En attendant Aubry et Ayrault, deux orateurs ont su sortir les militants de leur torpeur : Manuel Valls et… Gérard Filoche.

Congrès de Toulouse : le PS applaudit des deux ailes
Créé le 27-10-2012 à 11h30 – Mis à jour à 15h31 Par Nicolas Chapuis
En attendant Aubry et Ayrault, deux orateurs ont su sortir les militants de leur torpeur : Manuel Valls et… Gérard Filoche.
Mots-clés : François Hollande, ministres, Gouvernement Ayrault, Congrès du PS – Nouvel Observateur

« Je suis fier d’être ministre de Jean-Marc Ayrault », a déclaré Manuel Valls. (LIONEL BONAVENTURE/AFP)

L’applaudimètre réserve des surprises au congrès de Toulouse. Alors que les intervenants se succèdent pour des interventions très courtes et chronométrées, les grands gagnants de la matinée sont Manuel Valls et… Gérard Filoche. Avant lui, Benoît Hamon avait un peu réveillé les militants avec un discours enlevé, de défense du gouvernement. Le procès en amateurisme ? Hamon raille la droite, « la belle bande de professionnel qui nous a laissé 600 milliards d’euros de dette supplémentaire. » Une saillie qui porte.
Mais c’est bel et bien Filoche qui emporte le morceau. La salle ronronne mais le pilier de l’aile gauche entame un discours offensif qui fait taire peu à peu le brouhaha. Fort du joli score réalisé par la motion conduite par Emmanuel Maurel, l’ancien de la LCR retrouve des accents syndicalistes et s’invite dans le débat sur le coût du travail : « Le travail ce n’est pas un coût, c’est une richesse ! » Avant de s’emporter contre l’expression « charge sociale » : « Ça n’existe pas. Ce sont des cotisations sociales. Et les cotisations sociales, c’est magnifique. Il ne faut pas les baisser, jamais ! » La voix gronde et les acclamations déboulent des tribunes pour saluer la sortie de Filoche. Pascal Terrasse, député de l’Ardèche, se moque légèrement sur Twitter : « J’ai un peu l’impression d‘être à un congrès du Parti communiste. »
De l’ordre !
Quelques minutes après, le ministre de l’Intérieur entre en scène devant une assemblée enfin à point. Filoche, chauffeur de salle pour Manuel Valls… Qui l’aurait cru ! Le héraut de l’aile droite du PS prend le relais. Au menu, l’ordre républicain et la sécurité. Le ministre de l’Intérieur défend son action : « Nous mettons en oeuvre, je mets en oeuvre, une autre politique de sécurité avec plus de moyen et un autre rapport dans lequel les forces de l’ordre doivent respecter les citoyens, pour que les citoyens respectent eux aussi les forces de l’ordre. »
Il attaque le bilan de la majorité précédente. « Soyons lucide, la sécurité n’est pas de droite, ils ont échoué sur le sujet. » Valls s’enflamme à la tribune : « C’est la gauche qui a inventé la Nation. Face à une droite rance, petite, mesquine courant derrière le FN, et face à une extrême-droite haineuse, nous ne nous laisserons pas faire. » Le discours dévie sur la laïcité : « Nous ne pourrons pas accepter qu’un autre ordre des mafias, ou un ordre religieux s’impose par rapport à l’ordre républicain. »
Avant de parler de sa propre action, Valls a tout de même pris soin de réaffirmer sa loyauté à Jean-Marc Ayrault, « un Premier ministre à l’écoute, qui arbitre, qui tranche, qui coordonne, qui agit, et met en œuvre les engagements du président. Je suis fier d’être ministre de Jean-Marc Ayrault. » Certains l’accusent de jouer perso face au chef du gouvernement. Valls lâche : « Il n’y aura pas de réussite individuelle sans réussite collective. »
Ça tombe bien, jouer en équipe rapporte sur le plan personnel. Manuel Valls le sait, qui se fait ovationner par la foule. Le ministre de l’Intérieur quitte la scène et le brouhaha général reprend. Ni Claude Bartolone, ni Pierre Moscovici ne parviendront à capter l’intérêt de la salle qui résonne de gargouillis à l’approche du repas. Les militants filent se restaurer en attendant l’après-midi. En dessert, ce sera Martine Aubry et Jean-Marc Ayrault.

Les ténors du PS tentent de mettre l’ambiance à Toulouse
La première journée du congrès PS de Toulouse manquait de ferveur. Manuel Valls a réveillé la salle samedi matin.

Claude Bartolone, Pierre Moscovici, Martine Aubry… Et Jean-Marc Ayrault pour clore l’après-midi. Les ténors socialistes se succèdent à la tribune du congrès de Toulouse samedi. De quoi réchauffer l’ambiance. Car dans ce rendez-vous sans véritable enjeu, le climat est certes « apaisé ». Mais loin de la ferveur des grands jours.

« Coup de blues chez les socialistes », titrait ce matin Le Figaro. « Un congrès PS sans entrain », renchérissait Le Monde. « C’est vrai que les gradins ne sont pas pleins et que le public est souvent rappelé à l’ordre parce qu’il discute pendant les interventions, souligne jean-Michel Tichane, de la Fédération du Lot-et-Garonne. Les militants se sentent peut-être moins concernés parce qu’on a désormais tous les pouvoirs, mais pour moi ça doit être tout le contraire : c’est maintenant qu’il faut s’engager à fond pour soutenir le gouvernement. »

Valls en chauffeur de salle

Bruno Le Roux, le patron des députés PS, n’est pas inquiet sur la motivation des troupes. « C’est toujours calme dans les congrès le vendredi, mais aujourd’hui, tout le monde est là et content de se retrouver, nous assure-t-il. Je ne sens pas de morosité, même s’il est vrai que face aux difficultés, on a besoin de donner du sens à notre action, auprès des Français comme auprès des militants ». L’heure est au sérieux, donc.

Dans la grande salle plénière ce samedi, les orateurs ont commencé à réveiller l’assistance. Le discours de Gérard Filoche, représentant de l’aile gauche du PS, a été chaudement salué. A l’autre bout de l’échiquier politique du parti, Manuel Valls a lui aussi fait un tabac. Son discours de mobilisation enflammé, dans lequel il a défendu sa politique de sécurité et s’est dit « fier » d’être ministre de Jean-Marc Ayrault, a été acclamé par les militants. Déjà à La Rochelle, c’est lui qui avait été le ministre le plus applaudi.

Claude Bartolone lui a ensuite succédé à la tribune. « J’entends dire que le PS serait déprimé . Vous vous sentez déprimés, vous ? », a lancé à la salle le président de l’Assemblée. « Déprimé, sûrement pas, mais concentré », a-t-il poursuivi, délivrant « un message d’énergie, de fierté ».

Au congrès de Toulouse, le PS s’offre une thérapie de groupe
Mots clés : Congrès du PS, PS, Toulouse, Jean-Marc Ayrault, Delphine Batho
Par Anne Rovan, Solenn de Royer Mis à jour le 29/10/2012 à 08:44 | publié le 28/10/2012 à 22:00 Réactions (57)

Dans le rôle du «psy», les ministres se sont relayés pendant les trois jours du congrès au chevet du chef du gouvernement, en difficulté face aux critiques d’amateurisme et à la série de couacs.

Faire taire les critiques d’«amateurisme» émises par l’opposition. Tourner la page des couacs. Et redonner le moral à des militants parfois déstabilisés par la multiplication des mauvais sondages et la gravité de la crise. Réunis ce week-end à Toulouse pour leur premier congrès depuis la victoire, les socialistes se sont offert une véritable thérapie de groupe, tout en s’efforçant de se montrer unis et soudés derrière leur «soldat Ayrault».
Dans le rôle du «psy»: les ministres, qui se sont relayés trois jours durant au chevet du chef du gouvernement. Manuel Valls a pris la tête de l’escouade, louant «un premier ministre disponible, à l’écoute, qui arbitre et qui tranche, qui coordonne, qui agit et met en œuvre les engagements» de François Hollande. «Je suis fier d’être ministre de Jean-Marc Ayrault», a ajouté le ministre le plus populaire du gouvernement.
L’ex-première secrétaire Martine Aubry est venue en renfort, louant les qualités d’«honnête homme» de Jean-Marc Ayrault, tandis que son successeur Harlem Désir saluait «un grand premier ministre de gauche». «Tu peux compter sur chaque militant», a ajouté Désir, faisant applaudir à tout rompre Jean-Marc Ayrault qui, porté à bout de bras par la salle, a fini par se lever, pour saluer les participants.
Réactiver la liesse du 6 mai
Dans un discours très offensif, le chef du gouvernement s’est employé lui-même à défendre sa méthode, celle de la négociation et du dialogue social, même si cela doit prendre «du temps» et «au risque d’être critiqué sur le rythme des réformes». «J’assume et je revendique, a-t-il martelé. Cette méthode, elle marche!» Accusé de ne pas faire assez de pédagogie sur le sens de son action, le premier ministre a tenté une mise en perspective, dessinant les contours d’un «nouveau modèle français», basé sur le préalable d’une réduction des déficits.
Trois jours durant, face à des militants souvent inquiets, les ténors socialistes se sont employés à réactiver la liesse de la victoire du 6 mai. Comme ils le faisaient durant la campagne présidentielle, ils n’ont eu de cesse de charger Nicolas Sarkozy et François Fillon, qui portent, selon eux, la responsabilité de la situation du pays. «Nous n’avons aucune leçon à recevoir de la droite, a lancé Harlem Désir. La droite, c’est 600 milliards d’euros de dette en cinq ans, les comptes sociaux plombés, 70 milliards de déficit extérieur et plus d’un million de chômeurs supplémentaires en cinq ans.»
Le premier secrétaire s’est employé à réactiver les ressorts porteurs de l’antisarkozysme: «Ils essaient de nous faire croire à une nostalgie Sarkozy. Mais de quoi les Français devraient-ils être ¬nostalgiques ?, a-t-il interrogé. Du yacht de M. Bolloré ou de celui de M. Takieddine? (…) De la tente de Kadhafi plantée dans les palais officiels? Du paquet fiscal ou de la TVA sociale?» Succès garanti dans la salle.
Lignes de fracture
Tout cela n’a pas suffi à éclipser les doutes, alors que les clivages se multiplient au sein de la majorité (droit de vote des étrangers, compétitivité, réduction des déficits publics, etc.). Proche de Ségolène Royal, la ministre de l’Écologie, Delphine Batho, a ainsi estimé que le gouvernement devait faire preuve «de lucidité et d’ambition». Et admis «les difficultés qu’a rencontrées la gauche lors de son arrivé au pouvoir». De son côté, le député de Paris Jean-Christophe Cambadélis a évoqué une «situation épouvantable sur le plan politique et médiatique».
Chez les militants, qui ont pourtant voté pour la motion majoritaire portée par Harlem Désir, des lignes de fracture subsistent. Et certains ne sont pas prêts à mettre leurs critiques en sourdine au seul motif que Hollande est désormais président de la République. Le membre de l’aile gauche du parti, Gérard Filoche, qui a tenu un discours très ancré à gauche samedi, a ainsi été vivement applaudi quand il a asséné: «Le travail n’est pas un coût, c’est une richesse.» Tout comme Manuel Valls sur l’ordre républicain et la sécurité. «Entre Filoche et Valls, on se demande quelle est la ligne», résume en plaisantant un congressiste.

6 Commentaires

  1. mat_la_menace
    Posted 29 octobre 2012 at 18:06 | Permalien

    Que dans un congrès politique on fasse la promotion de l’applaudimètre, et que son appréciation au doigt mouillé soit relatée dans les médias est particulièrement désolant pour une démocratie avancée.

  2. Anonyme
    Posted 29 octobre 2012 at 21:01 | Permalien

    J’e n’arrive décidément pas à m’y faire : Valls prétend défendre la laícité et le samedi précédent iĺ était au Vatican pour assister à je ne sais quelle canonisation . Enfin apparemment tu aurais fait un malheur à l’applaudimètre. Pour quel résultat concrêt ? Car tout continuera comme précédemment. Quant à Harlem désir lui qui critique à juste titre Copé and Co , n’a-t-il pas lui aussi été condamné à plusieurs mois de prison avec sursis pour emploi fictif ? Enfin si tout le monde est heureux et que la politique de soumission au MEDEF – 11 ou 10 ministres quand même dont le 1er à l’Université d’été – ne dérange personne je suis parfaitement heureux pour tout pour le Parti Socialiste Libéral.
    La photo finale sur la scéne est accablante : que des hommes, une seule femme, tous en costume cravate et tous issus du même moule socio-professionnel

  3. lionel mutzenberg
    Posted 1 novembre 2012 at 18:57 | Permalien

    Très bonne intervention de Gérard Filoche. Merci.
    Dans ce rassemblement de socialistes libéraux il fallait tout de même oser. A l’évidence les petits bourgeois ne sont pas tous adhérents du centre, de l’UMP, ou même, de l’UDI.
    Que de chemin encore à parcourir, mon camarade.

  4. Philippe Levaillant
    Posted 5 novembre 2012 at 23:44 | Permalien

    Camarade,

    Qu’attends-tu pour rejoindre le Front de Gauche ?

    Que Manuel Vals soit Premier Ministre ?… ou Président ?

  5. Posted 8 novembre 2012 at 4:35 | Permalien

    qu’attends tu pour aider toute la gauche à résister au plan Galois ? vos borborygmes appellant à « nous rejoindre » sont vains lassants, contre productifs

  6. Françoise Guyot
    Posted 8 novembre 2012 at 23:27 | Permalien

    Merci pour ta passion intacte pour la cause des travailleurs.
    Quand la caméra balaie les premiers rangs de la salle, on voit ce que je connais trop bien; de petits apparatchiks coincés qui ne voudraient surtout pas applaudir un rouge énervé comme toi, être vus ou filmés en train de t’applaudir, la honte quoi…
    MOI c’est pour eux que j’ai honte, et même un peu la nausée.
    J’ai écouté en direct sur LCP le discours de Harlem Désir, très réussi…Le hic, c’est qu’il commence par entériner la rigueur budgétaire, comme si ce préalable n’était pas incompatible avec une politique de gauche.
    C’est cela notre différend, et je crains de ne pas me tromper. Le Gouvernement et le PS font fausse route en acceptant la contrainte budgétaire dictée par l’UE et les banquiers. Il n’ont plus de marges de manœuvre et ne peuvent qu’aggraver la situation alors que nous venons de subir 10 ans de politiques de droite;C’est désespérant pour tous ceux qui comùme moi ont fait ce qu’il fallait pour que Sarkozy et consorts dégagent.
    Amitiés

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