qui vendent des valises pas chères, quasi en carton, pour les immigrés, en plein cœur de Paris. Le patron, il a quatre boutiques, avec quinze salariés dans chacune, il fait des pieds et des mains pour ne pas avoir de délégué du personnel, encore moins de comité d’entreprise. Il paie au Smic plus des primes et il aime bien le turn over, qu’il n’y ait surtout pas trop d’anciens… Mais lui-même se paie autour de 5000 euros par boutique, soit 20 000 euros par mois, quasi un salaire de président de la République. Il fait tout pour ne pas appliquer les 35 h, pour ne pas payer les heures supplémentaires. Quand l’inspecteur du travail arrive, il jette des hauts cris, menace de fermer si on l’oblige à respecter les lois.
Bon, ils ne sont pas tous comme ça. Il y a un million de patrons de moins de 10 salariés, 97 % des entreprises ont moins de 50 salariés. Il y en a qui sont honnêtes et ne tirent pas à ce point sur la corde des profits, d’autres qui s’exploitent eux-mêmes pire que des salariés, sans s’en sortir. Ils sont d’ailleurs victimes de plus riches donneurs d’ordre sans scrupule.
Mais quand on a augmenté le Smic de 33 % en juin 1968, ça n’a fait fermer aucune entreprise : au contraire, les petites ont trouvé de nouveaux clients. Tel petit éditeur a mieux payé ses 15 salariés, mais des centaines de milliers de gens ont pu, à nouveau, acheter davantage de livres. Le petit artisan zingueur a réparé davantage de gouttières que les gens, avant, ne faisaient plus réparer. Le boucher a vu des clients revenir acheter une bonne tranche d’onglet. Augmenter les petits salaires, c’est bon pour l’entreprise.
Nos 8 millions de pauvres qui mangent des pâtes à partir du 10 du mois, et de la viande à peine trois fois le mois, vont acheter plus. De l’argent pour les loisirs, c’est de l’argent pour les industries du loisir. De l’argent pour la santé, c’est de l’argent pour l’économie de la santé. On peut tirer tout le monde vers le haut en augmentant ceux d’en bas : c’est beaucoup plus sûr qu’en attendant que ceux d’en haut ré investissent.
Un état et une entreprise ce n’est pas comme un ménage, il faut que ça dépense plus, que ce que ça gagne. Et si vous avez des banquiers qui vous disent : « Non, non rétablissons d’abord les comptes », empêchez-les de nuire. Quand Merkel tarit les comptes de l’Europe, étrangle la Grèce, nous menace tous, il n’y a aucune chance que le boulot reprenne, et que des sous rentrent pour rembourser  les dettes de ses amis banksters, aucune. C’est elle qui prolonge la crise de son propre système.
Dites-le partout qu’il faut augmenter le « coût du travail », pas le baisser. Qu’il faut davantage de dépenses publiques, pas moins. En 1945, on avait 290 points de dette par rapport au PIB, on a dépensé plus, fait la Sécu, la retraite, des CE…

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